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Le kabbaliste de Prague

Le kabbaliste de Prague

Titel: Le kabbaliste de Prague Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Halter,Marek
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colère de
l’Éternel vous abandonne aux tourments du démon. Mais ce n’est qu’une ruse de
Malin. Il veut t’empêcher d’accomplir ce que tu dois accomplir.
    Éva fronça les sourcils, me scruta sans bien me comprendre.
    — Accomplir quoi ?
    — Autre chose que de trouver un époux.
    Je fis un signe à Bachrach pour qu’il ne se méprenne pas sur
ma réponse, et ajoutai :
    — Vous êtes mari et femme. Tout est juste et en ordre.
La promesse n’était pas la tienne. Elle n’était pas celle d’Isaïe. Qui doit
accomplir une promesse qu’il n’a pas faite ? Où est la faute ? Non.
Le dibbouq n’est pas là pour vous punir. Il est là pour une autre cause. Une
cause que tu n’apprendras qu’en revenant à Prague, auprès du MaHaRaL, Éva. Auprès
de tous ceux qui t’aiment et qui n’ont jamais cessé de t’attendre.
     

LE GOLEM
     

1
    Lecteur, as-tu déjà eu conscience de n’être que l’instrument
de la volonté divine ?
    Alors que tu lis ces lignes, quatre siècles se sont écoulés
depuis ce printemps de l’an 5359, ou l’an 1599 du calendrier
chrétien. Je vois tout. L’avant, l’après, les causes et les effets. Je vois
comment nous nous sommes égarés et comment est advenu l’inouï.
    Et je vois comment je suis devenu le véhicule ignorant et
malléable d’un destin dont je ne savais encore rien. Au moins, le fus-je avec
sincérité. Avec mon amour d’Eva, ma naïveté et mon désir d’apaiser les douleurs
d’Éva autant que celles de Bachrach, cet époux que j’avais jalousé violemment
et dont la détresse désormais m’émouvait comme celle d’un frère.
    Crois bien, lecteur, que j’énonce cela sans vanité. Au
contraire, ma faiblesse et mon ignorance sont éclatantes. Et s’il me faut errer
aujourd’hui dans l’infinité du temps, prisonnier pour ainsi dire de l’immensité
de la mémoire qui façonne le devenir de chaque jour naissant, en voici sans
doute la cause.
     
    Ainsi, j’avais convaincu Éva de revenir à Prague. J’en étais
aussi heureux que fier. Bien qu’étant de la sorte qu’on utilise dans les
disputes des yeshivot, où l’on tourne et retourne les causes et les effets, mes
arguments eurent le pouvoir de l’apaiser un peu.
    Bachrach en montra un profond soulagement. Il me prodigua
tous les signes de l’amitié. Il me témoigna un respect auquel mon orgueil fut
sensible. Il m’invita à séjourner dans sa maison. Comme je venais d’arriver, il
suggéra de fixer notre départ à la semaine suivante. Il en profiterait pour
régler quelques affaires et organiser au mieux notre transport.
    Un délai qu’Éva approuva. Elle nous assura qu’elle parviendrait
peut-être à retrouver un peu de sommeil dans les nuits à venir, maintenant
qu’elle pouvait, grâce à moi, songer différemment à l’œuvre que le dibbouq
poursuivait en elle.
    Mais au crépuscule du même jour, tout changea.
    Je dormais dans la belle chambre où l’on m’avait installé,
goûtant un sommeil profond, une paix et un repos qui ne m’avaient pas été
accordés depuis des semaines, quand des coups violents firent vibrer ma porte.
    — David ! David, ouvrez ! C’est moi, Samuel…
    À la lumière des chandelles, le visage de Bachrach avait
perdu toute sa légèreté et même de son assurance.
    — Mauvaises nouvelles, gronda-t-il en allant droit à la
fenêtre.
    Il ouvrit les rideaux, poussa le volet. Dans la première
ombre de la nuit, un rougeoiement aux éclats mouvants découpait les toits de la
ville.
    — Cela recommence, soupira Bachrach. Les troupes levées
par Sigismond, l’évêque de Mayence, sont entrées dans la ville à midi et
brûlent les maisons des Réformés.
    — L’Éternel soit béni, cela ne concerne que les
chrétiens.
    Bachrach secoua la tête.
    — Ce n’est qu’une affaire de temps. Il y a six mois,
cela est déjà arrivé. Les luthériens voulaient détruire toutes les images
peintes dans les églises, comme cela se faisait déjà dans les villes de
Hollande. Les violences ont duré une semaine. Finalement, quelqu’un a crié que
les Juifs étaient la cause de ce chaos. Vous connaissez l’histoire, elle n’a
pas changé : nous empoisonnons le monde et semons le Mal avec les deniers
de Judas ! Vingt familles de chez nous ont été massacrées avant que l’on
puisse ramener le calme en versant deux mille écus d’or dans les caisses de la
Réforme.
    Il se tourna vers moi après avoir tiré les rideaux,

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