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Le lit d'Aliénor

Le lit d'Aliénor

Titel: Le lit d'Aliénor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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versé une dot conséquente et exigé que la fillette reçoive la meilleure des éducations. Il n’imaginait pas que cette petite gagnerait en beauté ce qu’elle avait alors en manigance. Habile et rusée, l’enfant obtenait tout sans vergogne, exploitant sans aucun remords toute situation à son avantage, jouant même de chantage pour appuyer ses revendications.
    Interrompant le fil de ses souvenirs en remarquant que Béatrice l’examinait d’un regard mi- amusé, mi- interrogateur, il lança, en tapotant ses doigts libres sur l’accoudoir :
    – Aimeriez-vous rester à la cour, Béatrice ?
    Le regard pétilla de malice, ponctuant un oui franc. Suger s’attendrit :
    – Je m’en doutais. J’ai touché un mot de votre esprit à la reine, vous n’avez que deux ans de plus qu’elle et elle s’ennuie fort de ne point trouver quelqu’un de son envergure. Je crois que vous pouvez être celle-là.
    Béatrice laissa planer sur son visage un voile de satisfaction qui dénotait assez combien ce rôle lui convenait. Elle s’empara du blanc laissé en fin de phrase par son tuteur pour ajouter, d’un air entendu :
    – Il va de soi, mon père, qu’ainsi placée je pourrai être à même de vous raconter ces petits potins de cour qui ne manquent jamais d’intéresser quelques grands du royaume…
    – Je ne doutais pas un seul instant, ma chère enfant, que vous en devineriez l’importance, la remercia Suger d’un signe de tête complice.
    Puis il enchaîna, en lui tendant son verre :
    – Resservez-vous donc une rasade avant que je vous informe des convenances de votre nouvelle vie.
     
    Le tantôt, Béatrice de Campan était présentée à Aliénor comme recommandée par un petit baron d’Aquitaine. La jeune reine sauta de joie. Depuis le temps qu’elle entendait parler des Pyrénées, à l’autre bout de son duché ! De plus, cette damoiselle avait un minois à faire pâmer plus d’un. Puisque je l’oubliais, elle m’envoya au diable ! Suger l’accommodait d’un ange.
    L’ange s’infiltra très vite au milieu du va-et-vient de la cour. Elle s’attira même la sympathie de la comtesse d’Angoulême, qui avait suivi Aliénor au palais de la Cité, et qui me détestait comme elle détestait chacun. Cette petite peste sans aucun charme n’aimait qu’elle et jalousait tout le monde. Béatrice décida donc de l’apprivoiser pour mieux s’en servir et, habilement, y parvint. Son air ingénu n’attirait aucune méfiance ; mieux, il paraissait susciter protection. Aliénor, quant à elle, la trouvait fort à son goût, bien que trop pieuse et prude. Frustrée de caresses depuis mon départ et ne pouvant espérer de Louis que des étreintes brutales, sauvages et coupables, qui la laissaient sur sa faim, il ne lui aurait point déplu de convertir sa nouvelle amie à des jeux plus tendres. -Ce n’était pas si simple. Si Béatrice avait de l’esprit à revendre, une culture appréciable, elle n’éprouvait aucune attirance pour les femmes. En outre, elle tremblait et bafouillait en présence de Louis, signe qu’il ne lui était pas indifférent.
    Ce dernier y avait d’ailleurs été sensible. Béatrice avait cette beauté douce des icônes, et ses cheveux d’un blond doré lui faisaient à contre-jour une auréole autour du visage. Louis avait été saisi par tant de pureté, d’autant plus que Suger lui avait assuré que cette petite avait reçu une éducation en tout point semblable à la sienne. Et pour cause.
    Aliénor, pour sa part, ne s’en émut nullement. Certes, Louis l’aimait, la désirait et ne pouvait se soustraire à ses caresses, mais aussitôt après il la quittait pour rejoindre la chapelle. Aliénor avait posé des questions, leurs étreintes auraient pu trouver un prolongement bien plus tendre, proche de celui qui avait suivi leur hymen. Louis avait répondu évasivement que les tracasseries du royaume troublaient son sommeil et qu’il avait besoin de solitude et de recueillement. Elle ne l’entendait pas rentrer, et au matin, seuls la place et l’oreiller encore chauds à ses côtés trahissaient sa présence. Pire, elle avait remarqué à plusieurs reprises des stries violacées sur ses épaules et ses omoplates. Certaines rumeurs prétendaient que Louis se flagellait pour se punir d’avoir éprouvé du plaisir en sa chair. Aliénor ne savait qu’en penser.
     
    Cela faisait à présent trois semaines que Béatrice était intégrée au sein des proches

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