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Le lever du soleil

Le lever du soleil

Titel: Le lever du soleil Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Dufreigne
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tira son chapeau et salua la marquise. La marquise fit la révérence.
    - Mais Jarzay ?
    Ainsi il ne l‚chait pas le lièvre, chasseur comme son père !
    - Sire, c'est un pitre. Mais il amuse. Un divertissement pour période troublée.
    - Oui, une marionnette, sans doute, mais que Condé anime !
    Ainsi, il voit cela !
    - M. le Prince en effet le protège.
    - Et Jarzay, petit marquis, n'appartient qu'à lui. A ce grand cousin victorieux. qui l'a placé ici comme un coin dans une pierre à fendre. Comme une dague de thé‚tre dans le dos du Cardinal.
    Le Roi fit quelques pas, baissant la tête, ce qu'il semblait d'habitude s'interdire.
    - Un jour, Madame, je n'aurai plus de ministre. Plus de princes au Conseil, mais des hommes utiles, des intelligences (il sourit à la marquise) nécessaires et qui me devront tout, à qui je ne devrai rien, surtout pas un retour à Paris !
    - Et en ce jour-là, Sire, vous n'aurez plus non plus de gouvernante !
    - Voilà bien la seule f‚cheuse nouvelle de ce futur changement d'état. Aurai-je mon baiser d'amie, ce soir au coucher ?
    - Sire, si vous le désirez.
    - C'est bien la seule chose à laquelle un Roi ne peut contraindre.
    La marquise ne dit rien. Un enfant, encore ! qui ignore qu'il contraindra à bien pis. Mais déjà il désire des lèvres de femme sur les siennes. Et pas des lèvres de nourrice. Il serait temps que sa mère la Reine lui fournisse plus... et une bouche plus jeune que la mienne.
    - J'ai vu des couples s'embrasser en ce jardin. Il m'est arrivé
    de les envier. Embrassez-vous Guitaut derrière ces arbres ?
    - Oh, Sire ! M. Guitaut est aussi discret que moi. Et si j'osais, aussi " secret " (elle appuya le mot) que Votre Majesté.
    Elle avait l‚ché la main du Roi dans son mouvement de retrait ; il ne dit rien mais la reprit.
    - Il n'empêche...
    - Oui, Sire ?
    - J'aimerais recevoir un baiser. Ou vous le donner.
    Mme de Sénecey pencha à peine son visage, le Roi avait grandi, et les lèvres de Louis se pressèrent sur les siennes. Il écarquillait ses yeux sombres venus des Médicis, elle eut l'idée de clore un instant ses paupières. Mon Dieu ! que fais-je ? lui montrer comment une femme se rend !
    Il tenait son chapeau à la main, se recoiffa.
    Merci, Madame. C'était un baiser d'amour, je crois.
    - En effet, Sire. Et je l'ai reçu de vous.
    - Mieux, Madame, vous l'avez accepté comme tel. Il semble que ma mère en ait accepté d'ainsi tournés de M. de Buckingham dans certain jardin d'Amiens.
    " Et plus encore, pensa Mme de Sénecey. Le voilà qui se tourmente au sujet de sa mère. Ce Jarzay lui empoisonne l'esprit... et les chansons sur Mazarin aussi. "
    - Je suis une femme, la Reine aussi.
    - Je dois veiller sur elle. Comme je veillerai sur vous. Je vous ferai duchesse.
    Et si je comptais vingt ans de moins, ta maîtresse ! Elle frissonna.
    M. de Jarzay déplaisait à Mazarin comme il déplaisait au Roi, et pour des raisons voisines. Capitaine des gardes de Mgr le duc d'Anjou, Jarzay était admis dans le particulier de la Régente au nombre des rares gentilshommes, comme des Jars, Mortemart, père du jeune Vivonne, et Guitaut. Une intimité, donc, réservée aux proches féaux. Si ces messieurs savaient faire leur cour à la souveraine, Jarzay, lui, tentait de lui faire la cour. Les compliments pleuvaient ; les regards s'éternisaient, et tous s'en amusaient.
    Mme de Sénecey ne cacha rien à la Reine de sa promenade et de la conversation dans les jardins, car en une Cour tout se sait, donc autant confirmer.
    La Reine écouta son amie. Mais toléra encore Jarzay, car, depuis le siège de Paris, la Reine ne comptait guère de distractions mais multipliait les soucis. Mazarin lui-même ne réussissait pas à
    la divertir et n'en avait guère le temps, ni le go˚t, épuisé par le travail, énervé par les libelles contre lui, craignant même pour sa vie.
    Jarzay s'en donnait à cúur joie et, aux dires de tous, ne manquait pas d'esprit. Trop. Il dit chez Condé qu'" une femme espagnole, quoique dévote et sage, se pouvait attaquer avec quelque espérance ". Il avait par ailleurs, avec maints cadeaux et promesses, gagné sa dame de chambre, Cathau la Borgnesse, Catherine Bellier, dame de Beauvais et future comtesse dans l'année pour services rendus à la Couronne...
    Par Cathau, un poulet amoureux atteignit la toilette de la Reine.

    Mazarin exigea les renvois ! Louis le Silencieux observait sans mot dire. La Reine défendit Mme de Beauvais qui la

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