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Le lit d'Aliénor

Le lit d'Aliénor

Titel: Le lit d'Aliénor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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ne pouvait me faire plus grand plaisir.
    Resté seul, Louis saisit entre ses doigts un lacet de cuir et le fit claquer sur le sol à quelques pas de sa paillasse. Il gronda, en crispant ses doigts sur la lanière :
    – C’est ce que nous allons voir, catin !
     
    – Déshabillez-vous, Aliénor.
    L’ordre la saisit à peine retombés les pans de toile. Une chandelle brûlait qui faisait danser l’ombre du roi sur les parois de la tente. Il était debout, face à elle, torse nu, sa croix d’ébène plombant sa poitrine blanche.
    Un frisson parcourut l’échine de la reine. Elle n’aimait pas ce ton, mais décida dans tout son orgueil de ne pas y prendre garde. Depuis que Bernard était proche, elle se sentait vulnérable. Il lui fallait apprivoiser le roi pour mieux le rouler. Elle s’exécuta et se retrouva nue face à lui. Louis lui désigna le prie-Dieu.
    – Agenouillez-vous.
    Bien que surprise, elle obéit encore. Louis lui mit entre les mains un chapelet de cornaline, et Aliénor les joignit en une prière.
    – Vous voulez me satisfaire, Aliénor ? Alors, priez ! Et qu’aucune autre plainte ne franchisse vos lèvres avant que j’en aie assez.
    Et tandis que les Pater noster glissaient entre les dents de la reine, il enroula la lanière de cuir autour de son poing et la leva. Elle s’abattit sur les reins de la jeune femme en un sifflement aigu qui lui arracha un cri de surprise et de douleur. Elle ferma les yeux et serra les dents tandis qu’un second coup atteignait ses épaules.
    Elle objecta d’une petite voix :
    – Vous me faites mal, Louis.
    – Vraiment ? La douleur est bonne pour le repentir, répliqua-t-il d’une voix cruelle en frappant plus fort.
    Aliénor laissa échapper un cri. La lanière lui déchirait la peau. Elle tenta de se relever en s’aidant du montant du prie-Dieu, mais Louis l’en empêcha en appuyant de tout son poids sur ses épaules.
    – Assez ! ordonna-t-elle en se tournant vers lui.
    Le visage du roi l’effraya. Il ressemblait à une de ces gargouilles au portail des églises et dans ses yeux brûlait un feu diabolique.
    \-Priez, Aliénor ! siffla-t-il entre ses dents. Ne m’obligez pas à appeler la garde pour vous y contraindre !
    – Vous êtes devenu fou !
    Il partit d’un rire gras. Aliénor sentit des larmes lui piquer les yeux. Louis, si fragile, si frêle, si dévot, lui faisait peur soudain, comme jamais elle n’avait eu peur. Elle cacha son visage dans ses mains et serra ses poings gelés sur les perles du chapelet. Elle se mit à prier de toute son âme pour que cela s’arrête. Mais Louis frappait, frappait et frappait encore tandis qu’elle ravalait ses larmes.
    Il lâcha la lanière de cuir lorsque le dos blanc ne fut plus qu’une plaie sanguinolente. Alors, il retira ses derniers vêtements et vint s’agenouiller derrière elle. Il la pénétra avec la même violence en joignant ses mains sur les siennes pour mieux la tenir à sa merci et assouvit son plaisir malsain, le visage de Bernard de Ventadour crucifié devant les yeux.
    Puis il se roula en boule sur sa paillasse et s’endormit aussitôt.
    Aliénor attendit que des ronflements soulèvent sa poitrine pour oser bouger son corps mutilé. Elle se retint de gémir et rassembla ses vêtements en silence. Elle s’habilla de même et, se forçant à redresser la tête, parvint à regagner sa tente sans rien laisser paraître.
    Là, humiliée, écœurée et meurtrie, elle se jeta sur ses couvertures et se mit à pleurer à gros sanglots.
    C’est sa chambrière qui vint me prévenir à l’aube. Je la trouvai couchée sur le ventre, les yeux cernés. Elle me raconta tout, et je constatai que son humiliation avait fait place à un désir profond de vengeance. Ce qu’elle avait toléré d’un moine, elle ne le supporterait pas d’un bourreau.
    Pour l’heure, j’allai chercher dans mes affaires un onguent contre les coups que j’avais eu soin d’emporter, pensant que ceux-ci ne manqueraient pas durant le voyage, et enduisis généreusement son dos.
    Aussitôt apaisée, elle décida d’agir comme si de rien n’était. Le roi comptait sans doute la voir défaite et soumise, elle allait lui prouver que le sang aquitain n’était pas celui d’une brebis. Je l’aidai à s’habiller sans toutefois serrer les lacets de son corsage et, quelques instants plus tard, à l’office, elle s’agenouilla comme les autres devant la croix de bois de six coudées de haut qui

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