Le dernier templier
d’avoir à rebrousser chemin. Le baromètre est en chute libre. Je n’ai jamais rien vu de tel.
De Angelis ne perdit pas un instant.
— Je m’en moque. Envoyez un hélico pour aller voir de plus près et amenez-nous là-bas aussi vite que possible.
74
La caméra se glissait dans des ténèbres sinistres, passant au milieu de galaxies de plancton qui scintillaient sur l’écran avant de s’éloigner rapidement du faisceau du projecteur.
Dans le poste de contrôle de Savarona — un espace exigu situé derrière la passerelle du bateau —, on retenait son souffle en regardant les images en provenance du robot téléguidé. Vance et Tess étaient debout, penchés au-dessus des épaules de Rassoulis et de deux techniciens assis devant une petite rangée de moniteurs. À gauche du moniteur montrant les images de la caméra du Dori, un écran GPS plus petit affichait la localisation actuelle du navire. Celui-ci formait des cercles et revenait régulièrement sur ses pas afin de conserver autant que possible sa position face à tin courant étonnamment fort. Un écran encore plus petit, sur la droite, donnait la retranscription informatique du balayage du sonar : un grand cercle avec des bandes concentriques bleues, vertes et jaunes. Le quatrième moniteur était une boussole informatisée : elle indiquait un cap quasiment plein sud. Mais personne n’accordait à ces écrans plus qu’un regard occasionnel. Les yeux étaient rivés dans un silence absolu sur le moniteur central, celui qui restituait les images de la caméra robotisée. Le fond de la mer n’était plus loin. Un indicateur, dans le coin de l’écran, se rapprochait rapidement des 173 mètres, la profondeur donnée par le sondeur de bord.
À 168 mètres, les petites taches étoilées grossirent. À 171 mètres, des langoustes à la démarche saccadée détalèrent devant la lumière. Puis, à 173 mètres, l’écran fut soudainement envahi par un jaillissement silencieux de lumière jaune. Le ROV avait atterri.
Le responsable de Dori , un technicien corse du nom de Pierre Attal, était concentré. Pour manipuler son « bébé » cybernétique, il utilisait un joystick et un petit clavier. Il tendit la main vers un trackball au bord du clavier. Répondant aux ordres des doigts manipulant la petite boule directionnelle, la caméra tourna sur elle-même, effectuant un panoramique du fond de la mer. Comme les vues d’une sonde martienne, les images montraient un monde inquiétant et inviolé. Tout autour du « visiteur » robotisé, une étendue plate de sable disparaissait dans des ténèbres impénétrables.
Sous l’effet d’une euphorie mesurée, Tess sentit naître la chair de poule. Elle ne pouvait maîtriser cette excitation, même si elle savait qu’ils n’avaient pas nécessairement trouvé l’endroit. Il s’en fallait peut-être même de beaucoup. Le sonar basse fréquence ne fournissait qu’une forme grossière. Le robot devait donc être envoyé ; son sonar haute fréquence permettrait la localisation exacte de la cible et son examen visuel précis. Elle savait que le fond de l’océan sous le Savarona descendait par endroits jusqu’à 250 mètres et qu’il était recouvert de récifs de coraux éparpillés qui, pour certains, atteignaient la taille supposée du Faucon-du-Temple. Les balayages du sonar n’étaient pas suffisants pour différencier l’épave de ces monticules naturels. Et c’était là que les magnétomètres entreraient en scène. Leur lecture aiderait à détecter le fer résiduel du navire naufragé. Rassoulis et son équipe avaient calculé qu’après sept cents ans de corrosion dans l’eau salée, il devait rester au mieux une demi-tonne de fer dans les vestiges du Faucon-du-Temple. Et même si les magnétomètres étaient soigneusement calibrés, il y avait toujours un risque pour que de fausses alertes soient provoquées par des poches naturelles de géomagnétisme ou par des épaves plus récentes.
La jeune femme observait l’exécution des procédures qu’elle avait déjà suivies au cours des dernières journées. Grâce à d’infimes mouvements du joystick, Attal guidait avec confiance le ROV sur le sol de la mer. Chaque minute, il le posait au milieu d’un nouveau nuage de sable. Alors, il appuyait sur un bouton qui permettait à son minuteur d’initialiser un balayage à 360 degrés de son environnement immédiat. L’équipe étudiait les vues obtenues avant qu’Attal
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