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Le glaive de l'archange

Le glaive de l'archange

Titel: Le glaive de l'archange Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
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de leur âme par la séduction des corps tout proches. Un regard audacieux, un gloussement, un sifflement réprobateur, et l’assemblée retrouva le calme.
    Dans le coin le plus éloigné de l’autel, deux étrangers, un homme et une femme, étaient en grande conversation. L’homme, d’une beauté arrogante, était vêtu avec ostentation de chausses moulantes ainsi que d’une tunique dont les manches ballon s’ornaient de crevés de couleur.
    — Tout est-il arrangé ? demanda-t-il.
    Il se pencha vers elle d’un air si pressant, si exigeant, qu’elle eut un mouvement de recul. Le voile de la femme glissa, révélant d’épaisses tresses de cheveux roux enroulées au-dessus des oreilles, à la mode compliquée de la cour de France.
    — Rien n’a changé, répondit-elle en évitant le regard de son compagnon. Je ne l’ai pas encore convaincue, mais je pense qu’elle est lasse du couvent et que cette aventure l’intrigue. On la prétend intrépide.
    — Dans ce cas, elle ne fera pas une bonne épouse, dit son compagnon, mais c’est son affaire à lui, pas la nôtre. Qu’elle le veuille ou non, il faut qu’elle soit partie entre matines et laudes.
    Il s’arrêta de parler comme s’il s’intéressait au service religieux.
    — Donnez-lui ceci si nécessaire, fit-il en tendant un petit paquet à la femme. Une goutte ou deux dans du vin, pas plus, et elle dormira profondément. Une personne de confiance sera postée près de la petite porte pour vous décharger d’elle, mais vous devez l’emmener jusque-là.
    — Et si l’on me voit ?
    — Cela ne se produira pas. Il y aura un tel tumulte en ville que personne n’aura le loisir de vous remarquer.
    — Un tumulte ? Comment le savez-vous ? dit-elle en posant sur lui un regard d’étonnement. Dois-je toujours l’amener aux bains maures ?
    — Oui. Connaissez-vous un autre lieu si proche et si privé ? Nous partirons de là. Et ce n’est pas un jeu, madame, ajouta-t-il. Si vous ne l’y amenez pas, nous sommes tous perdus.
     
    Lundi 23 juin
     
    La veille de la Sant Johan, patron officieux des fêtes du solstice d’été, les cloches du couvent de Sant Daniel sonnaient pour appeler à complies, et les sœurs emplissaient leur chapelle nouvellement bâtie pour le dernier service de la journée. Malgré l’heure, l’obscurité ne semblait pas vouloir descendre. Les lueurs du soleil couchant disputaient à la lune montante le droit d’éclairer le couvent et la ville. Comme les voix des sœurs s’élevaient en un chant à la beauté mélancolique, confiant l’âme et le corps au Seigneur jusqu’au jour nouveau, la musique qui devait inciter la ville à la célébration entamait son rythme insistant.
    Dans la taverne de Rodrigue, tout près de la rivière Onyar, la foule était impatiente et revêche, comme si la tombée de la nuit avait augmenté sa soif de plaisirs sans pour autant l’apaiser. La salle était d’une chaleur oppressante, tout emplie de la fumée des lampes vacillantes. La conversation était décousue, les buveurs maussades et irritables. Puis des pas rapides se firent entendre dans l’escalier, et l’étranger qui assistait à la messe dans la cathédrale entra, apportant avec lui l’air froid et humide des berges. Le silence se fit dans la salle.
    L’étranger avait changé d’apparence depuis la veille. L’habit qu’il portait n’était pas si bien coupé, de même que ses chausses ne le serraient pas d’aussi près. Son sourire était plus franc, son regard moins arrogant. Un ou deux hommes le reconnurent et hochèrent prudemment la tête. Il lança un sourire radieux à l’assistance.
    — Josep, dit-il en adressant un signe de tête à un individu carré, à l’air puissant et prospère. Pere, Sanch.
    Il les reconnut tour à tour, mais personne ne parla.
    — Tavernier, dit-il, un pichet de vin pour que mes amis boivent à la fête du saint. Non, cela ne suffira pas. Trois pichets pour commencer. Le bon Johan m’a porté chance et je me dois de lui rendre hommage.
    — Merci, messire, dit un homme installé près de la fenêtre. Mais à qui dois-je adresser mes remerciements en dehors du bon saint ?
    — Romeu, dit-il. Romeu, fils de Ferran, né à Vic, soldat, voyageur, vagabond, et revenu seulement la semaine dernière sur sa terre natale.
    Les pichets furent déposés sur les longues tables. Romeu emplit chopes et gobelets, demanda un autre pichet et remplit son propre gobelet. Il le

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