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Le fantôme de la rue Royale

Le fantôme de la rue Royale

Titel: Le fantôme de la rue Royale Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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presser le cocher. Les abords de la halle commençaient à se remplir de peuple. Ils tournèrent si brutalement à l’angle de la rue des Prouvaires que le coffre se souleva avant de retomber et que le vieux serviteur fut précipité sur Nicolas.
    Rue Montmartre, Nicolas bondit du fiacre, laissant à Poitevin le soin de régler la course. Il fut reçu comme un sauveur par Marion et Catherine éplorées qui n’osaient monter dans la chambre de M. de Noblecourt où se trouvait le docteur Dienert qu’on était allé chercher, rue Montorgueil. Ce médecin, régent de la faculté de médecine de l’université de Paris, était des plus réputés. Mais, pour Nicolas, les titres ne faisaient rien à la chose et son expérience de la profession lui laissait toujours craindre le pire. C’est avec appréhension qu’il s’approcha de la chambre. Ce qu’il vit en entrant le rassura aussitôt. M. de Noblecourt, sans perruque ni chapeau, était assis dans son fauteuil préféré. Une bande de tissu taché de sang lui enveloppait le crâne. L’air hilare, il trinquait d’un verre qu’au vu de la bouteille Nicolas sut être du malaga, avec un personnage bedonnant, rougeot et bonhomme. Quand il vit Nicolas, le vieux procureur le désigna d’une main.
    — Voilà M. le commissaire Le Floch, je suis sauvé ! Comme vous voyez, Nicolas, tout ceci n’est qu’une mauvaise plaisanterie. Après les pieds, la tête, je m’en vais doucement, goutte à goutte.
    — Nous le garderons, il gausse, dit une autre voix, celle d’un homme en retrait que Nicolas n’avait pas remarqué et en qui il reconnut son collègue Fontaine, l’un des commissaires du quartier.
    — Oh ! dit Noblecourt, c’est une équivoque que j’ai empruntée à M. le marquis de Bièvre 78  ! Je l’ai entendu lire des extraits de sa grande pièce Vercingétorix , qu’il écrit « Vercingétorixe » afin, dit-il, qu’on ne le prononce pas comme « perdrix ». C’est le grand spécialiste du calembour. Et que dites-vous de ces deux vers que je m’applique bien volontiers ?
    Je sus comme un cochon résister à leurs armes
    Et, je pus comme un bouc dissiper vos alarmes
    « C’est exécrable, je le crois bien, mais c’est l’excès de mauvais goût qui me réjouit. Allons, ne faites pas cette tête, Nicolas, je ne divague pas sous mon turban. Je sais que je l’ai échappé belle, j’en suis bien conscient.
    — Vous prenez tout cela trop à la légère.
    — Vous préféreriez que je le prenne à la lourde ? J’ai toujours rêvé une vie aventureuse : militaire, corsaire ou commissaire, mais, hélas, je n’ai jamais donné l’assaut qu’à des dossiers et n’ai jamais tranché que des gigots. Enfin, il m’arrive quelque chose ! À mon âge ! Je consens à offrir en sacrifice quelques palettes de mon sang.
    — Il suffira, dit le médecin, de cette potion pour vous rétablir, et de quelques onctions de graisse de castor camphrée pour les bleus dont vous êtes couvert.
    Le médecin offrit un verre à Nicolas.
    — Mais vous, monsieur le commissaire, buvez cela. Par ma foi, vous êtes plus pâle qu’un procureur assommé !
    — Je reconnais bien là son affection, dit Noblecourt en riant. Cela est bien plaisant de mourir pour de faux ; on reconnaît ses amis. Mon cher Nicolas, je vous promets de vous avertir le cas échéant.
    — Nous n’allons pas vous fatiguer. Il vous faut du repos et du calme pour savourer votre… médicament. Je dois repartir, mais je souhaiterais, Fontaine, m’entretenir avec vous, si vous le voulez bien. Docteur, je vous salue et je vous confie notre ami.
    M. de Noblecourt agita la main avec gaieté et tendit son verre vide au docteur Dienert, ravi de cette affaire qui l’autorisait, avec la bénédiction de la faculté, à renouer licitement avec des gourmandises que sa goutte proscrivait.
    Sous la voûte de l’entrée, Nicolas informa le commissaire de ce que lui avait confié Poitevin. Il alla frapper à la porte du fournil et revint avec un mitron d’une douzaine d’années, pieds nus, tout enfariné, et embarrassé de ses mains couvertes de pâte à pain.
    — Jean-Baptiste, commença Nicolas, Poitevin m’a dit que tu avais été témoin de l’agression contre M. de Noblecourt. Peux-tu nous conter cela ?
    — J’attendais Pierre qui avait du retard. C’est le garçon boulanger…
    Le gamin s’arrêta et regarda derrière lui pour s’assurer que personne ne les écoutait.
    — Il

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