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Le lit d'Aliénor

Le lit d'Aliénor

Titel: Le lit d'Aliénor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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difficilement faire confiance à un eunuque. Cruel certes, mais une fois encore je n’avais pas le choix. Après une petite enquête, Aliénor se fit un plaisir de moucher à l’envi le vieil homme, par des plaisanteries fines qui répandirent à la vitesse d’un éclair son triste état et le déconsidérèrent auprès de nombreuses personnes. S’il s’opposait aux suggestions d’Aliénor, c’était par pure méconnaissance des femmes ! Voire par muflerie et jalousie, Aliénor et Louis s’aimaient tant !
    En vérité, Aliénor aimait surtout Denys, qui lui apportait quelques compensations aux déficiences du roi.
    Somme toute, tout allait pour le mieux. J’envoyai une colombe à mère, qui conforta mon initiative. Mathilde reprenait du terrain sur Étienne de Blois, et il était bon que Suger soit écarté.
    Il me restait une chose à faire à présent. Jouer avec la susceptibilité d’Aliénor. Elle n’avait soutenu les barons aquitains que pour tenir tête à Suger et au roi dans un temps où on l’empêchait de donner son mot. Elle demanda la libération du vicomte de Thouars comme une faveur à Louis et, devant leur nouvelle entente, Louis l’accorda. En échange, Aliénor réduisit les dépenses du royaume en limitant les festivités.
     
    – Quand me ferez-vous le bonheur d’un enfant ?
    La question était venue naturellement, tandis que Louis jouait avec la pointe du sein durci par ses caresses. Aliénor blêmit. Un instant, la vision d’une tête grosse comme son poing tétant ce même bout passa devant ses yeux.
    Elle répondit cependant d’une voix enjouée :
    – Bientôt, sans doute. Notre amour ne saurait à présent nous priver de cette joie.
    – Il me faut un fils, Aliénor.
    – Demandez à Dieu de nous le donner, Louis. Les fêtes de Noël approchent. Je voudrais pouvoir porter mon ventre comme un présent.
    – Je vais prier pour cela, mais avant…
    Il glissa sa main dans l’échancrure des cuisses pour les ouvrir davantage et, appuyant son corps frêle sur celui d’Aliénor, la fit sienne pour la seconde fois de la nuit.
     
    – Que te dire ? On m’avait assuré de son efficacité. Peut-être est-ce trop tard déjà.
    – Il me faut un enfant, Loanna !
    Elle tapa d’un poing rageur sur le bureau, puis explosa en colère contre elle-même :
    – Quelle sotte ! Pourquoi n’ai-je pas mis au monde cet enfant de Raymond au lieu de le faire mourir dans mon ventre. Il aurait suffi de le confier à quelque institution et aujourd’hui je porterais un futur roi !
    – Allons, calme-toi !
    Aliénor se tordait les mains, soucieuse. Je les lui pris et l’attirai contre ma poitrine. Il fallait changer ma stratégie. Au terme de dix-huit mois de mariage, Aliénor n’avait encore porté aucun enfant, cela commençait à attirer les soupçons. Or, si Aliénor ne devait pas mettre au monde de garçon, cela ne devait pas l’empêcher dans un premier temps d’avoir le gros ventre. Il suffisait que ses grossesses n’arrivent pas à terme. Je l’écartai doucement en la prenant par les épaules. Ses yeux étaient rougis de larmes.
    – Écoute. Peut-être cet élixir ne vaut-il rien. Il est sur la rive droite, dans les bois, une vieille femme qu’on prétend sorcière. Je m’en irai la visiter et lui demander conseil, veux-tu ?
    – Je t’accompagne.
    – Grand Dieu, non ! Que penserait-on si l’on te reconnaissait ? Tu as des ennemis, Aliénor, qui auraient tôt fait d’acheter cette femme pour savoir les raisons de ta visite. Laisse-moi faire. T’ai-je déjà trahie ?
    – Non, non, tu as raison. Mais va ! Je dois porter un enfant pour Noël.
    – Je te le promets, ma reine.
    La sorcière me donna une décoction qui avait, ma foi, quelques propriétés et je profitai de mon passage dans les bois alentour pour ramasser de l'artemis vulgaris que je savais trouver au creux des chemins. Bien au secret de ma chambre, je confectionnai à mon tour une poudre que, le moment venu, j’ajouterais au mélange pour provoquer une fausse couche. Jusque-là, Aliénor porterait l’enfant de Louis…
    Cela se passa ainsi. Le ventre tendu sous sa robe, chacun put voir la jeune reine sourire avec bonheur au bras de son époux radieux pour la veillée de Noël 1138 à Bourges.
     
    Aliénor était folle de rage. Louis venait d’entrer dans sa chambre pour lui apprendre que les Poitevins, à l’exemple des Orléanais, s’étaient, quelques semaines plus tôt,

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