Le grand voyage
le pressentiment qu’il
erre en solitaire et qu’il cherche désespérément le chemin qui le ramènera à la
Mère.
Cette explication surprit Ayla qui se mit à observer Jondalar
avec attention.
— Je n’ai pas le droit de le laisser errer indéfiniment.
Mais je ne connais qu’une personne capable de l’aider : Zelandoni, une
shamud, une shamud d’un grand pouvoir qui a vu naître Thonolan. Avec l’aide de
notre mère, Marthona, Zelandoni arrivera peut-être à retrouver son esprit et à
le guider dans la bonne voie.
Ayla savait bien que ce n’était pas l’unique raison qui le
poussait à retourner chez son peuple. Elle se rendit alors compte que, à l’instar
de sa réponse quand il l’avait questionné sur les fils d’or, Jondalar ne
faisait qu’énoncer une stricte vérité. Mais une vérité partielle.
— Tu es resté absent si longtemps, Jondalar, plaida Tholie
qui ne cachait pas sa déception. Qu’est-ce qui te prouve que ta mère et
Zelandoni sont toujours en vie ?
— Tu as raison, Tholie, je n’en sais rien. Mais si je ne
peux pas aider mon frère, Marthona et tous ses parents seraient quand même
heureux d’apprendre qu’il a vécu parmi vous, avec Jetamio, Markeno, et toi,
Tholie. Je suis sûr que ma mère aurait apprécié Jetamio, et je sais qu’elle t’aurait
aimée, Tholie.
La femme essaya de ne pas montrer sa fierté, mais on devinait que
le compliment l’avait touchée, en dépit de sa déception.
— Thonolan avait entrepris un grand Voyage, son Voyage. Je
n’ai fait que le suivre pour prendre soin de lui. Et je veux raconter son
périple à ses proches. Il est allé jusqu’au bout de la Grande Rivière Mère, but
qu’il s’était fixé, mais plus encore, il s’est trouvé un foyer au milieu de
gens qui l’aimaient. Son histoire mérite d’être contée.
— Jondalar, je crois que tu essaies encore de suivre ton
frère. Tu vas même jusqu’à le rechercher dans l’autre monde, dit Roshario. Si
tel est ton choix, nous te souhaitons tous bonne chance. Shamud, lui-même, t’aurait
conseillé de suivre ta voie.
Le demi-mensonge de Jondalar fit réfléchir Ayla. La proposition
de Tholie, reprise par tous les Sharamudoï, n’avait pas été faite à la légère.
C’était une offre généreuse, et un grand honneur. La refuser sans offenser
personne n’en était que plus difficile. Seul un devoir supérieur, une quête à
poursuivre, pouvaient rendre son refus acceptable. Jondalar préférait ne pas
avouer que, même s’il les considérait comme des proches, d’autres l’étaient
bien davantage qui justifiaient sa nostalgie. Mais il avait trouvé un moyen
élégant de ménager leur susceptibilité.
Dans le Clan, il était permis d’omettre certaines précisions pour
ménager la vie privée dans une société où il était difficile de cacher quoi que
ce soit. Les émotions et les pensées se trahissaient dans les gestes, les
mimiques, et toute expression corporelle, même inconsciente. Jondalar avait
choisi de manifester les égards indispensables. Ayla avait le sentiment que
Roshario n’était pas dupe, et qu’elle avait accepté les prétextes de Jondalar
pour les mêmes raisons qui avaient incité celui-ci à les formuler. La subtilité
n’échappa pas à Ayla, mais elle avait besoin d’y réfléchir. Elle comprit
toutefois qu’une offre généreuse pouvait receler plusieurs facettes.
— Combien de temps resterez-vous encore ? demanda
Markeno.
— Nous avons voyagé plus vite que je ne l’aurais cru. Je ne
m’attendais pas à arriver chez vous avant l’automne. Grâce aux chevaux, nos
étapes sont plus longues, mais il nous reste encore beaucoup de chemin, et de
nombreux obstacles à franchir. J’aimerais partir dès que possible.
— Jondalar, nous ne pouvons pas partir tout de suite !
protesta Ayla. Je veux attendre que le bras de Roshario soit guéri.
— Cela prendra combien de temps ? demanda Jondalar, l’air
contrarié.
— J’ai prévenu Roshario qu’elle devra garder le moule d’écorce
pendant une lune entière et la moitié de la suivante.
— Impossible. Nous ne pouvons pas attendre si
longtemps !
— Combien de temps, alors ?
— Pas très longtemps.
— Mais qui lui ôtera son moule ? Et qui saura que le
moment est venu de le faire ?
— Nous avons envoyé un coureur chercher un shamud,
intervint Dolando. Crois-tu qu’il pourrait l’aider ?
— Oui, certainement, convint Ayla. Mais
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