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Le livre du magicien

Le livre du magicien

Titel: Le livre du magicien Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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cadavres suspendus aux remparts comme des essaims de mouches, franchirent le pont-levis à grand bruit et débouchèrent dans la haute cour où les serviteurs de Sir Edmund s’affairaient encore à effacer toute trace du récent conflit. Corbett était perdu dans ses pensées et tout à fait déterminé quant à ce qu’il allait faire. Quand le gouverneur s’avança pour les saluer, il demanda où était Craon et découvrit alors que ce dernier s’était retiré avec humeur dans sa chambre. Il entraîna Sir Edmund hors de portée des oreilles indiscrètes, y compris de celles de Ranulf, et lui chuchota quelques mots pressants. Sir Edmund s’apprêtait à élever des objections, mais Corbett insista et le gouverneur finit par acquiescer. Ranulf brûlait de partir à la recherche de Lady Constance, mais le regard noir de son maître fit mourir ses arguments sur ses lèvres.
    — J’ai besoin de toi, Ranulf, dit le magistrat avec son sourire en coin particulier. Les moulins de Dieu commencent à tourner.
    Ils se rendirent dans sa chambre et Corbett prépara la pièce, tirant chaires et tabourets devant le feu que dressait Chanson. Le palefrenier avait dormi pendant presque toute la bataille, aussi dut-il essuyer les railleries incessantes de Ranulf et ne fut-il que trop heureux de s’échapper aux cuisines pour quérir bière, pain, fromage et morceaux de lard fumé. Bolingbroke les rejoignit et Corbett lui désigna l’une des sellettes devant la cheminée.
    — Je vous aurais volontiers accompagné, Sir Hugh, déclara Bolingbroke en s’installant et en prenant le petit plateau sur lequel Chanson avait disposé les victuailles. On dirait le château des damnés : presque tout le mur d’enceinte est festonné de pendus, expliqua-t-il, en mordant dans un bout de fromage.
    — Nous serons bientôt partis, répondit Corbett assis dans une chaire et trempant ses lèvres dans sa bière. Que ferez-vous alors, William ?
    — Oh, je rentrerai à Londres ! Il se peut que je demande un congé à la chancellerie. Me trouverez-vous un autre poste, Sir Hugh ?
    — Je ne vous trouverai rien !
    Bolingbroke laissa tomber son morceau de fromage.
    — Sir Hugh ?
    — Priez-vous pour son âme, William ? Pour votre bon ami et compagnon ? Votre frère d’armes, Walter Ufford ?
    Ranulf se tendit ; même Chanson, installé au coin de l’âtre, oublia de manger.
    — Vous êtes un traître, William, continua le magistrat, et je vais vous le démontrer. Grâce à deux points particuliers. D’abord, revenons chez Maître Thibault à Paris. Vous vous souvenez bien du Roi des Clefs qui pouvait ouvrir n’importe quelle porte, n’importe quelle arche ou coffre ?
    — Sir Hugh, je ne sais de quoi vous parlez.
    — Mais si, vous étiez présent. Le Roi des Clefs a été blessé, mains et poignets transpercés par une chausse-trape. Son sang jaillissait à gros bouillons et il hurlait tellement qu’Ufford a dû lui trancher la gorge. Vous rappelez-vous ce que cet homme transportait ? Un sac d’instruments bizarres, de passe-partout, d’outils ingénieux destinés à faire fonctionner une serrure ou forcer un fermoir. Où sont-ils ?
    Bolingbroke pâlit. Il respirait par à-coups et la panique était lisible dans ses yeux.
    — Ils sont restés là-bas, répondit-il en faisant mine de se lever.
    Ranulf, assis près de lui, lui mit la main sur l’épaule et le força à se rasseoir.
    — Vous les avez pris, continua le magistrat. Vous les avez emportés. Qui le remarquerait ? Le Roi des Clefs était mort et Ufford fou de peur. Vous vous êtes servi de ces clefs à deux reprises : la première quand vous avez assassiné Crotoy et la seconde quand vous avez tué Vervins.
    — J’étais avec vous quand Vervins a trépassé.
    — Bien sûr, admit Corbett. Mais vous aviez remis les clefs à Craon afin que lui ou l’un de ses hommes de main puisse monter en catimini l’escalier de la tour. Comme le dit l’Évangile de Saint-Jean : « Au commencement était le Verbe »...
    Le clerc sirota une gorgée de bière ― « et le Verbe était auprès de Dieu. » C’est là que tout a débuté, Bolingbroke, avec la poursuite du savoir, utilisée par Craon et son sinistre maître pour piéger notre roi. Philippe de France peut pousser des cocoricos : Édouard d’Angleterre est lié par le traité de Paris et le prince de Galles va épouser sa fille unique, Isabelle. Mais il y a une ombre au tableau. En

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