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Le lacrima Christi

Le lacrima Christi

Titel: Le lacrima Christi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: C.L. Grace
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sourdes comme des pots.
    — On n'entend plus rien ! avaient-elles piaillé. On est devenues sourdes !
    — Quand est-ce arrivé ? s'était enquise Kathryn avec toute la solennité requise.
    — On ne vous entend pas ! avait braillé Eadwig. C'est pour ça qu'on est là.
    L'apothicaire avait examiné avec grand soin leurs oreilles et consulté le livre de médecine. Elle avait prévenu Fulke que la poussière dans son atelier, pour une raison ou une autre, irritait le nez et la gorge de sa famille.
    — C'est une accumulation de fluides, avait-elle tenté d'expliquer.
    Les jumelles, qui se ressemblaient comme deux gouttes d'eau, s'étaient assises, l'air dolent, les yeux écarquillés, sans comprendre un mot.
    — Vous avez de la cire durcie dans les oreilles, hurla Kathryn.
    — Nous ne sommes pas des chandelles, avait rétorqué Edith.
    Kathryn avait essayé de réprimer son rire.
    — Si fait, c'est de la cire.
    Wulf, alerté par ses cris, était apparu, tout sourire, sur le seuil de la pièce et n'avait détalé que lorsqu'elle l'avait foudroyé du regard. Elle avait fait de son mieux pour curer les oreilles des enfants et avait préparé une mixture d'huile battue avec des clous de girofle et de la cannelle. Elle l'avait fait légèrement chauffer, puis, munie d'un petit entonnoir, elle en avait versé un peu dans les oreilles des malheureuses en annonçant que la cire devrait fondre, processus qu'elles pourraient hâter en se mouchant. Tous les efforts de Kathryn avaient pourtant tourné à la farce. En désespoir de cause, elle avait dépêché Wulf chez leur mère afin qu'elle puisse lui faire part de ce qu'il fallait faire. Mais la femme de Fulke ne se portait pas mieux que ses filles.
    D'autres patients attendaient et Kathryn dut pousser mère et enfants dans la cuisine pour que Thomasina, d'une voix de stentor, s'en occupe et leur prépare quelques potions à emporter. Le cas le plus curieux de la soirée était celui de Stephen, un solide jeune homme dont l'épouse venait d'accoucher de vigoureux jumeaux. Stephen avait joué les pères comblés mais ce soir-là il était entré en traînant les pieds et s'était assis sur le tabouret comme un homme sur le point d'être pendu.
    — Qu'y a-t-il, Stephen ?
    L'homme gratta sa chevelure ébouriffée en marmonnant.
    Kathryn lui jeta un bref coup d'œil : mains et doigts fermes, haut-de-chausses propre, justaucorps de cuir. L'air joyeux de Stephen et son visage ouvert lui avaient toujours plu.
    Adroit artisan, il avait bon cœur et se montrait généreux.
    Les fermiers et les marchands venaient de toute la ville, et même des villages alentour, lui acheter ses sacs. Il ne dupait jamais ses chalands, n'employait jamais de matériaux de mauvaise qualité et aidait la paroisse en cousant des habits pour les mendiants et ceux qui quémandaient du secours.
    — Que se passe-t-il, Stephen ? Vous avez l'air en bonne santé ! Judith, votre femme, va-t-elle bien ? Et les garçons ?
    — Je buvais au Fastolf quand Goldere le clerc a cru bon de plaisanter, dit-il en relevant la tête et en crachant presque les mots. Il a prétendu que mon épouse était adultère.

    — Oh, non ! gémit l'apothicaire en se souvenant du vieux conte de bonnes femmes selon lequel si une femme concevait et portait des jumeaux, c'est qu'elle avait dû forniquer avec un autre homme que son mari. Si vous le croyez, Stephen, déclara-t-elle, alors vous êtes fort sot et vous offensez gravement Judith : c'est une vilenie que vous devriez confesser pour être absous.
    — Je sais bien, bégaya-t-il. Mais un seul giron... ?
    — Écoutez, Stephen, expliqua Kathryn en lui prenant la main, votre épouse a porté des jumeaux parce que son sein a conçu deux fois.
    Elle sourit.
    — Comme un arbre prolifique. Dites donc à Goldere que, s'il répand cette histoire vous lui frotterez les oreilles ! Que votre femme ait eu des jumeaux signifie que vous êtes doublement un homme. Répondez à Goldere qu'il en sait aussi long sur la vie que sur l'art d'écrire, c'est-à-dire rien du tout. Demandez-lui de venir me voir. Je ferai son éducation et lui frotterai les oreilles, moi aussi !
    Stephen, enfin rassuré, était parti beaucoup plus gai et un peu plus sage. Kathryn soigna d'autres malades. Colum s'était rendu à Kingsmead et était rentré pour souper. Il était en haut dans sa chambre où, l'air absorbé, la langue tirée, il s'évertuait à réparer une pièce de harnais.
    Kathryn repoussa son registre

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