Le grand voyage
des pierres, Loup exulta et courut
monter la garde devant la carcasse pendant que Jondalar découpait vivement les
griffes. Les dents lui donnèrent plus de mal, mais il eut tôt fait de revenir
avec son trophée. Ayla observait Loup en souriant. Dès que sa « bande »
avait eu chassé la bande rivale, son comportement s’était transformé. Tête
dressée, la queue droite, dans la position du mâle dominant, son grondement
était devenu plus agressif. Le chef des loups le surveillait, prêt à le défier.
Après qu’ils eurent abandonné la carcasse de l’ours aux loups,
le chef de la meute renversa la tête en arrière et poussa un hurlement guttural
et puissant. Loup tendit son cou et hurla en écho, mais son timbre fluet
trahissait le louveteau immature.
— Laisse, Loup, ordonna Ayla. Il est trop fort pour toi, plus
vieux aussi et plus expérimenté. Il ne ferait qu’une bouchée de toi.
Mais Loup réitéra, non par défi mais par instinct de solidarité
avec son espèce.
Le reste de la bande se mit de la partie si bien que Jondalar
eut l’impression d’être encerclé par les jappements et les hurlements. Alors,
Ayla, pour satisfaire une envie, leva la tête et se mit à hurler à l’unisson.
Jondalar en eut la chair de poule, tant la voix d’Ayla imitait celles des loups
à la perfection. Jusqu’à Loup qui dressa les oreilles, la regarda, étonné, puis
hurla longuement avec plus d’assurance. Les autres loups répondirent et bientôt
les bois retentirent d’un chœur magnifique et émouvant.
En arrivant au camp, Jondalar nettoya les griffes et les crocs
de l’ours, pendant qu’Ayla chargeait Whinney. Il n’avait pas terminé ses
bagages qu’elle était déjà prête. Appuyée contre la jument qu’elle flattait
distraitement, elle remarqua que Loup avait déniché un autre os pourri. Cette
fois, il resta à l’autre bout de la clairière. Il jouait avec son trophée en
grognant de plaisir tout en surveillant Ayla d’un œil et en évitant bien de lui
apporter son trésor.
— Loup ! Ici, Loup ! appela-t-elle. (Il abandonna
son os et accourut.) Le moment est venu de t’apprendre quelque chose de
nouveau, annonça-t-elle.
Elle voulait le dresser à rester sans bouger, même s’il la
voyait partir. Ce serait un dressage long et pénible, mais elle en prévoyait l’importance.
A en juger par l’accueil qu’ils avaient reçu au Camp des Fougères, elle s’inquiétait
des futures rencontres avec d’autres « bandes » d’humains, et des
réactions de Loup.
Un jour, au Camp du Lion, elle avait promis à Talut qu’elle
tuerait le loup de ses propres mains si jamais il mordait quelqu’un. Elle
estimait de son devoir de veiller à ce que l’animal carnivore qu’elle avait
amené parmi les humains ne blessât personne. Elle cherchait de surcroît à le
protéger. Son attitude menaçante avait déjà provoqué des réactions défensives,
et elle craignait qu’un chasseur effrayé ne tentât de tuer ce loup étrange avant
qu’elle ne pût l’en empêcher.
Elle commença par l’attacher à un arbre. Elle lui ordonna
ensuite de rester pendant qu’elle s’éloignait, mais la corde à son cou était
trop lâche et il réussit à se libérer. Elle recommença en serrant davantage le
collier, craignant un peu qu’il ne s’étranglât. Comme elle l’avait prévu, il se
mit à gémir tout en bondissant sur place pour tenter de la rejoindre. A
plusieurs foulées de là, elle lui criait de ne pas bouger, accompagnant son
ordre d’un geste de la main.
Lorsqu’enfin il se calma, elle revint le féliciter. Après
quelques autres tentatives, elle vit que Jondalar était prêt et détacha Loup.
Cela suffisait pour aujourd’hui. Mais après qu’elle eut bataillé pour défaire
les nœuds que Loup avait resserrés en essayant de se libérer, elle songea qu’il
serait préférable d’envisager d’autres méthodes. Elle avait d’abord tenté d’ajuster
le collier pour qu’il ne fût ni trop lâche ni trop serré, et voilà qu’elle n’arrivait
plus à le dénouer.
— Crois-tu vraiment que tu puisses lui apprendre à ne plus
menacer les étrangers ? demanda Jondalar qui avait assisté aux derniers
essais infructueux. Tu disais pourtant qu’il était normal qu’un loup se méfie
des autres. Comment espères-tu aller contre sa nature ?
Il monta Rapide pendant qu’elle rangeait la corde.
— Est-ce dans la nature de ce cheval de te porter ?
rétorqua-t-elle en
Weitere Kostenlose Bücher