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Le lever du soleil

Le lever du soleil

Titel: Le lever du soleil Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Dufreigne
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Mais n'en était pas certain.
    Il s'éveillait très tôt comme un bambin et, il l'ignorait, comme un Roi, déjà. Or désormais sa Maman traînait au lit, jusqu'à dix heures, onze heures, midi.
    Papa Roi, lui, dès sept heures déclarait souvent : " Je m'en vais à la chasse tenter de me réjouir. " Chasser moins le cerf que sa mauvaise humeur, l'aigreur de ses douleurs, le délétère de cette Cour, l'ennui, le chagrin qui ne lui donnaient plaisir à rien ; chasser la guerre de ses pensées et au grand vent n'être plein que de cet enfant qu'il avait préféré quitter pour le mieux aimer en songeant à
    lui. En sa tête, comme ses amours de tête dédiées aux péronnelles de la Reine, mais aussi en son cúur, dans le silence apaisé de son cúur, apaisé par les campagnes, le soleil, le vent, la pluie et le vol cruel des gerfauts aveuglant à coups de bec les colombes.
    Souvent, alors que tout l'équipage de la chasse l'attendait dans la cour en grand arroi, il remontait au premier étage du Ch‚teau Vieux, repassait par la chambre de damas blanc, sec échalas botté, sanglé, et donnait un baiser à la va-vite au bambin ballotté entre servantes et nourrices. A la va-vite comme par timidité, un peu confus d'avoir un héritier, un successeur, et d'imaginer ce petit bloc de chair rondelet un jour Roi à cette place dont il mesurait la grandeur unique et les embarras infinis. Cette image était la rare chose qui ne l'attrist‚t pas.
    Alors Louis Dieudonné le Petit entendait le bruit et le crissement des bottes qui revenaient, plus lentement pour effacer le remords de l'avoir quitté. Le silence s'installait et Petit Louis sentait passer quelque chose entre eux, qu'il ne définissait pas mais que son esprit et son corps comparaient aux flammes de la cheminée qu'il aimait tant contempler la bouche vissée au sein de Perrette. Puis, de nouveau, la maigre présence disparaissait. Il lui semblait qu'il lui manquait certains jours, du moins à certains brefs instants de la journée.
    Le Roi venait tôt matin, puis partait, le Roi revenait puis repartait. Et Mme de Lansac s'agaçait de ces allées et venues car toujours Mme la Gouvernante de Mgr le Dauphin, titre prodigieux, devait en grande tenue et non en simple robe de chambre accueillir le Roi. Ce fut déjà un enfer pour elle que les visites des ambassadeurs et des princes du sang. Et voilà que le Roi venait à l'improviste, à l'aube ou presque, et revenait de manière totalement impromptue. Madame de Lansac n'en pouvait plus et haÔssait ces allées et venues. Et donc s'agaçait de leur objet minuscule et mal tenu.
    Puis le Roi disparaissait des semaines voire des mois. Et le seul bruit de bottes agréable que repérait ensuite les oreilles du Dauphin était celui d'un homme au nom en sons simples, en " i " et en " o ", le vieux capitaine Guitaut.
    Parfois Petit Louis pleurait, parfois babillait. Et marquait aux aubettes l'humeur du royal visiteur de l'aube pour la journée.
    Mieux que les révoltes en Normandie, que la guerre aux frontières, cet enfant posait au Roi des questions sans réponses. On peut écraser les Jean-nu-pieds, parlementer avec l'ennemi, mais avec un enfant ?
    L'enfant, que ce Roi vient visiter chaque matin, qu'il soit au Louvre ou à Saint-Germain, surtout à Saint-Germain, son véritable logis, loin de Paris et ses maladies, pour en contempler l'éveil et s'en réjouir secrètement, cet enfant qui, lui, ne chasse pas, ne chevauche pas, mais le regarde avec l'intensité que seuls osent les bébés, pleure, se tait, tète puis mange une bouillie, marche bientôt à quatre pattes, tire le bas d'un jupon pour obtenir un peu d'attention et va s'enfermer en lui-même.
    Montre-t-on une once d'affection au bambin qu'il fond. Il est bien de son père malgré ses cheveux virant au ch‚tain clair et bien au-delà des longs cils de son regard brun. Louis a d'abord grimacé
    de cette nuance de cheveux que le temps a apportée à son Dauphin mais il n'est pas mécontent que son fils ait la beauté de sa mère.
    La beauté de celle pour qui aux débuts de leur chaste mariage, ils étaient si jeunes, trop jeunes, trop inexpérimentés, il composa à la guitare la " Chanson d'Amaryllis ". Aujourd'hui, il en estropie les paroles qu'il e˚t aimé chanter maintenant à son fils.
    Manière joliment détournée pour ce père timide de parler à l'enfant à propos de sa mère sans lui dire qu'elle fut aussi une ennemie. Et sans doute le demeure.
    quelle ne

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