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Le dernier royaume

Le dernier royaume

Titel: Le dernier royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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alors.
    — Elle est soumise aux Danes.
    — Mais ton oncle y vit.
    — Mon oncle ?
    — Le frère de ta mère ! s’exclama-t-il, étonné que
je ne connaisse pas ma propre famille. Æthelwulf. Il est ealdorman, s’il vit
toujours.
    — Mon père ne m’a jamais parlé de ma mère, dis-je.
    — Parce qu’il l’aimait. C’était une beauté, ta mère, un
lingot d’or, et elle est morte en te mettant au monde.
    — Æthelwulf… répétai-je.
    — S’il vit encore.
    Mais pourquoi me tourner vers Æthelwulf, alors que j’avais
Ragnar ?
    — Ragnar m’apprend à me battre.
    — Tu apprends des meilleurs, hein ? répondit
Ealdwulf à contrecœur. C’est ainsi que l’on devient bon forgeron. En ayant bon
maître.
    Ealdwulf était un bon forgeron et, à son corps défendant, il
finit par apprécier Ragnar, qui était généreux et estimait les bons artisans.
Un atelier fût installé dans notre demeure de Synningthwait et Ragnar fournit à
Ealdwulf forge et enclume ainsi que marteaux, pinces et limes. Puis nous
achetâmes du minerai à Eoferwic et notre vallée résonna du fracas du fer
martelé. Même au plus froid de l’hiver, il faisait chaud dans la forge, et les
hommes s’y rassemblaient pour bavarder et deviser. Ealdwulf était grand amateur
d’énigmes que je traduisais pour les Danes émerveillés. La plupart parlaient de
ce qu’hommes et femmes font ensemble, mais j’aimais les plus compliquées. L’une
d’elles s’énonçait ainsi : mon père et ma mère m’ont cru mort, une fidèle
parente m’a recueilli, j’ai tué tous ses enfants, mais elle n’a point cessé de
m’aimer et de me nourrir, jusqu’au jour où je me suis élevé au-dessus des
maisons des hommes et où je l’ai abandonnée. Qui suis-je ?
    Ni moi ni les Danes ne trouvâmes. C’est seulement lorsque
j’en parlais à Brida que je connus la solution :
    — Un coucou ! devina-t-elle aussitôt.
    Et, bien sûr, elle avait raison.
    Au printemps, il fallut agrandir la forge. Pendant tout
l’été, Ealdwulf fondit de l’acier pour fabriquer épées, lances, haches et
pelles. Je lui demandai un jour si cela l’ennuyait de travailler pour les
Danes, et il se contenta de hausser les épaules.
    — J’ai travaillé pour eux à Bebbanburg, maugréa-t-il,
parce que ton oncle leur obéit.
    — Mais il y a des Danes à la forteresse ?
    — Non point, admit-il. Mais ils viennent en visite et
sont bien reçus. Ton oncle leur paie tribut.
    Il se tut, entendant un cri qui me parut de colère.
    Je sortis de la forge en courant et vis Ragnar devant la
maison, alors que sur le chemin approchait une troupe menée par un guerrier à
cheval. Et quel guerrier ! Il portait une cotte de mailles, un casque
magnifique accroché à sa selle, un bouclier peint de vives couleurs, une longue
épée et un grand nombre de bracelets. C’était un jeune homme aux longs cheveux
blonds et à l’épaisse barbe couleur d’or. Il fit écho au cri de Ragnar et
Ragnar courut vers lui. Je crus un instant que le jeune homme allait dégainer
son épée, mais ils s’étreignirent et s’assenèrent de grandes claques dans le
dos, puis Ragnar se tourna vers nous avec un sourire qui aurait illuminé les
plus sombres cryptes de l’enfer.
    — Mon fils ! Mon fils !
    C’était Ragnar le Jeune, revenu d’Irlande avec son équipage.
Bien que ne me connaissant pas, il me prit dans ses bras et me souleva du sol.
Puis il fit tournoyer sa petite sœur, donna une tape à Rorik, embrassa sa mère,
salua les serviteurs, distribua des bijoux en argent et caressa les chiens. On
ordonna un festin, et cette nuit-là il nous raconta qu’il commandait à présent
son propre navire, qu’il était revenu pour quelques mois seulement et qu’Ivar
voulait qu’il regagne l’Irlande au printemps. Il ressemblait tant à son frère
Rorik que je l’appréciai sur-le-champ. Certains de ses hommes logèrent avec
nous, et à l’automne ils coupèrent des arbres et bâtirent un grand château, tel
qu’il sied à un jarl, avec d’énormes solives et un haut pignon où fut cloué un
crâne de sanglier.
    — Tu as eu de la chance, me dit un jour Ragnar le
Jeune, alors que nous chaumions le nouveau toit avec d’épaisses couches de
seigle.
    — De la chance ?
    — Que mon père ne t’ait pas tué à Eoferwic.
    — Oui, c’est vrai, convins-je.
    — Mais il a toujours su juger les hommes, admit-il en
me passant un pichet d’ale, perché sur la crête du

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