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Le dernier royaume

Le dernier royaume

Titel: Le dernier royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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chasser. Nous échappâmes à sa redoutable lame grâce à notre
rapidité, quand un instant plus tard, nous entendîmes Thyra pousser un cri.
    Nous revînmes précautionneusement sur nos pas, redoutant
l’épée que Sven avait dû prendre chez son père. Quand nous atteignîmes notre
pitoyable hutte, Thyra avait disparu. Sa quenouille gisait sur le sol, et la
laine était jonchée de feuilles mortes et de brindilles.
    Malgré sa force, Sven était maladroit et il avait laissé
dans les bois une piste assez facile à suivre. Nous descendîmes jusqu’à la
vallée de notre ennemi, qui n’avait pas eu le bon sens de poster une sentinelle
qui l’aurait alerté de notre arrivée. Au lieu de cela, enivré par sa victoire,
il était allé dans la clairière qui devait lui servir de refuge dans la forêt,
car il y avait un âtre de pierres au milieu (je me souviens de m’être demandé
pourquoi nous ne nous en étions pas construit un aussi). Il avait attaché Thyra
à un arbre et lui avait arraché le haut de sa tunique. Il n’y avait rien à
voir, car ce n’était qu’une petite fille de huit ans. Je vis que les deux
compagnons de Sven faisaient mauvaise figure. Après tout, Thyra était la fille
du jarl Ragnar et ce jeu devenait dangereux, mais Sven voulait parader, prouver
sa hardiesse.
    Après avoir posé l’épée près de l’âtre, il se planta devant
Thyra et baissa ses braies.
    — Touche-la, ordonna-t-il.
    L’un de ses compagnons lui dit quelque chose que je
n’entendis pas.
    — Elle ne dira rien à personne, le rassura Sven, et
nous ne lui ferons point de mal. (Il se retourna vers Thyra.) Je ne te ferai point
de mal si tu la touches !
    C’est alors que je surgis de ma cachette. Je ne faisais
guère preuve de courage : Sven avait les braies aux chevilles et il avait
abandonné auprès de l’âtre son épée dont je m’emparai avant de courir sur lui.
    — Je vais la toucher, moi ! criai-je en
brandissant la longue lame vers lui.
    Mais l’arme était lourde et c’était la première fois que je
maniais une épée d’homme. Au lieu de frapper là où je le voulais, j’entaillai
sa cuisse nue, avant de faire tournoyer mon arme et de le frapper à la taille,
où son haut de chausses amortit le choc. Il tomba en hurlant et ses deux
compagnons me retinrent tandis que Rorik allait détacher sa sœur.
    Il ne se passa rien de plus. Sven saignait, mais il parvint
à remonter ses braies et ses amis l’entraînèrent, tandis que Rorik et moi
emmenions Thyra à la maison. Ravn, entendant les sanglots de la petite fille et
nos éclats de voix, ordonna le silence.
    — Uhtred, demanda le vieil homme d’un ton grave, va
attendre près de la porcherie. Rorik, conte-moi ce qui s’est passé.
    J’attendis dehors tandis que Rorik s’expliquait, puis il
sortit et je fus appelé à l’intérieur pour narrer à mon tour la mésaventure.
Thyra se blottissait dans les bras de sa mère, laquelle était aussi furieuse
que sa grand-mère.
    — Tu m’as fait le même récit que Rorik, dit Ravn quand
j’eus terminé.
    — Parce que c’est la vérité.
    — C’est ce qu’il semble.
    — Il l’a violée ! soutint Sigrid.
    — Non, dit Ravn d’un ton ferme. Il ne l’a point
touchée, grâce à Uhtred.
    L’histoire fut narrée à Ragnar lorsqu’il rentra de la chasse
et, comme elle faisait de moi un héros, je ne contestai pas l’essentiel – que
Sven n’avait aucune intention de violer Thyra. Son imprudence ne connaissait
guère de limites, mais violer la fille du jarl Ragnar, suzerain de son père,
était au-delà de la sottise, même pour Sven. Pourtant, il s’était fait un
ennemi : le lendemain, Ragnar et six de ses hommes se rendirent à la
demeure de Kjartan. Rorik et moi reçûmes des chevaux et l’ordre de les
accompagner. J’avoue que j’étais effrayé. Je me sentais responsable. C’était
moi qui avais déclenché ces batailles dans les bois, mais Ragnar n’en avait
cure.
    — Ce n’est pas toi qui m’as offensé, c’est Sven,
proféra-t-il d’un ton sombre, sa jovialité habituelle envolée. Tu as agi comme
il le fallait, Uhtred. Tu t’es conduit comme un Dane.
    Il n’aurait pu me dispenser plus bel éloge, mais je sentais
qu’il était déçu à l’idée que c’était moi qui avais attaqué Sven, et non Rorik.
     
    Nous traversâmes la forêt glacée et j’étais intrigué, car
deux des hommes de Ragnar portaient de minces branches de noisetier. J’ignorais
à

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