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Le lever du soleil

Le lever du soleil

Titel: Le lever du soleil Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Dufreigne
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dessous, ce qui leur donnait un drôle de go˚t lorsque du bout du doigt il les portait à
    sa bouche. Cela valait pour lui la gelée de rose qu'on lui offrait dans des pots de grès et dont il raffolait. Surtout quand la cuillère était tenue par Marie de Hautefort.
    C'est parce qu'il se gratta les cheveux, qu'il saupoudra son bol de lait sucré de ces éclats jaunasses qu'on s'aperçut que le Dauphin avait le cr‚ne couronné de squames galeux. Marie en tacha sa robe dans un hoquet. Il y eut du remuement.
    quand Marie était là, le Dauphin ne la quittait pas.
    " Il marche sur les traces de son père ", dit un courtisan à qui la Reine rappela que ses affaires allaient le retenir à Paris et ce, jusqu'au retour lointain du Roi, qui après Hesdin allait assiéger deux ou trois autres places fortes pour ne pas perdre la main. Ni celle de Cinq-Mars, seul être à qui le Roi désormais donnait du
    " cher ami ", d'après les rapports qu'adressait chaque semaine M. de Chavigny, espion aux armées, à Mazarini, qui en faisait lecture avec son inimitable accent transalpin, accent qui ajoutait au plaisir des nouvelles attendues. Cet homme savait pousser Son Eminence à sourire, quel talent !
    Le Dauphin, comme tout grand seigneur, possédait désormais son épée. Le cadeau lui venait de Richelieu, comme le tambour, son jouet préféré : il le voulait dans son lit pour ses siestes obligées et ne se lassait pas de rompre les oreilles de la Cour, principalement celles de Mme de Lansac, qui avait la sottise de s'en plaindre au généreux donateur, le vieil homme en rouge qui parfois grimaçait, parfois souriait. Son Eminence avait armé le prochain roi de France.
    - Vous aussi, Monseigneur, comme votre glorieux père, vous forcerez les villes. En attendant le canon et le mousquet, voici, au fils de Louis le Victorieux, une belle et bonne épée.
    Le Dauphin écarquillait de grands yeux. On reçoit moins de cadeaux fils de Roi que fils de bourgeois. Toute la volaille s'ex-clama, la Reine s'inquiéta devant ces six pouces d'acier (" de Tolède, Madame ", tint-il à préciser) mais le Cardinal lui sourit.
    - Si Votre Majesté permet ce présent guerrier de son fidèle ministre au premier fils de France.

    La Reine rendit ce sourire qu'elle se surprit à juger doux. Les yeux de l'homme en rouge étaient joyeux, et son visage funèbre affichait l'air bonasse et malicieux du vieil oncle venu de sa campagne g‚ter un sien neveu. C'était un peu vrai.
    Le présent était somptueux. On sortit, d'un fourreau en cuir de Russie brodé de fils d'argent qui esquissaient la forme souple d'un dauphin, une fine lame savamment émoussée ; à la pointe arrondie étaient gravés deux L entrelacés en une couronne de lauriers. Elle s'enfonçait dans une garde de deux anneaux d'or, d'un quillon en cuivre terminé au pommeau par une noisette d'or sertie d'une couronne de diamant. Le tout se portait avec un baudrier recouvert de soie bleu roi aux armes du Dauphin. Brassac en ceignit l'enfant, qui se tint droit et roide immédiatement.
    - Déjà une humeur de capitaine, n'est-ce pas, monsieur Guitaut ? dit le Cardinal. Le Dauphin est-il assez martial à votre go˚t, mon cher comte ?
    Le cher comte avala la flatterie et salua :
    - Mgr le Dauphin est Mars en personne.
    - La duchesse d'Aiguillon, ma nièce, a pensé que l'uniforme ne serait pas complet sans ce qui sied le mieux aux nobles soldats, le panache.
    Et Richelieu sortit de son dos o˘ il la tenait cachée une boîte ronde dont on tira un petit chapeau de feutre au triple panache de plumes blanches, modèle en réduction de la coiffure du beau Cinq-Mars et du brave Guitaut.
    Ce dernier salua l'enfant d'une envolée de son chapeau qui balaya trois fois le parquet. Louis Dieudonné s'essaya à faire de même devant son capitaine. Il montra moins d'aisance mais autant de bonne volonté. On applaudit très fort.
    - N'oubliez pas, mon fils, de remercier le Cardinal des bontés dont il vous comble.
    L'enfant regarda sa mère puis se tourna vers l'homme rouge, et, le visage sérieux, recommença l'exercice du chapeau avant de s'en recoiffer de travers.
    - Madame, dit Richelieu à la Reine, Mgr le Dauphin allie la prestance guerrière de son père à la gr‚ce que toute l'Europe vous reconnaît.
    Le mot aimable du tyran à la Reine allait galoper vers Paris, o˘
    l'on parlerait trois jours du rapprochement entre Son Eminence et l'Espagnole alors que le Roi guerroyait.
    L'Espagnole avait reçu le

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