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Le guérisseur et la mort

Le guérisseur et la mort

Titel: Le guérisseur et la mort Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
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l’épouse de leur fils préféré. Il prétendait que son mari était l’homme le plus riche qu’il eût jamais connu. Peut-être cela avait-il été vrai et que c’en était la raison. C’était certainement le fils d’un homme avec qui Ezra avait fait de grosses affaires quelques années auparavant.
    Mordecai frappa soudain dans ses mains.
    — Oh, Isaac, je ne vous ai rien offert, et je ne songe qu’à mes souvenirs !
    Une servante apparut et il lui commanda des rafraîchissements.
    — Je les trouve très instructifs, lui dit Isaac.
    — Nous étions restés amis, reprit Mordecai. À la mort de l’oncle Ezra, quand elle se retrouva veuve, elle me dit qu’elle s’en allait. J’en étais pratiquement fou de désespoir. Ma pauvre épouse était encore de ce monde… une femme estimable que j’appréciais beaucoup. Nul n’en aurait pu avoir de meilleure. Mais Perla ajouta qu’elle ne pensait pas pouvoir rester dans une ville où elle avait été si malheureuse. De tout son cœur, elle désirait retourner à Majorque où, selon ses propres termes, il y avait lumière, joie et amitié. Un an après le départ de Perla, ma femme mourut et, tout en la pleurant, je regrettai aussi, à ma grande honte, qu’elle ne fût pas décédée avant Ezra. Je n’ai jamais parlé de ça à personne, Isaac, conclut-il tristement.
    — Je n’évoquerai jamais l’affection que vous lui portez ni vos sentiments à l’égard de son mari, l’assura le médecin.
    — Ah, votre formulation est pleine de circonspection, dit Mordecai en riant, mais vous avez raison. Rien d’autre n’était secret à l’époque.
    — Je m’étonne qu’elle ait recommandé à son petit-fils de venir dans une ville qu’elle détestait.
    — Il y a à cela une raison tout à fait valable. Mais je ne puis croire qu’un jeune homme, converso ou pas, sache si peu de choses de sa religion. Il est vrai que ce Lucà n’a que de vagues rapports avec notre foi, Isaac. Il n’est pas né dans notre communauté et n’a pas reçu l’éducation de ses membres.
    — Est-ce parce qu’ils tentaient de le protéger ?
    — J’ai envisagé cette solution, mais je persiste à croire qu’il en saurait davantage. C’est pour moi un problème d’une importance extrême : je me demande en effet si ce jeune homme est bien le fils de ma cousine Faneta.
    — Pourquoi ?
    — Je détiens une somme d’argent que mon oncle destinait à son petit-fils, Rubèn. Si ce Lucà est ce petit-fils, il devrait… non, il doit toucher cet argent. Sinon, il irait au véritable petit-fils. Il y a peu, juste après l’arrivée du premier Rubèn, j’ai adressé une lettre à un rabbin sévillan de mes connaissances et je lui ai demandé de faire procéder à une enquête discrète, car l’heure est venue de remettre cette somme.
    — Peut-être serait-il plus utile d’envoyer quelqu’un à Majorque pour y découvrir la vérité.
    — Oui, j’envisage cette solution, mais je préférerais d’abord avoir une réponse de Séville. Si j’envoie quelqu’un, il faudra que ce soit une personne fiable, intelligente et discrète, mais également capable d’aborder des étrangers. Oui, si une telle personne existait, je pourrais la dépêcher à Majorque. Mais pour l’heure, j’attendrai la réponse de Séville.
     
    — La ville refuse d’entendre nos arguments, dit Bonastruch Bonafet aux membres du conseil et aux autres représentants de la communauté. Il va donc falloir engager cinq gardes supplémentaires, au nouveau tarif, car vous n’ignorez pas que des incidents ont éclaté l’année dernière.
    — Leur avez-vous dit que problème il y a eu parce que leurs gardes étaient ivres et endormis sur le seuil de nos portes ? demanda Vidal Bellshom.
    — Évidemment, mais cela ne les a pas impressionnés. L’année n’est pas aux doléances. Sa Majesté le roi est toujours en Sardaigne, le procurateur a déclaré que c’était un problème d’ordre local et que la cité manque d’argent à cause des impôts supplémentaires levés pour la guerre.
    — Nous aussi nous avons apporté notre contribution, fit remarquer Mahir Ravaya.
    — C’est vrai, lui répondit Bonastruch, mais nous avons connu pour la plupart une année prospère, en partie parce que la guerre a développé notre commerce. Je suggère que nous considérions cela comme une taxe additionnelle et que nous n’en parlions plus.
    Il y eut un murmure confus d’opinions

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