Le grand voyage
bien que
mal sur ce sol aride, chassant les pins rabougris et les saules qui se
cramponnaient aux rives des cours d’eau.
Les marécages, terres souvent inondées comprises entre les bras
de la rivière, étaient presque aussi étendus que ceux du delta, et aussi riches
en roseaux, en plantes aquatiques et en population animale. Des îles aux verts
pâturages, et plantées d’arbres, étaient cernées par les eaux jaunâtres de la
rivière principale, ou par des canaux secondaires aux eaux limpides regorgeant
de poissons, souvent de taille exceptionnelle.
Ils chevauchaient près de l’eau quand Jondalar tira sur les
rênes de Rapide. Ayla fit arrêter Whinney près de lui. Devant son expression
étonnée, il lui sourit et mit un doigt sur ses lèvres. Il lui désigna un bassin
d’eau claire, où des plantes subaquatiques s’agitaient dans un courant
invisible. Ayla ne vit d’abord rien d’anormal, puis elle aperçut une énorme
carpe dorée magnifique, glissant sans effort sur le fond verdâtre. Ils avaient
déjà vu dans une lagune des esturgeons de plus de neuf mètres. Le poisson géant
rappela à Jondalar un incident qu’il faillit raconter à Ayla. Mais il se
ravisa.
Roselières, lacs et bassins qui parsemaient les méandres de la
rivière constituaient une invite aux oiseaux, et des volées de pélicans
glissaient sur les courants d’air chaud, agitant à peine leurs ailes immenses.
Crapauds et grenouilles vertes entonnaient leur chant nocturne, et finissaient
parfois à la broche. Les deux voyageurs ignoraient les petits lézards qui
fusaient sur les rives boueuses, et évitaient les serpents.
Les sangsues, qui semblaient pulluler dans ces eaux, rendaient
les voyageurs prudents et les obligeaient à choisir leurs baignades avec un
soin particulier. Ces créatures étranges qui se cramponnaient à eux sans qu’ils
s’en rendissent compte, et leur suçaient le sang, intriguaient fortement Ayla.
Mais les bestioles les plus agaçantes étaient incontestablement les plus
minuscules. Avec la proximité des marais, des milliers d’insectes, plus qu’ils
n’en avaient jamais vu, ne leur laissaient aucun répit et les forçaient parfois
à se réfugier dans l’eau.
A l’approche de l’extrémité méridionale de la chaîne de
montagnes, de vastes plaines s’ouvraient entre la Grande Mère et les pentes
escarpées. Le massif enneigé se terminait en s’incurvant brusquement vers une
autre chaîne de montagnes orientée sur un plan est-ouest. A la pointe sud du
massif, deux sommets surplombaient tous les autres.
En poursuivant vers le sud, ils s’éloignèrent des montagnes, ce
qui leur en donna une vue d’ensemble : derrière eux, s’étendait un vaste
panorama de pics majestueux. La glace scintillait sur les plus hauts sommets
recouverts d’un manteau blanc. La neige tapissait les pics de moindre altitude,
rappelant que la courte saison chaude des plaines méridionales n’était qu’un
bref intermède dans un pays dominé par les glaces.
Plus ils s’éloignaient des montagnes, plus la vue se dégageait à
l’ouest. Ce n’étaient qu’étendues infinies de steppes arides. Sans la variété
des collines boisées pour briser le rythme monotone, et les hautes montagnes
pour scander l’horizon, les jours ressemblaient aux jours le long de ce cours d’eau
marécageux. A un moment où les deux bras du fleuve se rejoignaient, ils
aperçurent sur l’autre rive des steppes davantage d’arbres, et sur la Grande
Mère, toujours une multitude d’îles et de roselières.
Avant la fin de la journée, la Grande Mère se divisa à nouveau.
Les cavaliers continuèrent à suivre la rive gauche qui obliquait légèrement
vers l’ouest. A leur droite, la chaîne de montagnes mauves dont ils
approchaient gagna en altitude et dévoila ses particularités. Contrairement aux
pics déchiquetés de l’ubac qu’ils venaient de longer, le versant exposé au sud,
aux sommets recouverts d’un manteau de neiges ou de glaces éternelles,
présentait des courbes plus douces qui rappelaient les hauts plateaux.
L’influence des montagnes méridionales se faisait sentir sur le
cours du fleuve. Quand les voyageurs approchaient des contreforts, ils
remarquaient les changements subis par la Grande Mère, identiques à ceux qu’ils
avaient observés précédemment. Des chenaux serpentaient, se rejoignaient,
prenaient un cours plus rectiligne pour fournir un seul chenal large et profond
qui se jetait dans le
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