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Le Journal D'Anne Frank

Le Journal D'Anne Frank

Titel: Le Journal D'Anne Frank Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Frank
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hier le temps est superbe et je me sens toute requinquée. Mon écriture, ce que j’ai de plus précieux, avance bien. Je vais presque tous les matins au grenier pour expulser de mes poumons l’air confiné de ma chambre. Ce matin, quand je suis remontée au grenier, Peter était en train de faire du rangement. Il en a vite terminé et au moment où je m’asseyais par terre à ma place préférée, il est venu me rejoindre. Nous avons regardé tous les deux le bleu magnifique du ciel, le marronnier dénudé aux branches duquel scintillaient de petites gouttes, les mouettes et d’autres oiseaux, qui semblaient d’argent dans le soleil et tout cela nous émouvait et nous saisissait tous deux à tel point que nous ne pouvions plus parler. Debout, il s’appuyait de la tête contre une grosse poutre, j’étais assise, nous humions l’air, regardions dehors et sentions que c’était une chose à ne pas interrompre par des paroles. Nous avons regardé très longtemps dehors et quand il est parti couper du bois, j’avais compris que c’est un chic type. Il a grimpé l’escalier qui mène aux combles, je l’ai suivi et pendant le quart d’heure où il a coupé du bois, nous n’avons pas échangé une parole. De ma place, je le regardais, il faisait des efforts visibles pour bien couper et me montrer sa force. Mais je regardais aussi par la fenêtre ouverte, je découvrais une grande partie d’Amsterdam, lous les toits jusqu’à l’horizon qui était d’un bleu si clair que la ligne ne se distinguait pas nettement.
    « Aussi longtemps que ceci dure, pensais-je, et que je puis en profiter, ces rayons de soleil, ce ciel sans aucun nuage, il m’est impossible d’être triste. »
    Pour tous ceux qui ont peur, qui sont solitaires ou malheureux, le meilleur remède est à coup sûr de sortir, d’aller quelque part où l’on sera entièrement seul, seul avec le ciel, la nature et Dieu. Car alors seulement, et uniquement alors, on sent que tout est comme il doit être et que Dieu veut voir les hommes heureux dans la nature simple, mais belle.
    Aussi longtemps que ceci existera et c’est sans doute pour toujours, je sais que dans n’importe quelles circonstances il y aura aussi une consolation pour chaque chagrin. Et je crois fermement qu’au milieu de toute la détresse, la nature peut effacer bien des tourments. Oh, qui sait, peut-être ne me faudra-t-il plus attendre très longtemps pour partager ce sentiment d’être inondée de bonheur avec quelqu’un qui ressent les choses exactement comme moi.
     
    Bien à toi,
    Anne
     
    P.-S. Pensée : à Peter.
    Nous sommes privés ici de beaucoup, beaucoup de choses et depuis longtemps, et elles me manquent aussi, tout comme à toi. Ne crois pas que je parle de choses extérieures, car de celles-là, nous sommes remarquablement pourvus. Non, je veux dire les choses intérieures. J’ai envie autant que toi de liberté et d’air pur, mais je crois que nous avons été largement dédommagés de ces privations. Je veux dire une compensation intérieure. Ce matin, quand j’étais devant la fenêtre, en regardant dehors, c’est-à-dire en regardant Dieu et la nature au fond des yeux, j’étais heureuse, purement et simplement heureuse. Et, Peter, aussi longtemps qu’existe ce bonheur intérieur, ce bonheur qui vient de la nature, de la santé et de tant d’autres choses, aussi longtemps qu’on le porte en soi, on se sentira toujours heureux. Richesse, considération, on peut tout perdre, mais ce bonheur au fond du cœur, il ne peut guère qu’être voilé et il saura nous rendre heureux, aussi longtemps que l’on vivra.
    Quand tu es seul et malheureux ou que tu as du chagrin, essaie toi aussi de monter dans les combles par un aussi beau temps et de regarder au-dehors. Pas de regarder les maisons et les toits, mais le ciel. Tant que tu pourras contempler le ciel sans crainte, tu sauras que tu es pur intérieurement et que malgré les ennuis tu retrouveras le bonheur.
     
     
     
    DIMANCHE 27 FÉVRIER 1944
     
    Très chère Kitty,
     
    Du matin au soir, je ne fais rien d’autre, à vrai dire, que de penser à Peter. Je m’endors avec son image devant les yeux, je rêve de lui et il me regarde encore lorsque je me réveille.
    J’ai la nette impression qu’il y a beaucoup moins de différence entre Peter et moi qu’il n’y paraît de l’extérieur, et je vais t’expliquer pourquoi : il nous manque à tous deux, à Peter et à moi, une mère. La sienne

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