Le grand voyage
les
chevaux leur permettaient de transporter davantage de charge ? se
demandait Ayla. Elle se souvint qu’en quittant le Clan, tout ce dont elle avait
besoin tenait dans un panier qu’elle portait sur le dos. Bien sûr, leur tente
était plus confortable que l’abri en peau qu’elle utilisait à l’époque, et ils
avaient des vêtements de rechange, de la nourriture, des ustensiles, et... elle
découvrit avec stupeur qu’elle serait incapable de porter ne serait-ce que le
quart de leur matériel dans un simple panier.
Elle jeta à Loup les intestins dont elle n’avait pas l’usage, et
aida Jondalar à dépecer l’aurochs. Après avoir pratiqué des entailles à
quelques endroits précis, ils commencèrent à tirer la peau, procédé plus
efficace qu’un dépeçage au couteau. Ils n’utilisèrent un outil tranchant que
pour sectionner les quelques points d’attache. La membrane qui protégeait les
muscles se sépara proprement sans trop d’efforts et ils obtinrent une peau
parfaite, seulement trouée par l’impact des deux sagaies. Ils la roulèrent pour
qu’elle ne sèche pas trop vite et la rangèrent à l’écart. La langue et la
cervelle feraient un plat riche et tendre qu’ils projetaient de manger le soir
même. Ils décidèrent d’offrir le crâne et ses larges cornes au Camp. Quelqu’un
s’en servirait certainement comme emblème, et sinon, on pouvait le garder pour
de multiples usages.
Ayla alla laver l’estomac et la vessie au ruisseau qui
alimentait le Camp en eau potable, et Jondalar descendit à la rivière chercher
du bois souple pour fabriquer l’armature du futur bateau. Ensuite, ils
ramenèrent du bois mort. Il leur faudrait allumer plusieurs feux pour éloigner
les insectes et les animaux de la viande, et chauffer l’abri.
Ils travaillèrent jusqu’à la tombée de la nuit, découpant la
viande en longues lamelles qu’ils étendaient sur des égouttoirs de fortune
faits de branchages, mais ils n’avaient pas encore terminé. Ils rentrèrent les
égouttoirs pour la nuit. Leur tente était encore humide, mais ils la plièrent
et la rentrèrent aussi. Ils la remettraient à sécher le lendemain, en même
temps que la viande.
Le lendemain matin, après avoir fini de découper la viande,
Jondalar s’attela à la construction du bateau. En trempant le bois dans l’eau
bouillante et en l’exposant à la vapeur, il l’assouplissait jusqu’à lui donner
la courbure voulue. Ayla l’observait avec grand intérêt et lui demanda où il
avait appris sa technique.
— C’est mon frère, Thonolan, qui me l’a enseignée. Il fabriquait
des sagaies, expliqua Jondalar en recourbant un petit arbre pendant qu’Ayla l’attachait
avec des tendons récupérés sur l’arrière-train de l’aurochs.
— Quel rapport avec la construction d’un bateau ?
— Thonolan pouvait obtenir un manche de sagaie parfaitement
droit. Et pour redresser le bois, il faut commencer par apprendre à le tordre,
ce qu’il réussissait à merveille. Il était bien meilleur que moi. Il avait un
fameux coup de main. Il faisait mieux que fabriquer des sagaies, il façonnait
le bois. Il fabriquait les meilleures raquettes pour marcher dans la neige, et
pour ça, il faut courber une branche jusqu’à obtenir un cercle complet. C’est
sans doute pour ça qu’il se sentait si bien chez les Sharamudoï, qui
travaillaient habilement le bois. Avec de l’eau chaude et de la vapeur, ils
donnent à leurs pirogues la forme qu’ils veulent.
— Une pirogue ? Qu’est-ce que c’est ?
— C’est un bateau creusé dans un arbre entier. Le devant et
l’arrière sont effilés et ça glisse sur l’eau en douceur. Comme si on fendait l’eau
avec un couteau tranchant. Celui que nous construisons ne soutient pas la
comparaison, mais les arbres ne sont pas assez grands par ici. Tu verras leurs
pirogues quand on sera chez les Sharamudoï, elles sont splendides.
— On y sera dans combien de temps ?
— Il reste encore du chemin. C’est au-delà des montagnes
que tu vois, dit-il en désignant les hauts pics perdus dans la brume estivale.
— Oh ! fit-elle, déçue. J’espérais que ce ne serait
pas si loin. J’aimerais tant voir des humains. Si seulement les habitants de ce
Camp n’étaient pas partis ! Peut-être reviendront-ils avant notre départ,
soupira-t-elle d’un ton dans lequel Jondalar décela une pointe de nostalgie.
— La solitude te pèse ? demanda-t-il. Tu es pourtant
restée
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