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Le Lys Et La Pourpre

Le Lys Et La Pourpre

Titel: Le Lys Et La Pourpre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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celle-là était de taille
puisqu’elle avait celle du maréchal de Schomberg, lequel je peux appeler meshui
mon « intime et immutable ami », depuis que Bassompierre s’est
éloigné de moi et a rejoint, à mon grand dol et à son futur grandissime
dommage, le cercle des vertugadins diaboliques.
    On se ramentoit – mais peut-être est-il bon que je le
rappelle – que, ayant ôté à Schomberg, sur la foi de faux rapports, sa
charge de surintendant des Finances, le roi l’avait de prime exilé dans son
château de Nanteuil. Mais ayant ensuite, sur ma pressante prière, diligenté une
enquête du parlement, il découvrit que Schomberg était blanc comme neige, le
remit dans sa charge et m’envoya l’en avertir. Schomberg conçut ce jour-là pour
moi une profonde gratitude, vertu qui est si rare chez les hommes, et plus
encore chez les courtisans, que je fus moi-même infiniment touché par sa
générosité et répondis avec beaucoup de chaleur à la chaleur de son amitié.
    — Mon ami, dis-je, après les bonnetades et étouffades
d’usage, c’est un sourire de la fortune que de vous voir en Fleury en
Bière ! Peux-je quérir de vous, en toute indiscrétion, si vous venez de
Nanteuil, de Paris ou de Fontainebleau ?
    — Je viens de Fontainebleau où le roi ayant ouï parler,
mais vaguement, de quelque complot touchant les sûretés du cardinal, m’a
dépêché céans avec une trentaine de gardes royaux.
    — C’est très bien pensé, dis-je. Avec vos gardes et vos
Suisses, cela fait une soixantaine de soldats et c’est bien assez pour assurer
les sûretés du cardinal.
    — Ma fé ! Vous avez la même idée que moi !
Mais c’est justement ce que ne veut point le cardinal !
    — L’avez-vous vu ?
    — Je viens de le voir !
    — Eh bien ?
    — Il m’a tenu un propos bien étrange ! Il m’a dit
que ces gardes que je lui amène, ajoutés à vos Suisses, sont une force
conséquente et qu’elle lui sera très utile dans la mesure où il ne l’emploiera
pas. Je n’ai rien entendu à ce baragouin ! Tête bleue ! Je ne suis
qu’un soldat et le cardinal est trop profond pour moi ! De toutes façons,
il va dans l’instant éclairer sa lanterne, car il veut nous voir tous les trois
en son cabinet pour décider de cette affaire.
    — Moi aussi ? dit mon père.
    — Marquis, dit Schomberg, il vous a cité en premier,
tant sans doute il estime votre sagacité.
    — Mais, Excellence, je ne suis pas, comme vous-même et
mon fils, membre du Conseil des affaires !
    — Le Conseil des affaires, dit Schomberg avec quelque gravité,
ne laisse pas que de faire appel, quand et quand, à des personnes étrangères,
si sur tel point précis il a besoin de leur compétence.
    À quoi mon père salua et aussitôt se détourna, sans doute
pour cacher le plaisir et peut-être aussi la rougeur que ce discours lui avait
donnés.
    Là-dessus Desbournais vint nous dire que le cardinal nous
attendait. Puis, sans rien ajouter, il nous précéda à pas tant rapides que nous
avions du mal à le suivre, me donnant l’impression que chez le cardinal, le
temps ne se comptait pas en heures, mais en minutes et même en secondes.
Impression qui se confirma quand, sur la question que je lui posai sur Monsieur
Charpentier, Desbournais me dit que le cardinal l’avait envoyé dormir quatre
heures dans ses quartiers. Quatre heures ! m’apensai-je. Quatre heures par
nuit !
    Pour moi, quand j’entrai dans le cabinet de Richelieu, il ne
me parut pas avoir changé de place depuis la veille, non plus que son chat qui
avait dû pourtant, comme son maître, manger, boire, dormir et avaler, en outre,
une goulée d’air dans le parc du château.
    Sur une petite table, à côté de la grande, était assis un
secrétaire qui, le front baissé, travaillait. Je le connaissais de vue, mais
non de nom. Il était occupé à tailler, avec un petit canif, non une seule mais,
à ce qu’il me sembla, une demi-douzaine de plumes.
    À notre entrant, le cardinal interrompit la lecture d’un
épais rapport qu’il avait en main puis nous sourit, nous salua de la main et,
prolongeant son geste de la façon la plus gracieuse tout en lui donnant une
autre signification, il nous invita à prendre place sur les trois chaires à
bras qui faisaient face à sa table. Prenant alors la parole, il nous remercia
fort aimablement d’être venus le trouver pour l’aider à résoudre un très ardu
problème auquel il était confronté. Ce mot

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