Le grand voyage
seul un œil averti pouvait reconnaître un bosquet de
saules, de bouleaux ou d’aulnes. Les conifères au vert profond étaient faciles
à différencier – épicéas, sapins ou pins – et bien que les
mélèzes eussent perdu leurs aiguilles, leur contour était facilement
identifiable. Lorsqu’Ayla et Jondalar s’aventuraient en altitude pour y
chasser, ils voyaient des mélèzes nains rampants et des pins minuscules
accrochés au sol.
Le petit gibier fournissait l’essentiel de leurs repas. Les
longues traques pour chasser de plus grosses proies demandaient trop de temps.
Cependant ils n’hésitèrent pas à chasser le cerf quand ils en surprirent un. La
viande se conservait bien, et même Loup n’eut pas besoin de chasser pendant un
moment. Les lièvres, les lapins et les castors, qui abondaient dans cette
région montagneuse, constituaient leur gibier principal, mais ils trouvaient
aussi des animaux des steppes habitués au climat continental, tels que
marmottes et hamsters géants. Ayla appréciait toujours autant les lagopèdes,
gras oiseaux blancs aux pattes recouvertes de plumes blanches.
Ils préféraient économiser les sagaies pour le gros gibier et la
fronde d’Ayla était souvent mise à contribution. Il était plus simple de
trouver des pierres que de remplacer les sagaies endommagées ou perdues. Mais
il arrivait que la chasse leur prît plus de temps que Jondalar ne le
souhaitait, et chaque retard le rendait nerveux.
Ils complétaient souvent leur régime, principalement à base de
viandes maigres, par des écorces de conifère ou d’autres arbres qu’Ayla faisait
cuire dans un brouet de viande, et ils découvraient toujours des baies avec
plaisir. Elles étaient gelées mais s’accrochaient encore aux branches. Les
baies de genièvre, délicieuses avec de la viande à condition d’en utiliser peu,
étaient les plus abondantes ; les gratte-cul, moins fréquents, se
ramassaient par poignées quand on en trouvait et leur goût était plus doux
après les gelées ; l’empêtre rampant offrait durant tout l’hiver, des
petites baies noires et brillantes qui se cachaient dans un feuillage
persistant ; les airelles et les raisins d’ours duraient également toute
la saison froide.
Ayla ajoutait aussi des graines et des céréales dans ses
brouets, mais la cueillette était pénible. Certaines herbacées portaient encore
des épis, mais elles étaient rares et avaient perdu leurs feuilles. Ayla, qui
regrettait les légumineuses et les fruits séchés que les loups avaient dévorés,
ne regrettait pourtant pas les réserves qu’elle avait laissées aux S’Armunaï.
Whinney et Rapide, mangeurs d’herbe exclusifs pendant l’été,
avaient étendu leur régime aux brindilles dont ils mâchonnaient le bout, aux
écorces d’arbre, ainsi qu’à une variété particulière de lichen, celle que les
rennes adoraient. Ayla le remarqua et en cueillit qu’elle goûta avant d’en
faire profiter Jondalar. Elle trouva le lichen âpre mais comestible, et elle
testa plusieurs façons de le cuire.
Ayla et Jondalar ne mangeaient pas les petits rongeurs,
lemmings, souris ou campagnols – ils laissaient cette friandise à
Loup pour le remercier de l’avoir débusquée – mais ils pillaient
leurs nids. Dès qu’ils trouvaient un terrier, ils fouillaient le sol gelé avec
un bâton à fouir, et découvraient les petites animaux camouflés au milieu d’une
réserve de graine, de noix, et de bulbes.
Et Ayla avait toujours sa poche à médecines. En songeant aux
dommages causés par les loups, elle frémissait à l’idée qu’elle aurait pu la
laisser avec la tente et le reste du matériel. Mais jamais elle n’abandonnerait
sa poche à médecines, et la simple pensée de la perdre la rendait malade. En
outre, son contenu et l’expérience accumulée au cours des siècles qui lui avait
été transmise permettaient à Ayla de maintenir les deux Voyageurs en meilleure
santé qu’ils ne croyaient l’être.
Elle utilisait toute la végétation disponible, comme les
aiguilles de semper virens et surtout les jeunes pousses, riches en vitamines
indispensables pour lutter contre le scorbut. Elle en jetait dans les
infusions, d’abord parce qu’ils en appréciaient la saveur acide et poivrée,
mais aussi parce qu’elle en connaissait les bienfaits. Elle avait souvent
préparé des décoctions à base d’aiguilles de semper virens pour ceux dont les
gencives saignaient et dont les dents
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