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Le Gué du diable

Le Gué du diable

Titel: Le Gué du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marc Paillet
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connaissance, agité de soubresauts. Tous semblaient frappés de stupeur.
    Erwin s’était tourné vers les jeunes gens.
    — Sans doute, leur dit-il d’un ton sévère, aviez-vous vos raisons pour fuir comme vous l’avez fait… Mais venez !
    Il leur fit signe de l’accompagner sur le seuil, et, là, il leur montra le champ sur lequel s’étaient produits les affrontements. Childebrand et ses gardes étaient parvenus, non sans peine, à séparer, puis à maintenir à distance les uns des autres Nibelung et Gérold. Un silence, à peine troublé par les ordres qui continuaient à être lancés, ainsi que par des plaintes et lamentations lointaines, avait succédé au tumulte. Le Saxon désigna de la main, l’un après l’autre, les corps qui gisaient sur l’herbe.
    — Regardez, regardez bien ! ordonna le missus. Voici Désordre, Douleur et Mort ! Sans doute votre équipée n’est-elle pas la cause essentielle, lointaine et profonde, de cette calamité. Sans doute n’êtes-vous pour rien dans la rage de celui qui s’était juré de vous tuer. Je veux croire que c’est pour lui échapper, ayant appris son dessein criminel ou l’ayant deviné, que vous vous êtes enfuis. Mais n’aviez-vous pas la possibilité de vous y soustraire autrement ? Par exemple, en venant nous alerter, nous, missionnaires du souverain, à défaut de tenir au courant vos familles en lesquelles, à l’évidence, vous n’aviez plus confiance ?
    Erwin s’interrompit un instant, fixant du regard le lointain.
    — La perspective de vous retrouver seuls, reprit-il, l’un à l’autre, peut-être…
    — Non, mon père ! protesta Clotilde.
    — … en tout cas libres de mener ensemble une aventure qui a dû vous paraître exaltante, cette perspective ne vous a-t-elle pas dicté votre conduite ? Si, n’est-ce pas !
    L’abbé saxon dévisagea le jeune homme, puis la jeune fille, avec une expression proche de la colère.
    — Exaltante pour vous, jeta-t-il, mais dramatique, mortelle pour ceux-là. Il montra à nouveau les corps étendus.
    — Et de ce drame – surtout ne protestez pas ! – vous êtes bien responsables. Le feu qui couvait, vous l’avez fait flamber ! ajouta-t-il d’une voix cinglante.
    Puis il murmura :
    — Dieu veuille qu’à quelque chose un tel malheur soit bon !
    Erwin et tous ceux qui se trouvaient dans la maison forestière ou à ses abords, y compris Rémy transportant Robert comme il l’eût fait d’un sac de farine, se dirigèrent vers Childebrand qui était demeuré sur le champ de bataille pour veiller au maintien de l’ordre et prendre les mesures qui s’imposaient d’urgence. Il avait rappelé à lui Hermant et sa cavalerie légère, qu’il avait postée aux alentours afin d’empêcher toute fuite. Il avait envoyé à Dilo des émissaires pour y réquisitionner deux charrettes, destinées à transporter les victimes de l’affrontement, et tous les moyens et vivres nécessaires à un campement de nuit, car il était exclu que des hommes épuisés et des chevaux fourbus pussent partir au crépuscule pour regagner Auxerre en une seule étape. Les émissaires étaient aussi chargés de ramener du bourg emplâtres, vulnéraires, décoctions et potions pour soigner les blessés ainsi que, si possible, quelqu’un se connaissant en médecine et chirurgie.
    Quand l’abbé saxon fut arrivé près de son ami Childebrand, celui-ci parcourut des yeux le cortège qui l’accompagnait, satisfait d’y apercevoir sains et saufs Albéric et Clotilde, qu’on avait séparés, s’étonnant d’y trouver ensemble Frébald, Badfred et Ermenold, lesquels étaient trop bouleversés d’ailleurs par les événements pour avoir même la force de se battre froid. Le regard du missus s’attarda sur l’étrange fardeau que coltinait Rémy et que celui-ci déposa sans douceur, ce qui ranima quelque peu le captif hébété.
    — Belle prise, assurément, marmonna-t-il.
    Puis, s’adressant en aparté à Erwin, il lui dit, mi-figue mi-raisin :
    — Je suis heureux que tu t’en sois bien sorti.
    — Moi de même, répondit le Saxon. Et tu as risqué plus que moi.
    — Peuh, murmura le comte en haussant les épaules. Cependant, certains ont eu moins de chance.
    Il énuméra à voix basse :
    — Quant aux Gérold, un homme d’armes tué, celui que tu vois là-bas, étendu, avec, à son côté, quelqu’un qui prie pour lui, et deux blessés dont un, gravement. Chez les Nibelung un mort, un

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