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Le Hors Venu

Le Hors Venu

Titel: Le Hors Venu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Viviane Moore
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et les siens, tous les siens. Et j’ai juré de me venger.
    — Roger II est mort, Bartolomeo.
    — Mais pas son fils Guillaume. Il m’a fallu bien du temps et de l’argent aussi.
    — Tu as donc dépensé toute ta fortune pour lui nuire.
    — Et pour te retrouver. Tu te souviens de cette phrase de Publilius Syrus avec laquelle tu n’étais pas d’accord ? Tirer vengeance d’un ennemi, c’est renaître... Je voulais renaître, alors qu’importait que mon palais tombe en ruine.
    — Revenons à la couronne.
    — Il me fallait un moyen pour effrayer Maion de Bari, déstabiliser Guillaume malgré ses victoires italiennes et t’accuser, toi. Alors je me suis rappelé ton récit sur le Vieux de la Montagne. Te souviens-tu dans quel état tu étais quand ces Bédouins t’ont ramené à Ispahan ? Tu avais les fièvres et tu délirais, j’ai cru que tu allais mourir.
    Bien malgré lui, Hugues revécut ce qui s’était passé là-bas, dans le fortin d’Alamut.
    Il se souvenait de Muhammad, le Vieux de la Montagne. Il venait de succéder à son père Buzurg Umîd et ne songeait qu’à égaler les prouesses sanglantes de son géniteur. Hugues était le premier chrétien à oser franchir les portes d’Alamut, pour cela Muhammad lui laissa la vie.
    La respiration d’Hugues s’accéléra.
    Cela avait été un voyage en Enfer. Quelque chose qui avait souillé son âme, y laissant des traces indélébiles. On l’avait drogué, humilié. On lui avait montré le paradis des fidâ’î puis, devant lui, plusieurs hommes s’étaient « dévoués », accomplissant sans broncher les désirs les plus terribles de leur maître, s’entre-tuant et se mutilant sous ses yeux. Enfin, le Vieux l’avait chassé sans rien d’autre sur le dos que ses vêtements en haillons. Si les Bédouins ne l’avaient pas trouvé, il serait mort.
    — J’étais sûr que ce message troublerait ton jugement. Je ne savais pas ce que tu avais enduré, mais la seule évocation du Vieux faisait de toi un autre homme.
    — C’est toi qui as tué les gardes ?
    — Le premier, c’était Marco. Rappelle-toi comme il dépeçait le gibier quand nous allions chasser au Parco Nuovo.
    — Les autres, c’était toi ! Il fallait quelqu’un de jeune et d’entraîné pour arriver à tuer des hommes de la Légion. Et tu as toujours été meilleur à frapper dans le dos qu’à affronter les yeux dans les yeux. Où est la couronne ?
    — Mais à côté de toi. Je l’ai offerte à Judith.
    Hugues regarda le panier où scintillaient les offrandes et reconnut le casque cuivré et les longs pendentifs du kamelaukion.
    D’Avellino se fatiguait, de grosses gouttes de sueur ruisselaient sur son visage.
    — Il faut en finir.
    Il regarda Eleonor d’un air songeur avant de sortir son poignard.
    Hugues chercha désespérément comment détourner son attention.
    — Si Judith t’aimait, pourquoi s’est-elle pendue ? demanda-t-il.
    D’Avellino se tourna vers lui et le frappa.
    65
    Après avoir traversé le jardin, Tancrède avait pénétré dans le palais, l’épée haute. Aucun bruit. Tout semblait désert. L’antichambre était vide et les autres pièces aussi. Il grimpa l’escalier quatre à quatre et se trouva face à une femme qui poussa un hurlement en le voyant. Tancrède bondit et la jeta au sol, l’attachant avec sa ceinture avant de lui glisser dans la bouche un morceau déchiré de sa jupe.
    Il s’immobilisa. Des chocs sourds retentissaient contre la porte voisine. Son maître était-il prisonnier là-dedans ? Il regarda autour de lui, cherchant quelque chaise pour défoncer la porte de chêne, et aperçut un trousseau de clés à la ceinture de la femme.
    Il les essaya toutes avec fébrilité et enfin, quand il réussit à ouvrir, il se trouva repoussé si brutalement qu’il ne comprit ce qui lui était arrivé qu’en voyant le grand chien filer vers l’escalier, le nez au sol.
    Le jeune homme se redressa en maugréant et partit derrière lui. L’animal disparaissait déjà dans les feuillages, il accéléra.
    De l’autre côté du palais, des coups avaient retenti contre le portail. L’Esclavon se laissa glisser dans le jardin pour ouvrir la lourde porte et laisser passer les chevaliers en armes que commandait le duc Ruggero.
    66
    Une balafre sanglante marquait le visage d’Hugues, qui avait perdu connaissance. D’Avellino s’apprêtait à frapper à nouveau quand des aboiements attirèrent son

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