Le grand voyage
corde, nous allons te remonter.
La corde se tendit et Ayla fut hissée. Les pieds dans le vide,
elle se sentait monter lentement vers le bord de la crevasse. Elle vit Jondalar
et ses merveilleux yeux bleus remplis d’inquiétude, et elle agrippa la main qu’il
lui tendait. Il l’aida à escalader le rebord et elle mit bientôt pied sur le
sol glacé. Jondalar l’étreignit avec ardeur, et elle s’accrocha à lui avec une
passion égale.
— J’ai bien cru que tu étais partie à jamais, murmura-t-il
en la couvrant de baisers. Je regrette de t’avoir brusquée, Ayla. Je sais très
bien que tu peux faire tes paquets toute seule. Je m’inquiète toujours trop.
— Non, c’est de ma faute, protesta Ayla. J’aurais dû faire
davantage attention à mes protège-yeux, et je n’aurais pas dû avancer si vite
sur la glace. Je ne connais pas encore les dangers du glacier.
— Oui, mais j’ai eu tort de te laisser partir devant.
— J’aurais dû m’en douter, dirent-ils en même temps. Ils se
sourirent avec tendresse.
Ayla sentit une secousse à sa taille et vit que Jondalar avait
attaché la corde au harnais de l’étalon. C’était donc Rapide qui l’avait tirée
de la crevasse ! Elle s’escrima à défaire les multiples nœuds, mais dut
les trancher avec un couteau tant elle les avait serrés, d’autant que sa
remontée les avait encore renforcés.
Ils contournèrent la crevasse qui avait failli engloutir
Ayla et poursuivirent leur route vers le sud-ouest. L’épuisement de leur
réserve de pierres qui brûlent commençait à les inquiéter sérieusement.
— Encore combien de temps avant d’atteindre le bout du
glacier, Jondalar ? interrogea Ayla un matin, après avoir fait fondre de
la glace. Il ne nous reste plus beaucoup de pierres qui brûlent.
— Je sais. J’avais espéré que nous serions bientôt arrivés,
mais les tempêtes nous ont retardés, et j’ai peur que le temps s’adoucisse
pendant que nous sommes encore sur le glacier. Ça arrive si vite, fit-il en
scrutant le ciel d’un œil inquiet. Je crains que le vent chaud ne souffle
bientôt.
— Pourquoi ?
— J’ai repensé à cette dispute stupide. Tout le monde nous
conseillait de faire attention aux mauvais esprits qui précèdent le fondeur de
neige, tu te rappelles ?
— Ah oui ! Solandia et Verdegia disaient qu’ils
rendaient nerveux et irritable. J’étais très énervée, et je le suis toujours. J’en
ai tellement assez de toute cette glace, je dois me forcer pour continuer.
Serait-ce le Malaise ?
— C’est justement la question que je me posais. Si c’est
ça, nous devons nous dépêcher, Ayla. Si le fœhn souffle pendant que nous sommes
encore sur le glacier, nous risquons de disparaître dans une crevasse.
Ils burent l’eau à peine fondue pour économiser les pierres
brunâtres, et portèrent des outres pleines de neige sous leur pelisse fourrée
afin que la chaleur du corps fasse fondre assez de neige pour eux-mêmes et
Loup. Mais cela ne suffisait pas, et lorsque ils eurent utilisé leurs dernières
pierres, ils n’eurent plus d’eau pour les chevaux. Ayla était à court de
fourrage, mais l’eau était plus importante. Elle s’aperçut que les chevaux mâchaient
de la glace, mais son inquiétude grandissait. La glace et la déshydratation
risquaient d’abaisser leur température corporelle et de diminuer leur
résistance au froid.
Après qu’Ayla et Jondalar eurent installé la tente, les deux
chevaux s’approchèrent pour avoir de l’eau, mais Ayla ne put que leur offrir
quelques gouttes et leur casser de la glace. Ce jour-là, il n’y avait pas eu de
blizzard et ils avaient marché jusqu’à la nuit tombée. Ils auraient dû être
contents du chemin parcouru, mais Ayla se sentait étrangement nerveuse. Cette
même nuit, elle eut du mal à trouver le sommeil, elle essaya de se rassurer en
mettant son anxiété sur le compte des chevaux.
Jondalar resta longtemps éveillé, lui aussi. Il voyait bien que
l’horizon se rapprochait, mais il préféra ne pas en parler de peur de causer
une profonde désillusion. Il finit par somnoler et se réveilla en plein milieu
de la nuit pour constater qu’Ayla ne dormait pas non plus. Ils se levèrent dès
les premières lueurs de l’aube et se mirent en marche alors que les étoiles
brillaient encore dans le ciel opaque.
Au milieu de la matinée le vent avait tourné, et Jondalar crut
que ses pires craintes allaient se confirmer. Le
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