Le Livre D'émeraude : Les Aventures De Cassandra Jamiston

une
banque de la Cité, expliqua Jeremy, circonspect.
    –  Dans une banque,
vraiment ? fit Clayton sans chercher à dissimuler son scepticisme.
Pourtant, il ressemble plus à un aristocrate qu’à un commis.
    À travers la porte à demi ouverte, il jaugeait
Gabriel, le scrutait, cherchait à lire en lui.
    –  Fais attention,
conseilla-t-il à Jeremy. Il y a en ce garçon quelque chose de dangereux.
    Le journaliste ne sut que dire. Son silence
devenant suspect, il se força à rire.
    –  Je crois que tu fréquentes
trop de criminels, Clayton, c’est toi qui deviens suspect… D’autant plus que
Gabriel a des informations à te révéler concernant les meurtres de la Dame
Noire.
    En vérité, ce fut plutôt Victoria qui parla,
Gabriel se contentant d’acquiescer de temps à autre. Mais lorsqu’elle eut
terminé le récit de la visite d’Abernathy à la banque, ce fut à lui que Clayton
s’adressa :
    –  Sir
Francis Abernathy ? En êtes-vous certain ?
    Clayton était penché sur la table et ne quittait
pas Gabriel des yeux.
    –  Oui.
Le connaissez-vous ?
    L’inspecteur
se caressa le menton d’un air pensif.
    –  C’est
l’un des chefs de la police secrète de Scotland Yard.
    Son
regard tomba sur la bague de Megan, posée devant lui sur la table.
    –  C’est donc une
chevalière identique à celle-ci que sir Francis a mise à l’abri dans son
coffre ?
    Gabriel opina du chef, tandis que Megan
intervenait à son tour :
    –  Et
ce n’est pas tout, regardez…
    Comme Nicholas le lui avait montré, elle fit
jouer le chaton de la bague entre ses doigts ; le rubis qui portait
l’ouroboros se souleva, révélant le dragon de perle noire serti dans une
émeraude.
    –  Le même dragon que sur
les lieux des meurtres, indiqua-t-elle en tendant la bague à Clayton.
    Oui,
c’était la même forme si particulière. La police n’avait retrouvé aucune bague de
ce type chez les victimes de la Dame Noire. Avaient-elles été volées ?
Etait-ce pour elles que l’on tuait ?
    –  Je vais me rendre ce
soir chez sir Francis avec des hommes, décida Clayton.
    –  Je
viens avec toi, lança aussitôt Jeremy.
    –  Moi
aussi, fit Megan en écho.
    Le
policier pivota vers elle, furibond.
    –  Ce
n’est certainement pas votre place.
    –  Mais c’est
injuste ! protesta Megan. Je suis persuadée que c’est grâce à mon article
que sir Francis a compris qu’il était menacé. Si je n’avais pas publié les
photographies du dragon, il n’aurait sans doute jamais fait le lien entre la
Dame Noire et sa bague !
    –  N’attendez pas de moi
des félicitations, rétorqua durement Clayton. Il n’est pas question que vous
veniez, je ne le répéterai pas.
    Son ton ne souffrait pas de contestation, et
pour une fois, Megan n’osa pas répliquer.
    –  Quant à toi, continua
Clayton en se tournant vers Jeremy, j’imagine que même si je t’interdis de
venir tu trouveras quand même le moyen d’être là. Mais ne t’avise pas de me gêner
ce soir dans mon travail, sinon je te mets sous les verrous pour la nuit.
    –  Bien sûr, s’empressa
d’approuver Jeremy. Peut-être devrions-nous emmener aussi Gabriel, il pourrait
nous être utile, ajouta-t-il, leur équipée au Pays de Galles encore fraîche dans
sa mémoire.
    Victoria
cilla.
    –  Ce n’est pas une bonne
idée, intervint-elle précipitamment. Mr. Dashwood ne doit pas être compromis
dans cette affaire. Il aurait des ennuis si la banque apprenait qu’il vous a
parlé de sir Francis Abernathy et de son coffre.
    –  Du reste, nous n’avons
pas besoin de lui, ajouta Clayton en se levant. Il y aura suffisamment de
policiers sur place, j’y veillerai.
    –  Mr. Blake, vous ne
m’avez pas rendu ma bague, l’interpella Megan.
    –  Je la garde, rétorqua
Clayton en la glissant dans la poche de son gilet. C’est une pièce à conviction
désormais.
    –  Mais
vous n’avez pas le droit ! s’indigna Megan.
    –  Ne vous est-il donc pas
venu à l’esprit, petite sotte, qu’avoir cette bague en votre possession vous
mettait peut-être en danger ? D’ailleurs, vous appartient-elle
vraiment ? Où l’avez-vous eue ?
    Jeremy et Megan se consultèrent du regard, et le
journaliste soupira :
    –  Tu ferais mieux de te
rasseoir, Clayton, car c’est une longue histoire…
    *
    Opaque et brumeuse, la nuit régnait sur
Cavendish Square. Toutes les fenêtres de la résidence de sir Francis Abernathy
étaient allumées, dessinant de