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Le livre du magicien

Le livre du magicien

Titel: Le livre du magicien Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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interrogea Bolingbroke qui prit une sellette pour s’asseoir près de son maître et, d’un geste de ses mains écartées, décrivit le couloir entre les deux portes. Louis était sans doute seul. Les deux clefs étaient dans son escarcelle, à sa ceinture, Sir Hugh, c’est affaire de logique. Il n’y en a point d’autre, ni pour cette pièce ni pour l’huis qui donne à l’extérieur. Il a sans doute clos la porte en sortant et il s’apprêtait à ouvrir l’autre quand il a perdu l’équilibre et est tombé. Il s’est fracassé le crâne et rompu le col.
    — Je serais plutôt de cet avis, admit Ranulf. De son propre aveu, Crotoy était circonspect. Il n’aurait laissé personne pénétrer dans sa chambre, sauf s’il estimait qu’il n’y avait aucun danger.
    Le magistrat se taisait. Il semblait évident que Crotoy avait glissé, que c’était un malencontreux accident. C’est ce que lui disait la raison, mais son coeur tenait un discours différent. Il ne pouvait accepter que ces deux sommités françaises soient venues à Corfe et aient péri de malemort. Bien entendu cela paraissait suspect, mais même si on faisait allusion à d’horribles menées, on en accuserait les perfides Anglais plutôt que les astucieuses machinations de la cour de France.
    — Il faut que nous soupions, grommela Chanson. J’ai l’estomac dans les talons !
    — Ainsi parle le dernier des philosophes, se gaussa Bolingbroke. Allons-y.
    Le dîner, en dépit de tous les efforts du gouverneur, fut morose. Les cuisines proposèrent un festin composé de tarte au brie, d’artichauts frits, de soupe à l’oseille accompagnée de figues et de dattes, suivie de poulets farcis de lentilles, de cerises et de fromage, de loches frites aux amandes et de tartes aux poires. Sur l’estrade, les musiciens jouaient de doux hymnes et des chansons populaires de trouvères. La haute table était recouverte d’un tissu de samit blanc, les plats et les couteaux étaient en argent et il y avait des gobelets précieux pour le vin. Le bouffon de Sir Edmund, un nabot aux cheveux noirs, pouvait bien cabrioler, l’atmosphère n’en restait pas moins lourde. Corbett trouvait même difficile de regarder Craon. Ranulf était assis, mal à l’aise, plutôt préoccupé, car Lady Constance avait renoncé à ses taquineries et s’était détournée pour s’entretenir avec Bolingbroke. Le magistrat, installé à la gauche du gouverneur, s’excusa auprès de l’épouse de ce dernier de son évidente maussaderie qu’il justifia par la fatigue et par le sincère chagrin qu’il éprouvait devant la mort infortunée de Crotoy. Sir Edmund respecta sa réserve et Corbett, tout en écoutant la musique des ménestrels, se laissa aller à ses pensées. Il reconnut l’un des airs.
    — C’est ça ! s’exclama-t-il.
    — De quoi s’agit-il, Sir Hugh ? interrogea le gouverneur.
    — De la bande de hors-la-loi. Ses membres se donnent des noms d’herbes et de fleurs sauvages, mais la jeune Phillipa, la première à disparaître, prétendait avoir un amoureux dans la troupe appelé le Goliard. C’est le terme provençal qui désigne un trouvère errant ; ce n’est un nom ni d’herbe ni de fleur.
    Il se replongea dans ses réflexions et était si absorbé dans ses idées qu’il se rendit à peine compte que le repas touchait à sa fin et que le père Andrew récitait une rapide prière d’action de grâce. Corbett présenta ses excuses et se retira. Ranulf et Chanson lui emboîtant le pas, il retourna à la tour de Jérusalem. L’huis pendait encore de guingois et le garde qui se trouvait là l’informa que la dépouille et les biens du défunt avaient été emportés.
    — Son corps est dans l’église, Messire. L’autre Français, celui qui ressemble à un goupil, a tout fait déménager.
    Corbett examina le sol encore souillé du sang de Crotoy puis monta les degrés abrupts. En haut, la porte était ouverte ; il la poussa et jeta un coup d’oeil dans la pièce, puis se dirigea vers le palier en ruine. Les pierres éboulées étaient solides et dures comme un mur et il ne restait rien à part une étroite alcôve ombreuse.
    — Puis-je vous aider, Sir Hugh ?
    Craon se tenait sur le seuil de la tour.
    — Non, non, Craon, vous ne pouvez m’aider, répondit le clerc en descendant l’escalier. Avez-vous rendu visite à Crotoy aujourd’hui ?
    — Oui. Je suis venu plus tôt, tout seul. Louis était vivant et en bonne santé

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