Le grand voyage
de rochers en saillie, recouverts d’un tapis de mousse.
Elle leva les yeux. Creb était là ! Il lui faisait signe
de se dépêcher. Il se retourna et, lourdement appuyé sur son bâton, escalada la
dure rampe qui longeait la cascade et mena Ayla vers une petite grotte cachée
par un buisson de noisetiers. Au-dessus de la grotte, en haut de la falaise, un
gros rocher aplati en équilibre sur le rebord du précipice semblait sur le
point de basculer.
Sans savoir comment, elle se retrouva dans la grotte, dans un
passage étroit. Elle vit une lumière ! Une torche à la flamme vacillante,
puis une autre, et enfin elle entendit l’épouvantable grondement d’un
tremblement de terre. Un loup hurla. Elle se sentit emportée par un tourbillon,
prise de vertige, et c’est alors que Creb se glissa dans son esprit. « Enfuis-toi !
ordonna-t-il. Dépêche-toi, sors d’ici ! »
Elle se releva en sursaut, rejeta la fourrure qui la
couvrait et se précipita vers l’ouverture de la tente.
— Ayla ! s’écria Jondalar en la retenant. Que se
passe-t-il ?
A travers la paroi, un éclair illumina la tente, dessinant un
halo autour des coutures du trou d’aération, embrasant le passage qu’ils
avaient laissé ouvert pour Loup. Presque aussitôt, un violent claquement
retentit. Ayla poussa un cri d’angoisse et, dehors, Loup hurla.
— Ce n’est rien, Ayla, murmura Jondalar en la serrant dans
ses bras. C’est l’orage.
— Partons ! Il nous a dit de nous dépêcher. Partons
vite ! supplia-t-elle, essayant maladroitement d’enfiler ses vêtements.
— Qui ça ? Mais, Ayla, nous ne pouvons pas partir, il
fait nuit et il pleut.
— C’était Creb. Je l’ai vu, j’ai encore rêvé de lui. Il me
disait de faire vite. Allez, viens, Jondalar !
— Ayla, calme-toi. Ce n’était qu’un rêve. Écoute l’orage,
on dirait une cascade. Tu ne vas tout de même pas sortir sous ce déluge !
Attendons qu’il fasse jour.
— Non, Jondalar, il faut que je parte. Creb me l’a
conseillé, et je ne supporte plus de rester ici. Je t’en supplie, Jondalar,
dépêche-toi ! insista-t-elle, indifférente aux larmes qui ruisselaient sur
ses joues, entassant fébrilement le matériel dans les paniers.
Il décida d’obtempérer. Il devenait évident qu’elle n’attendrait
pas le matin, et il n’était plus question qu’il se rendorme. Il ramassa ses
affaires pendant qu’Ayla ouvrait le pan de la tente. Dehors, la pluie
redoublait. On aurait dit que quelqu’un versait de pleines outres d’eau. Ayla
sortit et siffla longuement. Loup la suivit en hurlant. Elle attendit et siffla
encore une fois, puis entreprit d’arracher les piquets de tente.
Enfin, elle entendit une cavalcade et poussa un soupir de
soulagement. Les larmes s’effaçaient sous l’eau qui inondait son visage. Elle
se précipita à la rencontre de Whinney, son amie venue à la rescousse, et
enlaça l’encolure de la jument trempée et frissonnante de peur. Elle piaffait
nerveusement, fouettant l’air de sa queue, tout en agitant ses oreilles
dressées, à la recherche de l’origine du danger. La peur de la jument chassa
celle d’Ayla. Whinney avait besoin d’elle. Elle la rassura avec des paroles
douces et des caresses apaisantes, et Rapide encore plus effrayé que sa mère
vint se frotter à elles.
Ayla tenta de le calmer, mais il recula en caracolant. Elle
laissa les deux chevaux et courut sous la tente pour prendre les harnais et les
paniers de charge. Jondalar avait déjà roulé les fourrures et les avait
entassées sur ses sacs en entendant le bruit des sabots, et il avait préparé
les harnais et le licol de Rapide.
— Les chevaux sont paniqués, déclara Ayla en surgissant
dans la tente. Rapide risque de s’enfuir. Whinney essaye de l’apaiser, mais
elle a aussi peur et il la rend encore plus nerveuse.
Jondalar ramassa le licol et sortit. Les paquets d’eau que le
vent rabattit sur lui faillirent le renverser. La pluie tombait si fort qu’il
se croyait sous une cascade. C’était encore pire que ce qu’il avait imaginé. La
tente n’aurait pas résisté longtemps, et le tapis de sol aurait été vite
inondé, et leurs fourrures avec. Il se félicitait qu’Ayla eût insisté pour qu’ils
plient bagages. Un nouvel éclair zébra le ciel, et il vit Ayla se débattre avec
les paniers qu’elle tentait d’attacher sur le dos de Whinney. L’étalon bai
était toujours là.
— Rapide ! Allons, viens, Rapide !
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