Le grand voyage
était
encore plus difficile de la traverser.
Au souvenir des gorges de la Mère où vivaient les Sharamudoï, et
où les parois tombaient à pie jusque dans l’eau, Jondalar décida de rester sur
le plateau. La vue d’une cascade ruisselant sur la paroi opposée le rassura.
Elle prouvait qu’il y avait parfois de l’eau sur les hauts plateaux, même si
les ruisseaux s’engloutissaient d’un coup dans les fissures de la roche.
Dans cette région de grottes, les voyageurs passèrent les deux
nuits suivantes sans avoir besoin de planter leur tente. Après en avoir exploré
quelques-unes, ils discernèrent au premier coup d’œil celles qui leur
convenaient.
Les grottes souterraines remplies d’eau allaient toujours en s’élargissant,
au contraire des cavernes proches de la surface dont l’espace intérieur se
rétrécissait rapidement quand le climat était humide, et à peine pendant les
sécheresses. Certaines cavernes n’étaient accessibles que par temps sec, et se
remplissaient d’eau quand il pleuvait. D’autres étaient sillonnées de
ruisselets. Les voyageurs recherchaient les cavernes sèches, légèrement
surélevées. Mais celles-ci étaient rares, l’eau ayant été, avec le calcaire, l’instrument
qui les avait façonnées et sculptées.
L’eau de pluie, en s’infiltrant, absorbait le calcaire dissous.
Chaque goutte d’eau calcaire, même la plus minuscule gouttelette en suspension,
était saturée de carbonate de calcium qui se déposait dans la caverne. Souvent
d’un blanc immaculé, le minéral en durcissant prenait parfois de superbes tons
translucides, se tachetait ou s’ombrait de gris, ou encore se colorait de pâles
reflets rouges ou jaunes. Des glaçons pendaient des plafonds, poussés par
chaque nouvelle goutte à rejoindre leur double qui s’élevait du sol. Certains
en se rejoignant formaient des colonnes resserrées à la taille, et qui s’épaississaient
avec le temps et le cycle toujours renouvelé de la nature.
Les jours devenaient de plus en plus froids et le vent soufflait
de plus en plus fort. Ayla et Jondalar appréciaient les cavernes qui les
protégeaient des morsures du vent. Avant de s’aventurer dans un abri, ils s’assuraient
qu’il n’était pas occupé par des fauves, mais ils finirent par se fier aux sens
plus développés de leurs compagnons de voyage pour les avertir d’un danger
éventuel. Quant à eux, d’instinct, et sans se concerter, ils guettaient la
présence de fumée, les humains étant les seuls animaux à utiliser le feu, mais
ils n’en virent jamais.
Leur surprise n’en fut que plus grande de tomber sur une région
à la végétation bizarrement luxuriante, comparée au paysage désolé et
rocailleux qu’ils venaient de traverser. Le calcaire y était différent, en ce
sens qu’il se dissolvait plus facilement, mais aussi par sa proportion de
résidu insoluble. Comme conséquence, des prairies et des arbres poussaient par
plaques au bord de rivières qui coulaient en surface, et les dépressions, les
grottes et les rivières souterraines se faisaient plus rares.
Lorsqu’ils aperçurent une bande de rennes paissant dans un champ
de foin qui avait séché sur pied, Jondalar sourit à Ayla, et sortit son
propulseur. Elle lui fit un signe d’assentiment et incita Whinney à suivre l’homme
sur son étalon. Avec comme seul gibier des petits rongeurs en piètre quantité,
la chasse avait été mauvaise, et comme la rivière coulait loin en contrebas
dans la gorge, ils n’avaient pas pu pêcher. Ils n’avaient donc vécu que de
viande séchée et sur leurs provisions de secours, qu’ils avaient même partagées
avec Loup. Les chevaux étaient affamés. Les rares brins d’herbe qui
réussissaient à pousser sur le sol trop mince n’étaient guère nourrissants.
Jondalar trancha la gorge de la femelle aux courts andouillers.
Après l’avoir saignée ils la hissèrent dans le bateau fixé au travois, et se
mirent à la recherche d’un campement. Ayla voulait faire sécher un peu de
viande et faire rendre la graisse. La perspective d’un cuissot rôti et d’un bon
morceau de foie bien tendre faisait saliver Jondalar. Ils envisageaient de
rester un jour ou deux, pour profiter aussi de la prairie toute proche. Les
chevaux avaient besoin de se restaurer. De son côté, Loup avait découvert une
myriade de campagnols, pikas et lemmings, et il était en chasse, ravi de l’aubaine.
Ils aperçurent une caverne au pied d’une
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