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Le jour des reines

Le jour des reines

Titel: Le jour des reines Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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ahurie d’Offrey.
    Il se passa quelque chose de triste : l’Anglais recula derrière Dartford qui, à son tour, recula derrière son compère. Leur retraite cessa quand la barrière parut s’y opposer.
    La foule grondait. Ogier revint contempler Cobham.
    — Une peur bleue, messire, après avoir vu rouge !
    Rasées depuis la veille, les joues de l’Anglais semblaient bleuies par la barbe naissante. Sous un regard où le mépris se muait en gaieté, il détourna la tête.
    — Messire Cobham, criez bien haut merci, pardon, et je vous laisse.
    Ogier devina le sursaut du corps sous l’armure boueuse. Il échangea un clin d’œil avec Chalk. Soudain vivifié, le vaincu s’étaya sur son coude valide :
    — Je vous dis bien volontiers pardon et merci.
    — Plus haut, messire ! Plus fort ! Il faut que votre roi le sache !
    —  Pardon !… Merci ! cria Cobham lors d’une espèce de sanglot énorme.
    Sans se soucier des cris et des rumeurs hostiles, mais aussi des applaudissements qui saluaient sa mansuétude, Ogier, apaisé, remit Confiance au fourreau.
    Il guidait son cheval vers ses compères quand Russell Chalk, de nouveau en selle, le rattrapa.
    — Messire Argouges, il me faut vous regracier pour votre générosité.
    — Ma faiblesse.
    — Je me merveille de vous avoir vu partir lance basse.
    — Il faut du muscle et de la volonté.
    — Messire, poursuivit le maréchal de lice, tous les gens de bon sens louent votre magnanimité. Vous êtes…
    — Un conart, messire. Un conart.
    Ogier arrêta son cheval et souriant tristement à cet homme qui peut-être, comme Calveley, eût pu devenir son ami :
    — Oyez bien ce que je vais vous dire… J’avais envie d’occire ce coquin. Lors d’une vraie bataille, comme à Sangatte, je ne l’eusse pas épargné après ce qu’il m’a fait… Quand je pense à lui, je touche cette oreille… Je sens mes plaies se rouvrir et saigner… Mais ici, en pleine fête… Votre roi ne me l’eût pas pardonné… Nous nous retrouverons un jour, Cobham et moi… Il va pendant longtemps souffrir de son épaule. Un petit inconvénient… Des emplâtres le guériront… Mais, contre l’orgueil et la méchanceté, il n’y a de vraie médecine que celle que je viens de lui administrer…
    — C’est bien parlé.
    — Vous avez de l’estoc [310] , messire Chalk… Sauriez-vous conserver un assez grand secret ?
    — Par Dieu qui vous donna tant de miséricorde, je vous en fais serment.
    Ogier sourit. Non, il n’était pas miséricordieux. Il en avait assez de ces jeux terrifiants et même, il plaignait Brackley d’y avoir perdu la vie.
    — Voilà, messire Chalk, dit-il sans plus d’ambages, le baron de Rechignac est mon oncle.
    — Ah !
    — C’est moi qui l’ai délivré de ses fers.
    — J’ignorais que les chevaliers fussent enchaînés.
    — Il l’était… Il est âgé de soixante ans. Dartford en a trente. Si messire Guillaume n’avait subi des sévices dus tout aussi bien à son otagerie qu’à son caractère, je ne me soucierais point de l’issue du combat qui se prépare : c’est un preux. Cependant, quelque admirable qu’il ait été dans les lices où je l’ai vu à l’œuvre, il n’est plus, après deux ans de geôle en Angleterre, le prud’homme dont les victoires ont merveillé ma jeunesse… Je crains qu’il ne se laisse emporter par la rage. Elle est mauvaise conseillère…
    — Vous croyez qu’il mourra ?
    — Je crois qu’il peut mourir… et tout est là. Et je vous prie, s’il est à terre, menacé comme l’était Cobham, de faire cesser l’affrontement. J’accourrai et l’adjurerai de demander merci.
    Ogier soupira. Si cet appel à la clémence l’avait en partie soulagé, son angoisse demeurait entière. Il n’osa dévisager Russell Chalk de peur de découvrir sur son visage une pitié sincère ou dérisoire, à lui seul adressée.
    — Dartford est un ami. Je ferai ce qu’il faut.
    — J’ai moins confiance en lui qu’en vous-même !
    — Je vous en sais bon gré…
    Il ne leur restait plus qu’à se séparer.
     
    *
     
    — Il te fallait l’occire !
    — Non, Étienne. Je crois qu’il a bien fait de lui laisser la vie. Aussi vrai que j’ai nom Guillaume, Cobham, désormais, sera malade et comme enchifrené [311] par ce mauvais souvenir.
    Barbeyrac soulagea le Noiraud de sa selle et des ceintures inutiles.
    — Heureusement, dit-il à Guillaume, qu’il nous reste les renges à

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