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Le Japon

Le Japon

Titel: Le Japon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Collectif
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court. Le mouvement contribue à populariser les notions de liberté et de droits du peuple.
    « La liberté ou la mort ! » Tel est le cri de ralliement des jeunes militants qui se recrutent jusqu’au fin fond de chaque village. Le mouvement donne naissance à une organisation populaire unifiée, l’Aikokusha (Société des patriotes), qui devient en 1881 le Jiyuto ou Parti de la liberté. Sous la pression populaire, le gouvernement est contraint de faire promettre par l’empereur Meiji la création d’un parlement dans les dix ans. La Constitution « octroyée » par l’empereur à son peuple est proclamée le 11 février 1889 : c’est la première Constitution moderne en dehors d’un pays occidental. Elle n’est pas de philosophie particulièrement démocratique puisqu’il s’agit d’établir une monarchie constitutionnelle dans laquelle les droits du Parlement sont très réduits ; le suffrage est censitaire et le gouvernement n’est responsable que devant l’empereur. Mais on ne saurait oublier que la Constitution fut adoptée à l’issue d’un vaste débat de dimension nationale, expérience étonnante de confrontation d’idées si l’on songe qu’un quart de siècle plus tôt le pays vivait sous un régime féodal de guerriers.
    Même si le mouvement en faveur des libertés a échoué sur le plan politique, il a contribué à implanter dans la société japonaise des pratiques et des modes de pensée fondés sur le débat, la discussion, la confrontation. Ces pratiques contribuèrent à faire passer dans les faits la modernisation du pays.
    Nul doute que cette prise de parole populaire des années 1880-1885 correspond, après le coup d’État politique modernisateur autoritaire de Meiji en 1868, à une seconde étape, celle d’une véritable révolution culturelle démocratique. Mais une révolution qui avorte. Un épisode à l’image de toute l’histoire du Japon moderne, oscillant entre la construction autoritaire et brutale d’un État-nation moderne et la tentation de la liberté.
    Note
    79 . Rappelons que c’est dans les années 1870-1890 que se produit la grande expansion coloniale de la plupart des puissances occidentales. Pour les dirigeants japonais de l’époque, il y avait de quoi être inquiet…

1889, la première Constitution
    Le Japon moderne naquit officiellement le 11 février 1889. Ce jour-là, l’empereur octroyait solennellement à ses sujets une constitution, inspirée du modèle prussien. La date n’avait pas été choisie au hasard. Depuis 1873, le 11 février marquait l’anniversaire officiel de l’accession au trône du premier empereur, le mythique Jimmu, en 660 av. J.-C. Deux mille cinq cent quarante-neuf ans plus tard, l’empereur Meiji choisissait d’enraciner la modernité dans les origines les plus lointaines de la dynastie impériale.
    Des réjouissances étaient prévues à travers tout le pays, et surtout à Tokyo. La cérémonie de promulgation s’ouvrit à 9 heures du matin dans la Grande Salle du Palais impérial, en présence des membres du gouvernement, de la nouvelle aristocratie récemment instituée, et du corps diplomatique. Un seul siège demeurait inoccupé, celui du ministre de l’Éducation, Mon Arinori, dont personne ne parvenait à s’expliquer l’absence.
    Mori – on ne l’apprendrait qu’en fin de journée – avait été poignardé à son domicile alors qu’il s’apprêtait à se rendre au Palais. Il mourrait le lendemain soir, à l’âge de 41 ans. L’assassinat de Mori trouvait son motif dans une profanation que ce dernier aurait commise, plus d’un an auparavant, lors d’une visite au grandsanctuaire shinto d’Ise. Il aurait alors poussé un rideau avec sa canne et foulé un parquet sans se déchausser. Son agresseur, un ex-samouraï du nom de Nishino Buntarô, fut décapité par l’un des gardes du ministre. Le sacrifice de sa vie et les lettres émouvantes qu’il laissait à ses parents et à son frère achevèrent de faire de Nishino un héros de légende, incarnation de l’ancien esprit samouraï, que le public pleura beaucoup plus que sa victime.
    L’absence de Mori n’entrava pas le déroulement de la cérémonie qui se déroulait au Palais impérial. L’empereur lut le préambule de la Constitution, qui rappelait son appartenance personnelle à une « lignée ininterrompue et éternelle ». La cérémonie ne dura pas plus d’une dizaine de minutes. Les participants se virent

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