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Le Maréchal Jourdan

Le Maréchal Jourdan

Titel: Le Maréchal Jourdan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric Hulot
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conditions qui ne pouvaient que conduire à un échec. Mais c’était déjà chez
    lui ce réflexe qui lui faisait ne pas savoir refuser un poste de peur de voir, par contrecoup,
    compromise sa situation.
    Entre Bonaparte et Jourdan, il n’y eut jamais aucun mouvement de sympathie ni même
    de cordialité. Le premier, chez qui la rancune était un sentiment puissant, en voulut toujours
    au second et, du coup, son jugement faussé alla jusqu’à mettre en doute ses capacités
    militaires. À Satite Hélène, il se laissa aller à confier à Las Cases :
    « Il était sans résolutions et imbu des plus faux principes de
    guerre… », ce qui montre jusqu’à quel potit pouvait aller
    l’erreur de jugement de l’empereur. On aurait pu lui répondre que Jourdan
    avait donné à la France la rive gauche du Rhin et que lui, avec tout son génie,
    l’avait perdue. Ce n’est qu’au moment du coup d’État
    de Brumaire que Jourdan avait tenu l’avenir de la France entre ses mains et avait
    balancé sur la conduite à tenir, ce que Bonaparte ne pouvait oublier. Si ce sincère républicain
    avait été se mettre à la tête de la garde du Directoire qui ne demandait qu’à le
    suivre, Bonaparte et ses complices auraient fini fusillés, le lendemain. Mais Jourdan était trop
    honnête pour sauver un régime aussi corrompu et discrédité que le Directoire ; il ne
    discernait aucune personnalité parmi les hommes politiques capables de prendre la tête du pays. A priori , ce que promettaient Sieyès et ses amis ne pouvait que le séduire. Il
    n’imagina pas un instant que Bonaparte puisse confisquer la république pour y
    substituer un pouvoir personnel. De là, sans doute, son comportement neutre à Satit-Cloud mais
    qui conservait quelque chose de menaçant que ne pouvait admettre le premier consul. Il craignait
    tellement Jourdan qu’il le porta sans hésiter sur la liste des proscrits. Et ce fut
    la réaction violente de certains hommes politiques et d’une partie de
    l’armée qui le contraignit à faire machine arrière et à en attribuer la paternité à
    Sieyès. Ce fut le même souci de ménager l’armée qui l’amena à faire de
    Jourdan un maréchal mais il le fit à petits frais. Jamais ce dernier n’eut droit à un
    grand commandement, pas plus qu’à un titre de noblesse ou à une de ces dotations dont
    la distribution tenait de l’arbitraire.
    Son envoi en Espagne releva de la farce, mais une farce sinistre. On lui donna un titre
    ronflant mais sans aucun pouvoir. Il n’était là que pour servir de conseiller à son
    ami Joseph, incapable de commander une armée et qui, au demeurant, ne se conforma pas à ses
    avis. Moyennant quoi, ce fut lui, Jourdan, qui servit de bouc émissaire et paya les erreurs de
    l’autre. Mais s’il en souffrit, il supporta l’adversité avec un
    tact, une constance et un stoïcisme admirables. Il fit même preuve d’une hauteur de
    vues et d’un patriotisme exceptionnels en offrant de servir en 1814, au moment de
    l’invasion de la France, alors que l’année précédente Napoléon
    l’avait écarté et sanctionné avec la plus incroyable des mauvaises fois.
    Dans de telles conditions, on comprend mal qu’en 1815, comblé
    d’attentions par la Restauration, il se soit rallié à Napoléon qui, au demeurant,
    l’accueillit sans trop de chaleur. Pensait-il que le retour impérial pourrait
    durer ? Craignait-il, comme ce fut trop souvent le cas, de
    « manquer » ? Il est difficile de trouver une explication
    logique et rationnelle à sa conduite, et on peut dire qu’il avait bien mérité la
    froideur de Louis XVIII au début de la seconde Restauration. Il eut la chance, à la fin
    de sa vie, de se voir placer dans une position qui lui convenait parfaitement, sous un régime
    politique pour lequel il se sentait les plus grandes affinités. En cela il fut plus heureux que
    nombre de ses anciens camarades.
    Sur un plan personnel et familial, il mena une vie exemplaire :
    il eut, certes, le bonheur de rencontrer une femme qui avait beaucoup de qualités ;
    bon mari et bon père, il aurait pu être cité comme modèle dans une période où de nombreux
    couples n’étaient pas des parangons de vertu. Et l’exemple venait de
    haut ! Un autre terrain où sa conduite fut irréprochable fut celui de
    l’honnêteté. Alors que nombre de maréchaux et de généraux se conduisaient en pillards
    dans les pays occupés, accumulant à leur profit les

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