Le grand voyage
réveil, et il s’aperçut
qu’ils étaient presque arrivés chez lui. Il était heureux de se retrouver de ce
côté du glacier, mais l’impatience le gagnait. Il commençait à penser aux siens
et aurait voulu être déjà auprès d’eux.
— Parce que mon totem t’a choisi pour moi. Le Lion des
Cavernes t’a guidé jusqu’à moi.
— Mais alors pourquoi la Mère nous a-t-Elle fait naître si
loin l’un de l’autre ?
Ayla le dévisagea d’un air grave.
— J’ai commencé à apprendre, mais j’ignore encore beaucoup
de choses sur la volonté de la Grande Terre Mère, et je sais si peu des esprits
protecteurs des totems du Clan. Mais il y a une chose que je sais : tu m’as
trouvée.
— Et j’ai failli te perdre, murmura-t-il, saisi d’une peur
rétrospective. Ayla, que deviendrais-je si jamais je te perdais ?
Sa voix trahissait une réelle émotion qu’il n’avait pas l’habitude
de montrer si clairement. Il roula sur le côté, enfouit sa tête dans le cou d’Ayla
et la serra si fort qu’elle suffoqua.
— Que ferais-je sans toi ? gémit-il.
Elle s’agrippa à lui. Elle aurait voulu que leurs deux corps ne
fissent plus qu’un, et lorsqu’elle sentit le désir de Jondalar monter, elle s’abandonna
tout entière avec joie. Poussé par une urgence aussi exigeante que son amour,
il prit le corps qu’elle lui offrait avec une ardeur égale à la sienne. Ce
brusque désir fut encore plus vite satisfait que le précédent, et une douce et
chaude tendresse lui succéda. Lorsqu’il voulut soulager Ayla du poids de son
corps, elle le retint, comme pour faire durer l’intensité des Plaisirs qui l’avaient
anéantie.
— Je n’imagine pas la vie sans toi, Jondalar, assura Ayla
en reprenant la conversation où ils l’avaient laissée. Une parcelle de moi te
suivrait dans le monde des esprits, et je serais condamnée à vivre avec un
manque perpétuel. Mais nous avons de la chance. Pense à tous ceux qui ne
rencontrent jamais l’amour, et ceux qui aiment sans retour.
— Comme Ranec ?
— Oui, comme Ranec. J’ai toujours de la peine quand je
pense à lui. Jondalar se redressa et s’assit.
— Moi aussi. Je l’aimais bien... ou plutôt, j’aurais pu l’aimer...
Ce n’est pas comme ça que nous arriverons chez Dalanar, dit-il brusquement,
soudain impatient de repartir. J’ai hâte de le revoir.
— Oui, mais il faut d’abord retrouver les chevaux.
43
Ayla se leva et sortit devant la tente. Une brume rampante s’accrochait
au sol et l’air frais et humide transperçait sa peau nue. Au loin, la cascade
rugissait. Au fond du lac, langue d’eau verdâtre, le brouillard était presque
opaque.
Ayla devinait qu’aucun poisson n’habitait le lac dont les abords
étaient dépourvus de végétation. C’était un paysage archaïque qui semblait
remonter du fond des âges, avant le commencement de toute vie, un paysage de
roche et d’eau. Ayla frissonna en comprenant la solitude de la Grande Terre
Mère avant qu’elle ne donnât naissance aux êtres animés.
Ayla traversa la berge de gravier en courant et plongea dans l’eau,
glacée et limoneuse. Elle avait attendu ce bain depuis si longtemps depuis la
traversée du glacier ! Que l’eau fût froide ne la gênait pas, mais elle l’avait
crue claire et limpide.
Dépitée, elle retourna à la tente pour se rhabiller et aider
Jondalar à emballer les affaires. Comme elle scrutait le paysage désertique
enveloppé dans la brume, elle aperçut en contrebas la silhouette d’une forêt.
Soudain, un sourire éclaira son visage.
— Ah, vous voilà ! s’exclama-t-elle, avant de pousser
un long sifflement.
Jondalar se rua hors de la tente et s’illumina en voyant les
deux chevaux accourir au galop. Loup, qui les suivait, semblait aussi réjoui
que les deux humains. On ne l’avait pas vu de la matinée, et Ayla s’interrogea
sur son rôle dans le retour de Whinney et de Rapide. Mais le saurait-elle
jamais ?
Chacun accueillit sa monture avec force cajoleries et Ayla les
examina soigneusement, inquiète d’une éventuelle blessure. Whinney avait perdu
son protège-sabot droit et broncha quand Ayla palpa sa jambe. Elle se dit que
la jument avait probablement pris son pied dans la glace et avait arraché le
protège-sabot en se libérant, ce qui avait meurtri sa jambe.
Ayla ôta la peau de mammouth toujours attachée à l’autre sabot
de Whinney, aidée par Jondalar qui maintenait la jument. Rapide avait
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