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Le jour des reines

Le jour des reines

Titel: Le jour des reines Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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personnes qui vont mourir.
    Guillaume, soudain très pâle, retint une exclamation de fureur. Lorsque le capitaine se fut éloigné, il commenta :
    — Ce malandrin possède une hardiesse qui me plaît. Allons, mettez-vous nu-pieds, compères. Toi, Ogier, cherche dans cette boîte des petits clous à large tête. Cinq, pas plus, par semelle ; trois, plantés, évidemment, de l’intérieur vers l’extérieur, au milieu ; deux plantés au talon [256] … Étienne, as-tu trouvé une grosse pierre ?
    — Non.
    — Après tout, je peux m’en passer : le clou s’enfoncera dans le cuir et ensuite dans la terre molle…
    — Voilà, mon oncle, le marteau d’armes. Il est heureux qu’il ait une grosse panne !
    — Il se peut que, marchant sur un caillou, la tête du clou nous pénètre la plante… Il vaut mieux se meurtrir soi-même en cet endroit que de prendre, allongé, un mortel coup d’épée… Surveille le champ, Thierry ; toi, Ogier, ouvre-moi ces grolles… En deux ans de captivité, j’ai appris à m’accommoder de moult choses que j’ai méprisées naguère. Faire le savetier ne saurait m’humilier, même si j’avais en main les heuses du roi Édouard et qu’il assiste à mon ouvrage !
    Ogier douta que cette affirmation fut vraie, mais Guillaume, en se consacrant à une tâche ingrate, oubliait le péril de mort qui, à mesure que le temps passait, prenait force et consistance.
     
    *
     
    — Il était temps, Guillaume, que tu finisses, et que nous ayons les pieds au sec… Venez voir qui nous rend visite.
    Ogier et son oncle dissimulèrent la boîte de clous sous un tas de plates inutiles et rejoignirent Barbeyrac sur le seuil du pavillon.
    — Monseigneur Jean d’Offord !
    — Et deux sergents portant des lances… Combien nous en amènent-ils ?
    — J’en compte dix. Il nous faudra en vérifier l’aloi pouce par pouce.
    — Certes, mon neveu !… Il y aura donc des chevaux… Nous allons devoir les examiner soigneusement, eux aussi, jusque sous leur selle.
    — Ce sont des épées, sûrement, que le sergent qui vient derrière tient sur son épaule enveloppées dans un linge…
    — Un linge rouge afin de nous émouvoir salement !
    — Il doit y avoir des haches : j’aperçois un croissant de fer.
    Jean d’Offord s’arrêta, souriant. Les porte-lances déposèrent leurs armes dans l’herbe. C’étaient des glaives de guerre aux fers en feuille de saule. Le licteur déroula son linge cramoisi : il y avait dedans deux épées et deux haches. Prévoyant une question, Jean d’Offord s’inclina :
    — Messire Ogier d’Argouges, vos armes vous seront fournies par le chevalier appelant.
    — En voilà des façons ! fit Guillaume.
    — Ne vous plaignez point trop, baron de Rechignac !… Il va être bientôt midi. Il y a beau temps que vous devriez être mort !
    — En fait d’armures, monseigneur, dit Barbeyrac, vous nous avez fait porter un tas de ferraille. J’ai moult regret de celle qu’un de vos capitaines m’a robée à Auberoche, tout en comprenant qu’elle ait pu exciter sa convoitise. On l’avait forgée à Paris. Les batteurs de fer que je connais sont les meilleurs du monde.
    Jean d’Offord renifla. Devant ces trois hommes dont il se savait détesté, son visage prit un air de sainteté qui ne dissolvait pas son orgueil maladif mais le durcissait, au contraire :
    — La paternité de l’armure de plates nous revient, messires. C’est John d’Aubernon, un baron de Surrey, qui se fit faire la première, il y a vingt ans, imité bientôt par Guy de Beauchamp, comte de Warwick [257] . Le saviez-vous ?
    — Que m’importe, dit Guillaume. J’ai du goût pour les mailles et j’en revêtirai. J’ai prié Wilf de m’apporter un tabard vieux ou neuf. Des mailles sans tabard, c’est une épée sans quillons, un bassinet sans ventaille…
    — Vous aurez votre tabard.
    — Vous êtes, monseigneur, d’une courtoisie précieuse !
    Jean d’Offord s’en alla, les épaules penchées « comme s’il venait de revêtir une armure », dit Ogier, approuvé par Barbeyrac moqueur et Guillaume, impassible.
    Ils procédèrent à l’inspection des épées. Toutes deux avaient leurs quillons recourbés vers le bas à la façon des Allemagnes, une prise large et haute où s’enroulait un fil de fer serré ; l’une, un pommeau de cuivre en queue de paon, l’autre en trèfle.
    — Par messire saint Michel ! dit Guillaume, après nous avoir

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