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Le Druidisme

Le Druidisme

Titel: Le Druidisme Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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philosophique, ou encore de prononcer l’éloge des héros. Puis il
y a le brithem qui fait fonction de juge,
d’arbitre, de législateur, d’ambassadeur. Le scelaige est spécialisé dans les récits épiques ou mythologiques. Le cainte est analogue au gutuater  :
c’est le maître du chant, magique bien entendu, et il est chargé de prononcer
les invocations, les exécrations, les bénédictions et les malédictions. Ce
satiriste joue un rôle important dans de nombreux récits épiques irlandais et
ses pouvoirs sont signalés comme étant redoutables. Enfin, il y a le liaig , sorte de médecin utilisant les plantes, la chirurgie
et les pratiques magiques, le cruitire qui est
un harpiste dont la musique est de caractère magique (il est parfois question
de musique qui fait pleurer, qui fait rire, qui fait dormir ou qui fait mourir),
et le deogbaire , qui est un échanson :
mais il semble bien que celui-ci ait la connaissance des substances non
seulement enivrantes, mais hallucinogènes.
    La spécialisation divinatoire est assumée par le faith , mot qui est l’exact correspondant du gaulois vatis . Mais des obscurités demeurent quant à
l’appartenance du faith à la catégorie des fili . On ne peut décider si le faith était un file ,
et il est vraisemblable qu’il y a eu changement à la christianisation : la
prédiction était mal vue des chrétiens et il est possible que ce soit au moment
où les fili se sont convertis qu’ils ont
abandonné la fonction divinatoire, celle-ci étant récupérée par une catégorie
inférieure ne bénéficiant plus, dans la nouvelle société, du statut sacerdotal.
Cette hypothèse est corroborée par le fait que les druides proprement dits, au
moment de la christianisation, étaient tenus à l’écart du sacerdoce mis en
place par saint Patrick et ses successeurs. En somme, les fili , une fois baptisés – et la plupart du temps
ordonnés prêtres et consacrés évêques –, ont abandonné les fonctions du
druidisme qui étaient les plus suspectes, sinon les plus contraires à l’esprit
chrétien. Mais à cause de cela, notre information est incomplète.
    On remarquera aussi que les bardes sont absents de cette
nomenclature, alors que le mot bard existe en
gaélique et qu’il a été employé pour désigner ultérieurement des poètes et des
chanteurs populaires. Le barde irlandais avait-il un statut fixe ?
Faisait-il réellement partie de la classe sacerdotale ? Probablement, si
l’on compare avec la Gaule et aussi avec le pays de Galles où l’institution
bardique a été maintenue très tard, jusqu’à la fin du Moyen Âge, dans le cadre
chrétien. En fait, chez les Gallois, et dans une certaine mesure chez les
Bretons armoricains, c’est le barde qui a été l’héritier du druide, tandis
qu’en Irlande c’est le file qui a joué ce
rôle.
    Tous ces noms qui servent à désigner les diverses catégories
fonctionnelles à l’intérieur de la classe druidique ne doivent pas cependant nous
faire oublier que l’appellation essentielle demeure le mot
« druide ».
    Il faut bien dire que ce nom a été soumis à rude épreuve.
Les formes modernes, « druide » en français, druid en anglais, derwydd en gallois et drouiz en breton-armoricain,
sont toutes des reconstitutions savantes qui ne remontent guère plus haut que
la fin du XVIII e  siècle. Le mot
populaire, résultant de l’évolution logique de la langue, est draoi en gaélique moderne, qui signifie
« sorcier », et dryw ,
« roitelet », en gallois contemporain, le terme s’étant perdu dans le
vocabulaire breton-armoricain. Ces reconstitutions savantes se sont faites sur
le terme le plus anciennement attesté, celui utilisé par César, et qui est
latinisé en druis (génitif druidis ), auquel correspond étroitement l’ancien
gaélique drui .
    Ces remarques sont d’une grande importance, car elles constituent
la preuve que le druidisme, et par conséquent les druides, ont disparu dans la
mémoire populaire en tant qu’institution religieuse, et cela depuis bien des
siècles. Seuls l’Irlande et le Pays de Galles en ont conservé un vague souvenir
qui témoigne d’ailleurs d’une dépréciation formelle. Il est hautement
significatif que l’évolution sémantique du vieil irlandais drui ait conduit au sens de « sorcier ».
C’est à mettre en rapport avec la désaffection qui s’est produite en Irlande,
au moment de la christianisation, à propos des druides, ravalés

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