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Le Glaive Et Les Amours

Le Glaive Et Les Amours

Titel: Le Glaive Et Les Amours Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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moins bien :
Philippe IV mettra à la disposition de Gaston une armée de douze mille
fantassins et de six mille cavaliers, ainsi que la solde nécessaire à leur
entretien.
    — En d’autres termes, il crée, encourage et alimente la
guerre civile en France.
    — J’ajoute que Gaston, frère du roi, en sera le
général.
    — Voilà qui est peu ragoûtant.
    — Il y a bien pis, m’amie. La France devra mettre fin à
ses alliances avec les pays protestants : la Hollande, la Suède et les
princes luthériens d’Allemagne.
    — Voilà qui eût charmé la reine-mère, Marillac, le père
Caussin, et nos bons dévots de France qui sont si peu Français.
    — Et qui, implicitement, suppose qu’on révoque l’édit
de grâce, et qu’on persécute derechef les protestants. M’amie, armez-vous de
courage, vous allez meshui ouïr le plus ignominieux : le traité stipulait
que le roi d’Espagne verserait à Gaston et à Monsieur de Bouillon cent vingt
mille écus, et à Cinq-Mars quarante mille écus.
    — Dieu bon ! Ces trois-là vendent leur patrie pour
un boursicot de clicailles !
    — M’amie, peux-je attirer votre attention sur le fait
que ce traité n’était pas seulement odieux. Il était aussi chimérique. Comment
accepter l’idée que, Richelieu mort, Louis aille tout de gob renoncer à la
politique qui fut la sienne depuis vingt ans, et s’aligne docilement sur la
politique espagnole, devenant l’humble féal de Philippe IV ? En bonne
logique, il faudrait aller plus loin et assassiner aussi Louis XIII, le
dauphin et le dauphin de rechange, afin que Gaston puisse s’emparer enfin du
pouvoir et appliquer le traité espagnol à la lettre.
    « Fontrailles, le traité cousu à l’intérieur de son
pourpoint et lui brûlant la poitrine, voulut s’en retourner en France par le
même chemin qu’il avait déjà pris. Mais arrivé à Huesca, il fut avisé par un
Béarnais qu’il avait été suivi sur le chemin de l’aller. Conspirateur naïf et
débutant, Fontrailles ne s’est aperçu de rien, et surtout pas qu’il était
suivi, et plus naïf encore, au lieu de rentrer en France par un autre chemin,
il reprit le même, inconscient des yeux qui partout l’accompagnaient et ne
perdraient plus sa trace. Mais dès cet instant, et il ne le sait pas encore, le
traité qu’il porte à l’intérieur de son pourpoint, a cessé d’être secret.
    — Et à qui, une fois parvenu à Paris, Fontrailles
remit-il le traité ?
    — À la reine, c’est-à-dire à la personne qu’il croyait
la plus sûre.
    — Et c’était elle ?
    — Nenni. Elle était trop vulnérable.
    — Comment cela ?
    — Par ses enfants. Elle avait été en effet avisée par le
roi qu’elle devait sans eux le venir retrouver en Roussillon. Elle fut au
désespoir, écrivit lettre sur lettre à Richelieu afin qu’il persuadât le roi de
ne la pas priver de ses enfantelets. Mais comme vous savez, m’amie, Richelieu
ne faisait rien pour rien. Ces protestations d’amitié de la reine ne lui
suffirent pas. Il voulait, comme il avait dit un jour au Parlement, voir les
« effets » de cette bonne amitié. La reine entendit à mi-mot, et non
sans scrupules elle dépêcha un gentilhomme porter le traîtreux traité espagnol
à Richelieu qui, en route pour le Roussillon, avait fait étape à Arles. La
réponse fut prompte. Le roi écrivit à la reine qu’il jugeait préférable qu’elle
demeurât à Saint-Germain avec ses enfants plutôt que de supporter céans avec eux
les incommodités de cette campagne en Roussillon qui menaçait d’être fort
longue et fort rude, puisqu’elle ne pourrait réussir sans assiéger et prendre
une ville aussi puissamment défendue par les Espagnols que Perpignan.
    — Mais, Monsieur, vous dites cela en toute froidure, au
lieu que de le déplorer. N’était-ce pas pur machiavélisme de la part de
Richelieu de jouer sur l’amour d’une mère pour ses enfants afin d’arriver à ses
fins ?
    — Les fins des futurs assassins de Richelieu
étaient-elles plus louables que la défense d’un ministre qu’on voulait
assassiner, parce que sa politique s’opposait à l’Espagne, dont les armées
avaient envahi le royaume, et occupaient encore bon nombre de nos villes. À
Arles, le traîtreux traité espagnol fut apporté par Monsieur de Chavigny au
petit matin à Richelieu. Sa lecture lui assécha tant la gorge qu’il demanda un
bouillon qui lui fut apporté aussitôt et qu’il but

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