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Le guérisseur et la mort

Le guérisseur et la mort

Titel: Le guérisseur et la mort Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
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qu’il n’est pas responsable de ces empoisonnements, maître Isaac, je le sais. J’ai réussi à aller le voir en prison pour lui demander en quoi je pouvais l’aider et quelles personnes sauraient témoigner en sa faveur, mais il a seulement secoué la tête, répétant qu’il n’avait rien fait de tout ça et que Dieu ne le laisserait pas châtier injustement. Il a commis de petits délits dont il n’est pas très fier, mais il n’a jamais tué un homme. C’est alors que je me suis mise en colère : je lui ai lancé que Dieu n’apparaîtrait pas devant le tribunal épiscopal pour le sauver et que c’était à lui de se tirer de là ! Maître Isaac, je vous en conjure, aidez-nous. Demandez à l’évêque de faire quelque chose qui puisse le…
    — Avant de supplier l’évêque, Regina, pourquoi ne retrouverions-nous pas ce messager ? dit Romeu. Il saura qui l’a payé pour livrer ce poison.
    — C’est ce que je projetais moi-même, dit Isaac. Un gamin qui l’a vu sous la pluie habite au bord de la rivière, non loin du pont. Quand vous êtes arrivés, j’attendais que Yusuf termine de souper pour partir à sa recherche.
    — Alors je viens avec vous. Si ce garçon vit bien là, c’est à côté de chez moi et je peux peut-être me montrer de quelque utilité. Mais avant, je vais ramener Regina à la maison.
    — Et moi, je dois appeler Yusuf, conclut Isaac.
     
    En fin de compte, ce furent six personnes qui, à la lueur des torches, sortirent du Call et se dirigèrent vers la demeure de Romeu.
    — Regina, je n’aime pas te savoir seule à une heure aussi tardive. Peut-être pourrais-tu aller chez une voisine ? lui avait dit son père alors que leurs quatre compagnons attendaient près du portail.
    Raquel se tenait près de l’escalier au cas où l’on aurait eu besoin d’autre chose, et Ibrahim attendait patiemment de fermer derrière lui.
    — Papa, il est trop tard pour réveiller les voisins sous un prétexte aussi mince. Je ne risque rien à la maison.
    — Je ne me sens pas à l’aise de la laisser ainsi, avait confié Romeu à Isaac. Peut-être est-ce ridicule de ma part, mais…
    — Dans ce cas, pourquoi ne viendrais-je pas avec maîtresse Regina ? avait proposé Raquel. Ibrahim nous garderait et chacun serait rassuré.
    — Maîtresse Regina peut également rester ici, avait renchéri Isaac. Elle sera en sécurité, je vous l’assure. Ma famille et mes serviteurs sont très prudents.
    — Je préférerais rentrer, papa, si maîtresse Raquel veut bien m’accompagner.
    C’est ainsi qu’ils s’en allèrent dans les rues comme un groupe d’amis retournant de chez quelque connaissance. Ils parlaient à voix basse pour ne pas réveiller le quartier.
    — Pourquoi Lucà a-t-il passé un temps si long avec vous dans votre atelier ? demanda brusquement Isaac. Était-ce par désœuvrement ou parce qu’il n’avait pas assez de patients ?
    — Je ne le pense pas, répondit le menuisier. Ces deux dernières semaines, des malades demandaient à le voir chaque jour. Je le sais parce qu’ils envoyaient un enfant porter un message. Quand je le lui donnais – il n’aimait pas ouvrir la porte –, il répondait qu’il était trop occupé et ne pourrait se déplacer que le lendemain. À moi, il se plaignait qu’ils voulaient tous le garder pour lui parler. Il ajoutait qu’il préférait le silence d’une pièce de bois ou le bruit de la hache pour ne pas dire le sifflement de la scie. Il aime le bois, maître Isaac, et il m’a été d’une grande aide.
    Le chemin menant à la rivière n’était pas très éloigné de la maison de Romeu ; bientôt, ils quittèrent le flanc de la colline pour se diriger vers le pont.
    — La torche est-elle encore allumée, Yusuf ? demanda Isaac.
    — Oui, seigneur, murmura le garçon. Il fait nuit noire et la lune n’est pas levée.
    — Il faut l’éteindre et nous débrouiller sans elle.
    Ils avancèrent à pas de loup jusqu’à ce que leurs yeux fussent habitués à l’obscurité. Quand les pas de Romeu résonnèrent sur la travée du pont, Isaac lui effleura l’épaule pour lui demander de faire silence. Tous s’arrêtèrent.
    Sous un ciel obscur piqueté d’étoiles, la rivière coulait comme un flot d’encre entre des rives dont on devinait à peine l’existence. Un chien aboya. Un frémissement dans l’herbe les fit sursauter. Puis il y eut un bruit semblable à celui d’une bête qui saute, retombe sur ses

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