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Le guérisseur et la mort

Le guérisseur et la mort

Titel: Le guérisseur et la mort Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
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édifices sont consacrés aux transactions, mais nous espérons construire bientôt une vaste lonja, une « loge de mer », comme nous disons. Sa Majesté a donné son accord de principe à ce projet qui nous serait des plus bénéfiques. C’est là l’un des avantages du récent changement de régime, dit Maimó en faisant discrètement allusion à la conquête de l’île, une décennie auparavant.
    Il croqua dans une olive et Daniel fit de même avec une tranche de pain.
    — Je suis bien évidemment intéressé de voir tout ce qui est disponible, et mon oncle m’a demandé d’acheter ce qui pourrait nous être utile. Ma mission à Majorque n’a cependant rien à voir avec la ganterie. Je recherche une femme qui vécut un certain temps à Gérone. Après la mort de son époux, elle est revenue en ville où elle trouva… disons un endroit plus heureux pour y vivre, parmi de vieux amis et d’anciennes coutumes.
    — Voilà une réponse tout en diplomatie, dit Maimó en souriant. Et quelle est cette veuve ?
    — Perla, épouse d’Ezra ben Rubèn de Gérone.
    — La belle Perla… Oui, elle a brisé bien des cœurs en s’en allant. Je la connais bien, c’est une femme habile mais très aimable. Je puis vous conduire chez elle si vous le désirez. Demain vous conviendrait-il ? Je suis sûr que votre traversée vous a trop épuisé pour y aller maintenant.
    — Vous avez raison. Même si elle fut rapide, j’ai l’impression qu’elle a duré très longtemps. Pendant une bonne partie de la journée, j’ai cru que nous revenions doucement vers le port que nous venions de quitter.
    Une fois encore, son hôte se mit à rire.
    — Ah, ce sont des choses qui arrivent. Nos marins sont très astucieux quand les voiles sont gonflées, mais ils ne peuvent rien contre l’absence de vent.
     
    Ce même jour, au petit matin, alors que la ville de Gérone était plongée dans le sommeil, Isaac fut réveillé brusquement par la cloche du portail. Il quitta le lit installé dans son cabinet, jeta sa cape sur sa chemise de nuit et arriva au portail avant même l’ouverture de la porte de la petite chambre d’Ibrahim. Celui-ci sortit en maudissant les patients et leurs familles.
    — Maître Isaac, dit une voix enfantine, il faut que vous veniez chez nous sur-le-champ. Le maître est malade et ça a été si long pour gagner le droit de pénétrer dans le Call que je crains qu’il soit mort avant notre arrivée. J’ai dû aller au palais et demander au garde qu’on me fasse entrer. Ça a pris tant de temps que je…
    — Qui est ton maître ? demanda Isaac avant que le garçon ne lui raconte sa vie.
    — Maître Narcís. Il souffre beaucoup, il se tord dans son lit et appelle… c’est insupportable.
    — Un instant, que j’enfile ma tunique et prenne mon panier.
    — Qu’y a-t-il, papa ?
    La douce voix de Raquel lui parvint du haut de l’escalier de pierre.
    — C’est maître Narcís, dit Isaac en rentrant dans son cabinet pour s’y vêtir. Es-tu habillée ?
    — Oui, papa, depuis que j’ai entendu du bruit au portail.
    — Alors jette une cape sur tes épaules et prends le panier. Viens, petit, nous allons voir ton maître. Ibrahim, referme le portail derrière nous.
     
    La porte de la maison de maître Narcís s’ouvrit à l’instant même où le trio s’en approchait.
    — Entrez, maître, dit une voix. Hâtez-vous, il est au plus mal.
    — Est-ce toi, Anna ? demanda Isaac.
    — Oui, maître. Il est dans sa chambre à l’étage. Apporte d’autres bougies, mon garçon, lança-t-elle au gamin. Ne reste pas planté comme ça.
    Il revint un instant plus tard avec un grand candélabre qu’il posa sur une commode afin qu’il éclairât le lit, tandis que Raquel étalait sur une table le contenu de son panier.
    Isaac s’approcha du malade, écouta un instant et posa la main sur la poitrine de son patient. Il se pencha ensuite pour y coller son oreille.
    — Il est très pâle, papa, dit Raquel. Ses mâchoires sont si crispées que je le crois incapable de parler même s’il le voulait. On a l’impression qu’un poids écrase tous ses muscles.
    — Ses mâchoires ? répéta Isaac. Alors il faut commencer par apaiser ses douleurs. Deux gouttes, Raquel.
    D’un geste précis, elle mit dans un gobelet du sucre, de l’eau, un peu de vin et deux gouttes d’un breuvage épais, puis elle remua vigoureusement.
    — Je suis prête, papa. Si vous voulez bien vous mettre sur le

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