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Le lever du soleil

Le lever du soleil

Titel: Le lever du soleil Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Dufreigne
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fut pas la joie de la Reine quand elle apprit, Louis Dieudonné avait deux jours, que de l'autre côté des Pyrénées, en son cher Escurial, une petite infante était née, Dona Maria Teresa !
    Pour elle Dieu tout à coup comblait sa famille : les Habsbourg.
    Rien n'était plus proche du Petit Louis que cette enfant nou-

    veau-née. L'infante était la fille de la súur du Roi, Madame Elisabeth, et du roi Philippe le frère de la Reine. Maria Teresa était donc presque une súur pour Louis Dieudonné et la Reine voulut y voir un signe de la paix par-dessus les Pyrénées, ces montagnes de l'incompréhension et de l'acharnement à se combattre de deux monarques qui par leurs alliances et leurs ascendances étaient parents.
    Louis lui pardonnait mal qu'elle ait déclaré l'infante toute neuve
    " súur " du Dauphin. Il le lui pardonnait moins que la joie qui savait résider au cúur de la Reine et qu'elle dissimulait, car ce même 7 septembre La Valette et Condé, pour s'être chamaillés à
    qui commanderait, avaient été défaits à Fontarabie. Fontarabie, b‚tie, fortifiée par Charles quint, le glorieux ancêtre, était aussi la ville o˘ Anne, alors l'infante Dona Ana Mauricia, avait vu et embrassé pour la dernière fois son père, le feu roi Philippe ILI d'Espagne, avant d'être " livrée " à la France et à un gamin roi de treize ans tout bégayant et déjà malade. Elle n'avait jamais revu son père, n'avait pu lui tenir la main sur son lit d'agonie, n'avait pu assister à ses funérailles.
    Louis, malgré sa rage contre cette défaite, contre Condé, surtout contre La Valette qui avait fui, prudent, en Angleterre, admettait que sa femme ait pu secrètement soupirer de plaisir de savoir la dernière ville qui l'ait jamais rattachée à son pays natal, là o˘ l'on avait coupé le lien avec son vrai pays pour la lier à un autre, totalement étranger, ait pu rester dans sa terre natale et échapper à l'emprise de son mari.
    Peut-être l'aimait-il mère, lui qui n'avait su la faire épouse.
    Sans doute il l'aimait au travers de la beauté de ce déclamatoire
    " Mon Fils ", qui sacrait Louis Dieudonné leur fils.
    Le roi Louis le Juste, le Cruel, le Malade, devenu Louis le Père, avait des pudeurs qui sans doute l'honoraient et beaucoup l'entravaient. Chanter " Amaryllis " devant son fils pour évoquer sa mère ? Il en fut tenté avant de se rendre compte que les paroles par lui-même composées il y avait vingt et quelques années fuyaient sa mémoire. Et puis, aurait-il chanté sans bégayer devant son fils qui, certes, n'était pas encore en ‚ge de se moquer ?
    L'enfant est beau, comme le Roi s'en enchante en secret, mais l'enfant est seul. Seul au milieu d'une foule de dames, de gouvernantes, de femmes de chambre, de valets, de bas domestiques qui s'agitent dans l'indifférence. Manger, dormir, s'ennuyer. Ne pas s'ennuyer, jamais ! Il s'en occupera plus tard, par décret. Imaginer. Inventer. Un jour il décidera.
    Il a cinq mois.
    On vient de découvrir qu'il babillait. Un charmant galimatias.
    On l'a découvert trois jours après qu'il eut débuté dans ce nouveau métier d'enfant gazouilleur.
    Madame sa maman le demande-t-elle, et elle le fait avec tendresse toujours, que c'est branle-bas de combat. On le baigne, on l'habille, on examine son allure alors que pendant les trois heures précédentes nul ne s'est préoccupé de lui. Si, Perrette au moment du sein et aussi un peu après, elle a joué au chatouillis, au babil, aux bulles avec lui. Mais on l'expédie vite ailleurs, son emploi de laitière terminé.
    Les autres s'en fichent, les grandes dames vouées à son service ont tant d'affaires en train. Elles ont fait des pieds et des mains pour obtenir le poste, le titre, l'emploi, qui vaut tabouret de duchesse chez la Reine. Pour elles, il n'est que le prestige du moment et pension à vie, et elles laissent le bambin à leurs servantes, leurs souillons.
    Mais, Mesdames, il sera roi de France !
    S'il vit, mon ami. S'il vit !
    Gaston sent de plus en plus la frangipane et de plus en plus souvent passe voir son neveu. Une marionnette, un jouet, il apporte un cadeau mais est surtout préoccupé de la santé du divin et royal neveu. Le gamin se porte bien. Il forcit. Gaston plaisante avec les dames et disparaît dans son odeur de p‚tisserie.
    Maman est indolente, dit-on. En fait, elle est devenue paresseuse. On dit alors la Reine " patiente ", ce qui est vertu et non vice. La Reine épaissie par la

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