Le grand voyage
tente conique, Ayla sut qu’ils
approchaient d’un Camp, et elle avait hâte de connaître ceux qui y vivaient.
Peut-être même étaient-ce des Mamutoï, se dit-elle en faisant signe à Whinney
de rester près d’elle. Loup avait adopté son attitude défensive, et elle siffla
le signal qu’elle lui avait appris. Il s’élança près d’elle et ils pénétrèrent
ensemble dans le petit campement.
11
Ayla pénétra dans le Camp, suivie de près par Whinney, et
marcha jusqu’au foyer d’où s’échappaient encore des volutes de fumée. Cinq
abris étaient disposés en demi-cercle, et devant celui du milieu on avait
creusé un trou pour y faire le feu qui brûlait encore. A l’évidence, le Camp
avait été utilisé peu auparavant, mais personne ne se montra pour les
accueillir. Ayla inspecta les lieux, jeta un coup d’œil à l’intérieur des
habitations. Personne. Surprise, elle examina les abris et le Camp afin de
recueillir des informations sur ses habitants, et découvrir la cause de leur
départ.
Les tentes coniques ressemblaient à celles qu’utilisaient les
Mamutoï pour leur Camp d’été. Mais alors que les Chasseurs de Mammouths se
donnaient plus d’espace en leur adjoignant des tentes semi-circulaires en peau
de bête, souvent soutenues par une perche, ce Camp-ci fabriquait des auvents de
roseaux et de joncs tressés. Certains étaient de simples toits inclinés
soutenus par des perches flexibles, d’autres en revanche étaient clos,
constructions de chaume et de nattes reliées à l’abri principal.
Devant l’entrée de la tente la plus proche, Ayla aperçut des
racines de massettes entassées sur une natte de roseaux, et à côté, deux
paniers. L’un était finement tressé et contenait une eau légèrement boueuse, l’autre
était à moitié plein de racines pelées d’un blanc éclatant. Elle marcha jusqu’au
panier et palpa une des racines. Elle était encore humide ; on l’avait
épluchée depuis peu.
En la reposant, elle remarqua un objet étrange sur le sol. Tissé
avec des feuilles de massettes, il ressemblait à un personnage, avec deux bras
et deux jambes, et un morceau de cuir souple enroulé comme une tunique. Sur son
visage on avait dessiné au charbon de bois deux petits traits pour marquer les
yeux, et un troisième arrondi en sourire. Des touffes de stipes plumeux attachées
sur la tête représentaient les cheveux.
Ceux avec qui Ayla avait grandi ne fabriquaient pas de
figurines. Ils se servaient parfois de symboles, comme les cicatrices sur sa
jambe, pour désigner les totems. Petite fille, elle avait été griffée par un lion
des cavernes qui avait laissé quatre entailles profondes sur sa cuisse
gauche ? Le Clan utilisait une marque identique pour représenter le totem
du lion des cavernes. C’était ce qui avait persuadé Creb que le Lion des
Cavernes était bien son totem, quoiqu’il fût considéré comme un totem masculin.
L’Esprit du Lion des Cavernes l’avait choisie et marquée, et était désormais
son protecteur.
D’autres totems étaient symbolisés de la même manière, par de
simples signes dérivés des attributs de l’animal, ou de la gestuelle du
langage. La première véritable image qu’elle vit fut le rapide croquis d’un
animal que Jondalar avait dessiné sur un morceau de cuir qu’il utilisait comme
cible. La petite figurine sur le sol la stupéfia. Soudain elle comprit. Elle n’avait
jamais eu de poupée dans son enfance, mais elle se souvint que les enfants des
Mamutoï jouaient avec des objets similaires ; la figurine était donc un
jouet d’enfant !
Juste avant leur arrivée, une femme était assise là, avec son
enfant, Ayla en était convaincue. Elle avait dû fuir précipitamment pour
abandonner ainsi sa nourriture, sans même emporter le jouet de son enfant.
Pourquoi une telle hâte ?
En se retournant, elle vit Jondalar, tenant toujours Rapide par
le licol, agenouillé au milieu d’éclats de silex qu’il examinait attentivement.
— Cette excellente pointe a été ébréchée par un geste
maladroit, déclara-t-il en se relevant. Il suffisait d’un rien pour la
terminer, mais la main a été trop lourde et elle a manqué son but... on dirait
que le tailleur de silex a été subitement dérangé. Ah, voilà le
percuteur ! Il l’a abandonné.
L’usure profonde de la dure pierre ovale témoignait de son
ancienneté, et Jondalar, en bon tailleur de silex, avait du mal à imaginer qu’on
pût oublier un
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