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Le dernier royaume

Le dernier royaume

Titel: Le dernier royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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avions rapportée, mais elle ne portait aucune marque de propriétaire.
C’était une simple tige de charme, empennée de plumes d’oies et munie d’une
pointe d’acier.) Un accident, conclut-il.
    Plus tard, cet hiver-là, nous retournâmes à Eoferwic pour
réparer les navires. J’appris à fendre des troncs de chêne avec coin et
maillet, et à façonner les longues planches pâles qui renforceraient les coques
pourries. Le printemps vit arriver d’autres bateaux, d’autres guerriers, et
parmi eux Halfdan, le jeune frère d’Ubba et Ivar. C’était un homme de haute
taille, avec une abondante barbe et des yeux flamboyants. Il étreignit Ragnar,
me donna un coup sur l’épaule, à Rorik une tape sur la tête, jura qu’il tuerait
tous les chrétiens d’Anglie, puis alla voir ses frères.
    Tous trois fomentèrent la nouvelle guerre, celle qui,
promettaient-ils, dépouillerait l’Estanglie de ses trésors.
    La moitié de l’armée progresserait à terre, tandis que
l’autre, celle où servaient Ragnar et ses hommes, utiliserait la voie maritime.
J’attendais avec impatience mon premier vrai voyage, mais avant le départ
Kjartan vint voir Ragnar, suivi de son fils Sven, son œil borgne creusant un
trou rougeâtre dans son visage maussade.
    — Je désire combattre avec toi, seigneur, dit Kjartan qui
s’agenouilla devant Ragnar.
    Le capitaine avait commis une erreur en venant avec Sven,
car Ragnar, d’habitude si généreux, jeta un regard noir au garçon. Je dis
« garçon », mais en vérité c’était déjà un homme qui promettait
d’être immense et robuste, avec une large poitrine.
    — Tu désires combattre avec moi, répéta Ragnar d’une
voix sans timbre.
    — Je t’en supplie, mon seigneur, insista Kjartan.
    Cela avait dû lui coûter de prononcer ces paroles, car
Kjartan était un homme fier ; mais à Eoferwic, il n’avait récolté nul
butin, gagné ni bracelet ni renommée.
    — Mes navires sont pleins, répondit froidement Ragnar
en se détournant.
    Je vis la haine se peindre sur le visage de Kjartan.
    — Pourquoi ne part-il point avec un autre ?
demandai-je à Ravn.
    — Parce que tous savent qu’il a offensé Ragnar, et lui
donner une place aux rames, c’est risquer l’ire de mon fils, dit Ravn en
haussant les épaules. Kjartan devrait rentrer au Danemark. Celui qui a perdu la
confiance de son seigneur a tout perdu.
    Mais Kjartan et son fils borgne restèrent à Eoferwic, et
nous partîmes à la voile en descendant l’Ouse jusqu’à l’Humber où nous passâmes
la nuit. Le lendemain matin, nous ôtâmes les boucliers du flanc des navires,
puis nous attendîmes que la marée ait soulevé les coques pour ramer jusqu’au
large.
    J’avais déjà pris la mer à Bebbanburg, avec des pêcheurs,
pour jeter des filets aux alentours des îles Farne, mais là c’était différent.
La Vipère glissait sur les vagues comme un oiseau au lieu de les
affronter comme un nageur. Nous profitâmes du noroît pour hisser la
grand-voile. Les rames furent rentrées et les écoutilles bouchées tandis que la
voile claquait et se gonflait pour nous entraîner au sud. Nous étions
quatre-vingt-neuf navires au total : une flotte de tueurs à têtes de
dragons qui faisaient la course et s’insultaient lorsque l’un d’eux devançait
l’autre. Ragnar pesait sur le gouvernail, ses cheveux flottant dans le vent et
sur les lèvres un sourire plus large que l’océan. Les cordages de peau de
phoque crépitaient, le navire semblait bondir sur les flots, bouillonner sur
les crêtes et glisser sur le flanc des vagues dans des gerbes d’embruns. Au
début, je fus effrayé car la Vipère ployait, presque couchée sur les
rouleaux verts, puis, ne voyant nulle crainte sur les visages des hommes,
j’appris à apprécier ce chahut, poussant des cris de joie chaque fois que la
proue fendait une lame et que l’eau se déversait en cascade sur le pont.
    — J’adore cela ! me cria Ragnar. Au Valhalla,
j’espère retrouver vaisseau, mer et vent !
    La côte était toujours en vue à tribord. C’était une ligne
verte, parfois brisée de dunes, mais sans arbre ni colline. Alors que le soleil
baissait, nous voguâmes vers la terre, tandis que Ragnar ordonnait de replier
la voile et de sortir les rames.
    Nous entrâmes dans une contrée de marécages et de roseaux,
de cris d’oiseaux et de hérons à longues pattes, de pièges à anguilles et de
digues, et je me rappelai que mon père traitait

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