Le dernier vol du faucon
séjournait au séminaire depuis un peu plus d'un an et parlait quelques mots de français. Quelqu'un l'avait certainement payé pour assassiner Malthus et proclamer ensuite qu'il travaillait pour le Barcalon.
Qui se cachait donc derrière tout cela? Phaulkon avait espéré qu'il ne serait pas nécessaire de recourir à la torture, car il ne s'était jamais accoutumé à la cruauté des châtiments appliqués au Siam. Mais les meurtres y étaient rares et, selon la loi, Somchai devait être condamné à être dévoré vivant par un tigre. Une mort lente, atroce.
Il s'approcha et s'adressa à lui en siamois, les yeux dans les yeux.
«Je ne te connais pas et tu le sais fort bien. Jamais tu n'as été à mon service. C'est ta dernière chance de parler avant de connaître les pires souffrances que te réservera un juste châtiment. Sa Majesté, informée de ta conduite, vient en effet d'ordonner que tu subisses une mort lente, déchiqueté par un tigre - à moins que tu ne consentes enfin à révéler la vérité. C'est la dernière fois que je te le demande. »
Somchai le toisa avec mépris.
«Vous vous êtes servi de moi et maintenant vous m'abandonnez. Est-ce ainsi qu'agit un chrétien?
- Il t'est facile de faire le fier pour l'instant. Mais tu verras les choses différemment quand le tigre dévorera tes pieds et tes mains. Emmenez-le ! »
Les gardes poussèrent Somchai hors de la pièce.
«Je ne sais pas qui se cache derrière les agissements de cet homme, soupira Phaulkon. Il continue à prétendre travailler pour moi. Or c'est faux.
- Je le sais», dit froidement Nellie, le visage impassible.
Phaulkon la regarda, surpris. «Que voulez-vous dire ? Si vous savez quelque chose, je vous prie de parler maintenant. Cet homme va être livré aux tigres. Savez-vous ce que cela signifie ? »
Nellie eut l'air mal à l'aise mais continua de se taire. Il lui jeta un regard sévère.
«Ils l'attacheront près d'un tigre affamé toute la nuit pour qu'il entende ses rugissements jusqu'à l'aube. Puis ils allongeront la corde qui retient le fauve prisonnier - juste assez pour qu'il atteigne les pieds du condamné. Ils lui donneront de plus en plus de champ jusqu'à ce qu'il ne reste rien du malheureux. Cela prendra longtemps. »
Cette fois, il la vit vaciller. « Si vous savez quelque chose, Nellie, il est en votre pouvoir d'éviter cela.
- Je t'en prie, mère», supplia Mark.
Elle le regarda avant de reporter son attention sur Phaulkon. «Nous avons des choses à nous dire, Constant.
- Naturellement», répondit-il, mal à l'aise, en se demandant quelles pouvaient être ses intentions.
Elle se tourna vers son fils. «Mark, je désire m'en-tretenir avec ton père en privé. Ce ne sera pas long. Je te promets que c'est la dernière fois que je te demande ce service. »
L'air manifestement contrarié, Mark se dirigea à contrecœur vers la porte et Phaulkon ordonna à un esclave de l'accompagner. Après quoi il offrit un siège à Nellie, mais elle s'obstina à rester debout.
«Je vous en prie, dites-moi ce qui s'est réellement passé», implora-t-il.
Elle l'observa calmement, mais il la devinait troublée au plus profond d'elle-même.
« Vous comptez sur mon aide, n'est-ce pas ? demanda-t-elle froidement.
- Je vous l'ai dit. J'ai besoin de connaître la vérité. »
Elle continua à fixer sur lui un regard dur.
«Ainsi, vous vous attendez à ce que j'agisse comme si rien ne s'était passé?»
Il garda le silence.
« Donnez-moi une seule bonne raison pour laquelle je désirerais sauver votre peau ? » articula-t-elle lentement, l'air de plus en plus sombre.
Nous y voilà donc, songea Phaulkon. Elle n'est revenue que pour se venger.
« Parce que je suis le père de votre enfant et que je suis sincèrement désolé de ce qui vous est arrivé. Je sais que vous avez dû beaucoup souffrir. »
Elle cilla. «Vous n'avez pas la moindre idée de ce que j'ai dû endurer!
- C'est vrai. Mais j'attends que vous me l'appreniez. Croyez-moi, Nellie, je veux réparer mes torts.
- Vous ne pourrez jamais les réparer! s'exclama-t-elle, indignée. Surtout vis-à-vis de Mark. »
Il soupira, l'air soudain accablé. «Laissez-moi au moins essayer. Je ferai tout ce que je peux. »
Elle détourna les yeux.
« "Je ferai tout ce que je peux...", répéta-t-elle douloureusement. Ce sont des paroles que vous avez déjà prononcées autrefois, Constant. Il semble que vous les utilisiez volontiers. »
Il la contempla,
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