Le grand voyage
que ce que vous avez apporté. J’ai surveillé vos plats avec
soin.
— Ici aussi ? s’inquiéta Jondalar.
— Personne n’ose s’aventurer ici sans mon autorisation,
assura Celle Qui Sert la Mère. Mais dès que les paniers sortiront de cette
pièce, tenez-les à l’œil. Attaroa et Epadoa n’ont cessé de comploter toute la
journée. Elles mijotent quelque chose.
— Et toutes les Louves sont à leurs côtés, renchérit
Jondalar. Et nous, sur qui pouvons-nous compter ?
— Presque tout le monde souhaite un changement, assura S’Armuna.
— Oui, mais qui nous aidera ?
— Nous pouvons compter sur Cavoa.
— Mais elle est enceinte ! s’exclama Jondalar.
— Raison de plus, rétorqua la vieille femme. Tout laisse
penser qu’elle donnera le jour à un garçon. Elle défendra la vie de son bébé en
même temps que la sienne. Et même si elle avait une fille, il y a peu de chance
qu’Attaroa la garde en vie une fois que le bébé sera sevré. Cavoa le sait.
— Que penses-tu de la femme qui est intervenue aujourd’hui ?
demanda Ayla.
— C’était Esadoa, la mère de Cavoa. Elle nous sera fidèle,
mais elle me reproche la mort de son fils autant qu’à Attaroa.
— Je l’ai vue aux funérailles, dit Jondalar. Elle avait
jeté des objets dans la tombe, et cela avait déplu à Attaroa.
— Oui, c’étaient des outils pour l’autre monde. Attaroa
avait interdit qu’on leur donne quoi que ce soit pour les aider dans le monde
des esprits.
— Je t’ai vue prendre la défense de cette femme, assura
Jondalar. S’Armuna balaya son affirmation d’un geste éloquent.
— J’ai dît à Attaroa qu’une fois les objets donnés, on ne
pouvait plus les reprendre. Et elle n’a pas osé les récupérer.
Jondalar hocha la tête.
— Les hommes de l’Enclos seraient ravis de nous aider,
déclara-t-il.
— Oui, mais il faut d’abord les libérer, dit S’Armuna. Les
gardes les surveillent étroitement. Je doute que quiconque puisse se glisser
derrière la palissade sans être vu. Dans quelques jours, peut-être. Cela nous
laissera le temps de regrouper les femmes. Quand nous saurons combien nous
sommes, nous pourrons étudier un plan pour renverser Attaroa et ses Louves. Il
faudra se battre, j’en ai peur. C’est la seule manière de délivrer les hommes.
— Je suis de ton avis, approuva Jondalar d’un air sombre.
Ayla hocha la tête avec gravité. Le Camp en avait déjà assez
enduré, et elle n’envisageait pas le combat, avec son cortège de souffrances,
de gaieté de cœur.
— Tu as dit que tu avais donné une boisson à Attaroa pour
endormir les hommes. Pourquoi ne verserais-tu pas des herbes dans l’infusion d’Attaroa
et de ses Louves pour les faire dormir ? proposa-t-elle.
— Attaroa se méfie. On ne lui fera rien avaler qui n’ait
pas été goûté auparavant. C’était le rôle de Doban. Maintenant, elle désignera
n’importe lequel des enfants pour remplir cette fonction, expliqua S’Armuna en
jetant un coup d’œil dehors. Il fait presque nuit, annonça-t-elle. Si vous êtes
prêts, je crois que la fête va commencer.
Ayla et Jondalar prirent chacun un récipient dans la pièce
intérieure, et Celle Qui Sert la Mère replaça l’omoplate de mammouth derrière
eux. Dehors, ils virent qu’on avait allumé un grand feu de joie devant l’habitation
d’Attaroa.
— Je croyais qu’elle nous inviterait chez elle, déclara S’Armuna,
mais on dirait que la fête aura lieu dehors, malgré le froid.
En les voyant approcher chargés de leurs récipients, Attaroa les
accueillit par ces mots :
— Puisque vous vouliez partager ce festin avec les hommes,
j’ai décidé que la fête se déroulerait dehors, afin que vous puissiez les voir.
S’Armuna traduisit, bien qu’Ayla eût très bien compris et
Jondalar également.
— On ne les voit guère dans le noir, remarqua Ayla. Il
faudrait construire un autre feu de leur côté.
Attaroa étudia la proposition, puis éclata de rire sans
esquisser un geste pour accéder à cette requête.
Le festin se composait d’un nombre extravagant de plats,
consistant surtout en viandes maigres, avec de rares légumineuses, céréales ou
racines ; pas de fruits secs, pas l’ombre d’une sucrerie, pas même d’écorces
tendres. On avait préparé le breuvage légèrement fermenté, à la sève de
bouleau, mais Ayla s’abstint d’en boire et constata avec soulagement qu’une
femme servait des coupes
Weitere Kostenlose Bücher