Le grand voyage
réfléchissait, inquiète et révoltée en
même temps. On avait blessé et enlevé Jondalar, et personne n’avait le droit d’agir
ainsi. Elle ne connaissait peut-être pas toutes les coutumes des Autres, mais
ça, elle le savait. Elle savait autre chose encore : d’une manière ou d’une
autre, elle le retrouverait.
Elle constata avec soulagement que leurs affaires étaient
toujours dans le panier adossé au rocher, tel qu’ils l’avaient laissé. Elle
déballa le contenu, entreprit d’installer quelques paquets sur le dos de
Rapide, et réunit le reste dans le panier. Le matin, elle avait ôté sa
ceinture, trop lourde, et l’avait laissée avec les autres paquets. Elle s’en
empara et en examina la dague de cérémonie, toujours accrochée dans la boucle,
et se piqua par mégarde. Saisie, elle regarda la goutte de sang perler, et fut
sur le point d’éclater en sanglots. Elle se retrouvait seule encore une fois.
Et on avait enlevé Jondalar.
D’un geste décidé, elle attacha sa ceinture autour de sa taille
et y accrocha sa dague, son couteau, le propulseur et les sagaies. Jondalar ne
resterait pas prisonnier longtemps ! Elle entassa la tente sur la croupe
de Rapide, mais garda les fourrures de couchage en cas de mauvais temps. Elle
conserva aussi une outre d’eau. Elle s’assit ensuite et mangea une galette,
moins par appétit que pour emmagasiner le maximum d’énergie. Elle en aurait
besoin si elle devait pister ceux qui avaient capturé Jondalar.
Son deuxième souci majeur concernait Loup. Elle ne voulait pas
partir à la recherche de Jondalar avant d’avoir retrouvé son loup. D’abord
parce qu’elle l’aimait, mais aussi en prévision de la traque : Loup avait
un flair remarquable. Elle espérait de tout cœur qu’il réapparaîtrait avant la
nuit, mais hésita à partir à sa rencontre. S’il s’était écarté de la piste pour
chasser, ils risquaient de se manquer. Quelle que fût son impatience, elle
décida donc de l’attendre.
Elle essaya de bâtir un plan d’action, mais son cerveau se
refusait à toute analyse. Le simple fait de blesser quelqu’un et de l’enlever
lui semblait si aberrant qu’elle était incapable de réfléchir. Cela défiait
toute logique !
Un gémissement suivi d’un petit jappement la sortirent de sa
torpeur. Loup courait vers elle, tout content de la retrouver.
— Oh, Loup ! s’écria-t-elle, joyeuse. Tu as fait plus
vite qu’hier, c’est bien. Ta blessure va mieux ?
Après les traditionnelles embrassades, elle l’examina et put
vérifier qu’il n’avait rien de cassé. L’hématome se résorbait normalement.
Elle décida de partir sur-le-champ afin de repérer les traces
pendant qu’il faisait encore jour. Elle attacha la longe de Rapide à la
courroie qui maintenait la couverture sur le dos de Whinney, et enfourcha la
jument. Elle dit à Loup de la suivre, et conduisit la jument à l’endroit où
elle avait découvert les empreintes de Jondalar parmi une foule d’autres, son
propulseur et la tache de sang, qui n’était plus qu’une mince traînée brunâtre.
Elle descendit de cheval pour examiner attentivement les traces.
— Loup, il faut absolument retrouver Jondalar,
expliqua-t-elle l’animal qui l’observait d’un air perplexe.
Accroupie, elle étudia les empreintes en s’efforçant de les
identifier pour connaître le nombre des agresseurs, et pour les graver dans sa
mémoire. Assis sur son arrière-train, Loup attendait patiemment, devinant que
quelque chose de nouveau et d’extraordinaire se préparait. Finalement Ayla lui
montra la tache de sang.
— On a blessé Jondalar, et on l’a enlevé, annonça-t-elle.
Il faut qu’on le retrouve.
Loup flaira le sang séché, remua la queue et jappa.
— Ça, c’est l’empreinte de Jondalar, expliqua Ayla en
désignant une trace plus large que les autres.
Loup la renifla. Il regarda ensuite Ayla comme s’il attendait de
nouvelles instructions.
— Ce sont ceux-là qui l’ont enlevé, reprit-elle en lui
montrant les empreintes plus petites des autres humains.
Ayla se releva soudain et marcha sur Rapide. Elle saisit le
propulseur de Jondalar et s’agenouilla pour le faire sentir à Loup.
— Loup, nous devons retrouver Jondalar. On l’a enlevé, et
nous allons le reprendre !
26
Jondalar émergea lentement d’un profond sommeil, mais resta
immobile. Prudent, il fit le mort en attendant de comprendre ce qui était anormal,
et de toute évidence,
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