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Le dernier royaume

Le dernier royaume

Titel: Le dernier royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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rien
de plus que cela : des mots. Mais il m’avait persuadé de me joindre à sa
flotte, je lui avais promis une année, et j’étais donc au port d’Hamtun. Se
battre sur un navire, c’est comme se battre à terre, mais en mer. Il suffit de
coller son propre navire à celui de l’ennemi, former un mur de boucliers et
tuer l’autre équipage. Mais notre charpentier, en homme malin, avait réfléchi qu’un
plus gros navire donnait à son équipage un avantage, car il pouvait porter plus
d’hommes et ses flancs, plus élevés, pouvaient servir de mur. C’est ainsi qu’il
avait construit douze gros vaisseaux, qui me parurent tout d’abord étranges,
car ils n’avaient point de figures de proue ou de poupe, mais des crucifix
fixés à leurs mâts. Toute la flotte était commandée par l’ealdorman Hacca qui
me conseilla d’envelopper ma cotte de mailles dans un sac huilé afin qu’elle ne
rouille point. Après quoi, il me laissa avec Leofric.
    — Montre-moi tes mains, m’ordonna celui-ci. (J’obéis et
il ricana.) Tu auras bientôt des ampoules, bout de cul.
    C’était son expression favorite. Il m’appelait ainsi, ou
encore Endwerc, ce qui signifie « casse-pieds », et fit de moi
un rameur, l’un des seize du rang de bâbord. Nous avions soixante guerriers à
bord, trente-deux ramaient en même temps, sauf lorsque la voile était hissée.
Werfeth était au gouvernail et Leofric nous haranguait pour que nous ramions
plus vite.
    Tout l’automne et tout l’hiver, nous ramâmes le long du
large chenal d’Hamtun et au-delà de Solente, luttant contre vents et marées,
poussantl’ Heahengel entre les vagues glaciales, jusqu’à ce que
nous formions un équipage et que nous soyons capable de le mener en mer. Je fus
surpris de constater que c’était un navire rapide. J’avais pensé qu’en raison
de sa taille il serait plus lent que les navires danes, mais il était rapide,
et Leofric était en passe d’en faire une arme mortelle.
    Il ne m’aimait point et bien qu’il m’appelât « bout de
cul », je ne l’affrontai jamais, car j’y aurais laissé la vie. Il savait
que j’étais un ealdorman, mais il ne s’en souciait guère, pas plus que de
savoir que j’avais autrefois servi sur un navire dane.
    — La seule chose que les Danes puissent nous enseigner,
bout de cul, me déclara-t-il, c’est comment mourir.
    Leofric ne m’aimait point, mais, moi, je l’aimais bien. Le
soir, quand nous allions dans l’une des tavernes d’Hamtun, je m’asseyais à côté
de lui pour écouter ses rares paroles, souvent méprisantes, même quand il
s’agissait de nos propres navires.
    — Douze, grondait-il. Et combien de vaisseaux possèdent
les Danes ?
    Personne ne répondait.
    — Deux cents ? continuait-il. Et nous douze !
    Un soir, Brida parvint à le faire narrer ses batailles, et il
évoqua la colline d’Æsc, et le mur de boucliers dane qu’il avait rompu à l’aide
d’une hache. Leofric lui-même avait fait cela, et il nous raconta comment il
tenait sa hache à mi-hauteur du manche, car cela permettait de se remettre plus
vite du coup, bien que cela diminuât sa force. Et qu’il s’était servi de son
bouclier pour repousser l’ennemi sur sa gauche, tout en tuant l’adversaire
devant lui, puis à droite, et comment il avait repris sa hache en bout de
manche pour la faire tournoyer et trancher dans les rangs des Danes. Il me vit
écouter et me considéra comme d’habitude en ricanant.
    — Tu as déjà été dans un mur de boucliers, bout de
cul ?
    — Il a même brisé le mur ennemi, déclara Brida.
(Leofric aimait bien Brida. Cependant, il refusait qu’elle montât à bord del’ Heahengel, car pour lui une femme apportait malchance à bord.) Je l’ai vu.
    Leofric me regarda, hésitant à la croire. Je ne pipai mot.
    — Contre qui te battais-tu ? demanda-t-il après un
silence. Des nonnes ?
    — Des Gallois, dit Brida.
    — Oh, des Gallois ! Par l’enfer, ils meurent
facilement.
    Ce n’était pas vrai, mais le lendemain, pendant que nous
nous entraînions avec des épées de bois, il me terrassa comme si j’étais un
chiot, me gratifia d’une entaille au crâne et me laissa presque assommé.
    — Je ne suis pas un Gallois, bout de cul,
s’esclaffa-t-il.
    J’aimais beaucoup Leofric.
    L’année passa. J’eus dix-huit ans. La grande armée dane ne
vint pas, mais des navires arrivèrent. Les Danes étaient de nouveaux Vikings,
et leurs vaisseaux dragons

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