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Le Gerfaut

Le Gerfaut

Titel: Le Gerfaut Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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Tim demeurèrent face à face, le jeune Indien toujours ligoté, planté entre eux comme un piquet.
    — Eh bien ! soupira le jeune Breton. Si c’est là tout le cas qu’il fait d’une capture. Quand je pense qu’il voulait me faire relâcher ce petit fauve.
    — Bah ! C’est naturel. Pour lui tous les Indiens se ressemblent. Il est de ces gens qui croient s’y connaître, qui invitent en même temps un Algonquin et un Iroquois à souper et qui s’étonnent ensuite qu’après la tarte au sirop d’érable du dessert l’un de ses convives s’en aille tranquillement avec le scalp de l’autre. Mais c’est toi qui as raison : l’est fichtrement intéressant ce petit bougre !
    Et, sans transition, Tim se mit à dévider, à toute vitesse, un discours accompagné de grands gestes à l’intention du jeune Indien qui ne parut d’ailleurs pas s’y intéresser beaucoup dans les débuts.
    Son regard ne refléta d’abord qu’un franc dégoût et sa bouche se pinça. Mais, à mesure que Tim parlait il se détendit quelque peu et finit par laisser tomber du bout des lèvres quelques sons qui n’étaient pas des cris et qui, logiquement, devaient former des mots.
    — Qu’est-ce qu’il dit ? demanda Gilles.
    — Eh bien, justement, il ne dit rien, sinon qu’il est un guerrier et que, comme tel, nous avons toute latitude pour l’appliquer au poteau de torture mais que ça ne nous servira pas à grand-chose car il ne nous offrira que deux ou trois sourires de mépris, même si on le débite en petits morceaux.
    — Au poteau de torture ? Ce gosse ? Mais il nous prend pour qui ?
    Tim haussa les épaules et hocha la tête avec une certaine gravité.
    — Pour des ennemis valables. Et ne t’imagine pas que l’histoire du poteau n’est qu’une boutade. Si je connais bien les Sénécas, ce gosse, comme tu dis, vient d’atteindre l’âge de la puberté et il se soumet aux épreuves rituelles qui feront de lui un guerrier. Cette incursion chez nous doit être son expédition probatoire.
    — Et ça voudrait dire ?
    — Que son frère n’a pas obligatoirement quitté ses campements mais que lui a parcouru un long chemin afin de rencontrer des aventures assez nobles pour mériter de devenir plus tard un chef. Des aventures qu’en attendant, on se racontera le soir autour des feux de camp.
    — Mais enfin qu’espérait-il en venant ici ? Nous déclarer la guerre à lui tout seul ?
    L’idée ne parut pas surprendre exagérément Tim.
    — Il appartient à une tribu iroquoise et les Iroquois sont capables de tout 3 mais, plus simplement, ce garçon est venu faire sa petite provision de scalps. Plus il en rapportera et plus il sera considéré.
    — Il faudrait pour cela que nous y mettions de la bonne volonté, marmotta Gilles, désagréablement impressionné. En attendant cela ne dit pas ce que nous allons en faire… ou plutôt ce que toi tu vas en faire car on m’appelle.
    En effet, l’un des soldats de garde à la porte de la maison Wanton venait de crier son nom. Le général devait avoir besoin de son secrétaire. Cette fois Tim se mit à rire.
    — Je vais en faire ce qu’il ferait de nous s’il était à notre place ! fit-il avec bonne humeur : le livrer aux squaws ! J’aimerais voir ce que ce guerrier va faire en face des beignets d’acacia et des confitures de Martha.
    Martha Carpenter était l’amie de cœur du coureur des bois et, en vérité, ces deux-là semblaient bien faits l’un pour l’autre. Solide gaillarde fraîche et blonde comme une jatte de crème, elle gérait avec vigueur et compétence l’important magasin de shipchandler que lui avait légué son père.
    Avec un clin d’œil à son ami, Tim, toujours sans le déficeler pour plus de commodité, installa le jeune Indien sur sa vaste épaule, ramassa ses oies abandonnées par Noailles et mit le cap sur l’angle de Long Wharf Street où sa bien-aimée régnait sur un univers de cordages, d’ancres, de filets de pêche, d’instruments de navigation, d’outils en tout genre et aussi sur des pipes, des tonnelets de tabac ou de rhum, de la poudre à fusil et, en bref, de tout ce qu’il fallait pour équiper un bateau et assurer un sort supportable à son équipage.
    Avec un soupir de regret, Gilles le laissa partir et franchit le seuil de la maison Wanton. Il avait beaucoup plus envie, tout à coup, d’entendre le rire sonore de Martha Carpenter que la voix perchée de ce M. de La Fayette qui

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