Le grand voyage
terrasse qui dominait la plaine. Ayla commença à
comprendre que la rivière qu’elle avait vue du sommet devait être beaucoup plus
éloignée et beaucoup plus large qu’elle ne l’avait cru. En dépit de courts
ralentissements, la pluie tombait sans discontinuer, et dès qu’ils sortaient de
l’abri – bien imparfait – des arbres, l’eau les fouettait
comme des misérables. Au moins pouvaient-ils maintenant chevaucher leur monture
de temps en temps !
Vers l’ouest, ils traversèrent une série de terrasses de lœss
qui s’étageaient à flanc de montagne. Les plus élevées étaient déchiquetées par
d’innombrables ruisseaux que le déluge avait grossis. Ils pataugèrent dans la
boue, franchirent plusieurs torrents et arrivèrent bientôt sur une terrasse
inférieure où ils découvrirent avec étonnement un petit groupe d’habitations.
Les grossières constructions en bois, sortes d’auvents
améliorés, et de toute évidence assemblées à la hâte, avaient l’air bien
délabrées, mais elles offriraient au moins un semblant d’abri. Ayla et
Jondalar, soulagés, mirent pied à terre à l’approche des bâtisses afin de ne
pas en effrayer les habitants. Il appelèrent et crièrent en sharamudoï,
espérant qu’on les comprendrait. Mais ils n’obtinrent aucune réponse, et en
arrivant devant les abris ils comprirent qu’ils étaient vides.
— Je suis persuadé que la Mère savait qu’on avait besoin d’un
abri, et Doni acceptera volontiers de nous laisser entrer, déclara Jondalar en
pénétrant dans l’un des abris.
A l’exception d’une lanière de cuir pendue à une cheville de
bois, l’endroit était vide, et un ruisseau avait inondé le sol, transformant la
poussière en boue. Ils sortirent et se dirigèrent vers l’abri le plus grand.
Ayla comprit alors ce qu’il manquait au campement.
— Mais où est la donii ? demanda-t-elle. Aucune
représentation de la Mère ne protège l’entrée.
— C’est certainement un camp d’été provisoire. Ils n’ont
pas laissé de donii parce qu’ils n’ont pas demandé Sa protection. Ceux qui ont
construit ces cabanes n’espéraient pas qu’elles résistent à l’hiver. Ils les
ont abandonnées, et sont partis en emportant tout ce qu’ils possédaient. Ils
ont certainement émigré vers les hauteurs au début des pluies.
Ils pénétrèrent dans la plus grande cabane, moins nue que la
précédente. Les murs étaient pleins de trous et l’eau gouttait du toit mais le
sol était surélevé, protégé de la boue. Il y avait même des morceaux de bois
éparpillés autour d’un foyer de pierres entassées. Ils n’avaient pas vu d’endroit
aussi sec et confortable depuis plusieurs jours.
Ils sortirent détacher le travois et firent entrer les chevaux.
Ayla alluma du feu pendant que Jondalar retournait dans la première cabane arracher
des planches sèches. A son retour, il s’aperçut qu’Ayla avait tendu des cordes
entre les murs, accrochées à des chevilles de bois, et qu’elle y étendait les
vêtements mouillés et les fourrures de couchage et il l’aida à déployer la
tente sur une corde.
— Il faut trouver un moyen de boucher ces fuites, observa
Jondalar.
— J’ai vu des massettes qui feraient l’affaire. Les
feuilles sont faciles à natter, et on pourra en recouvrir les trous.
Ils allèrent cueillir les feuilles de prêles, plutôt épaisses et
rigides, et en rapportèrent chacun une pleine brassée. Les feuilles, enroulées
autour de la tige, longues d’environ soixante centimètres, larges de trois
centimètres ou plus, se terminaient en pointe. Ayla montra à Jondalar la
technique du nattage, et il se mit à confectionner à son tour des carrés
nattés. Ayla le regarda faire d’un air amusé. C’était plus fort qu’elle, elle
était toujours surprise de voir Jondalar exécuter un travail de femme, et sa
bonne volonté l’émerveillait. A deux, ils eurent bientôt autant de nattes qu’il
y avait de fuites.
Les cabanes étaient recouvertes de chaumes de roseaux attachés
sur un cadre de longs troncs d’arbrisseaux liés entre eux. L’ensemble rappelait
un peu les huttes des Sharamudoï, sauf que la poutre centrale n’était pas
inclinée et que le toit était asymétrique. Le côté percé d’une porte, et qui
ouvrait sur la rivière, était presque vertical et formait un angle aigu avec l’autre
pan. Les deux extrémités étaient fermées à la base, mais pouvaient se lever, un
peu
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