Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le guérisseur et la mort

Le guérisseur et la mort

Titel: Le guérisseur et la mort Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
Vom Netzwerk:
vous apporter, mais garder le lit et éconduire mes clients, non, je suis bien trop occupé. Vous n’imaginez pas à quel point. Pendant une douzaine de jours à partir de jeudi prochain, nul ne pourra commercer avec nous autres, habitants du Call, et pour l’heure il y a à Gérone deux gentilshommes, des clients de longue date, menacés de ruine si je ne satisfais pas immédiatement leurs exigences. Ils dépendent de moi pour acheter les marchandises qui seront amenées en ville la semaine prochaine. Ma réputation ne s’en remettrait pas.
    — Je ne vous demande pas de faire ça tout de suite. Je doute que des problèmes se posent dans les jours à venir, mais si vous pouviez m’obliger un peu plus tard en vous faisant passer pour malade, deux ou trois jours seulement, ce serait à la fois intéressant et utile. Vous n’aurez pas à garder le lit. Travaillez tranquillement dans votre cabinet et contentez-vous de refuser toute visite.
    — Soit, dit Mordecai, je vais réfléchir à la question. Après tout, vous m’avez promis de me trouver quelqu’un de discret et de fiable qui puisse se rendre à Majorque pour y voir Faneta et sa mère.
    — Je vous ai fait une telle promesse, maître Mordecai ?
    — En effet. C’était bien votre idée, n’est-ce pas ?
    — Je l’admets.
    — Et je crois l’heure venue de la mettre à exécution.
    — Pourquoi donc ?
    — Parce que j’ai reçu une réponse à la lettre que j’avais envoyée à Séville. Une grande partie n’a pas d’intérêt pour tout autre que moi, mais je vais vous lire ce qu’elle dit de mon parent.
    — Soyez-en remercié.
    — « Maîtresse Faneta et le jeune Rubèn ont quitté Séville il y a trois ans, peu après la mort de son mari. Le garçon avait alors une douzaine d’années. Ils devaient aller vivre chez Perla, la mère de Faneta, mais ensuite je n’ai plus rien appris sur eux. Je ne vois pas pourquoi un jeune homme prétendant être le fils de Faneta devrait parler comme un Majorquin. Le garçon parlait comme tout membre de l’ aljama de Séville ; il s’adressait à sa mère dans la langue natale de celle-ci, et elle lui reprochait souvent son mauvais accent. Rubèn est un brave garçon, mais il n’est pas très doué pour les langues, je ne le sais que trop, ayant eu la lourde tâche de lui enseigner des rudiments d’hébreu. » Voilà tout ce qu’il sait de ce garçon et de sa mère, Isaac, j’imagine donc que pour être mieux informé, il faut envoyer quelqu’un à Majorque.
    — Espérons qu’il mettra au jour la vérité occultée par cette mascarade.
    — Mascarade, dites-vous ?
    — Avez-vous oublié que c’est la seconde fois qu’un cousin qui se dit le fils aîné de Faneta se présente à votre domicile, Mordecai ? Honnêtement, l’un ou l’autre de ces fameux cousins ressemble-t-il à Perla, à Faneta, à votre oncle ou à un quelconque membre de votre famille ?
    — J’ai examiné leur visage, Isaac, et je n’y ai rien trouvé qui me rappelât les traits des personnes que vous venez de mentionner. Si déclarer que je suis malade et me terrer pendant quelques jours peut contribuer à démasquer un imposteur, je ferai ce que vous me demandez… mais dans une semaine ou deux, pas avant.
    — Merci, mon ami.
    — Mais dites-moi, Isaac, que pensez-vous, en tant que médecin, de notre nouvel herboriste ?
    — Moi ? Je n’ai aucune opinion, sauf qu’il me semble être le médecin idéal.
    — Idéal ?
    — Oui. Il flatte tous les goûts. Pour les juifs, c’est un juif contraint de cacher sa religion ; pour les chrétiens, c’est un chrétien obligé de traiter avec les juifs. Pour les mères, il est le fils dévoué qu’elles n’ont jamais eu. Et pour les filles… je suppose qu’il lui suffit de pousser de profonds soupirs pour guérir leurs fièvres.
    — Vous ne l’aimez pas, maître Isaac, je me trompe ?
    — Mais si, mon ami, je l’aime bien, il est très aimable. Seulement, je ne lui fais pas confiance. Et je me demande s’il a lui-même confiance en soi.
     
    Mardi 31 mars
     
    Ce matin-là, Lucà se leva une fois de plus avec les oiseaux et, un gros panier à la main, il se dirigea vers les collines qui se dressaient au sud-est de la ville. Si l’on excepte une vague silhouette au loin, il semblait seul. Quand elle s’approcha, il fit un signe de la main.
    — Vous arrivez tôt, dit le jeune garçon d’un ton enjoué.
    —  ¡   Hola ! Yusuf. Je

Weitere Kostenlose Bücher