Le Maréchal Jourdan
conjurés. Tout d’abord, il s’était tourné vers
l’armée d’Allemagne dont les attachements à la République étaient bien
connus. Il approcha Hoche qui, depuis février 1797, avait remplacé Beurnonville à la
tête de l’armée de Sambre et Meuse. Celui-ci était entré assez facilement dans les
vues de Barras et, au début de juillet, avait détaché quinze mille hommes, officiellement pour
gagner Brest et se préparer à renouveler le débarquement en Irlande qui avait été un échec.
Mais ils s’arrêtèrent à moins de quarante kilomètres de la capitale, ce qui était
titerdit par la constitution et provoqua une vive agitation ainsi que de
l’inquiétude dans les milieux royalistes. En même temps Barras procédait à un
remaniement ministériel et nommait Hoche à la guerre. Mais celui-ci, déjà très malade (il
devait mourir deux mois plus tard), démissionna au bout de six jours, se disant trop jeune pour
exercer de telles responsabilités.
On se demande pourquoi Barras ne fit pas appel à Jourdan pour le remplacer. Son loyalisme
vis-à-vis de la République était connu et il avait encore suffisamment de contacts avec les
cadres de l’armée de Sambre et Meuse pour y être accepté sans difficulté. Il est à
peu près certain que Barras n’aimait pas Jourdan, le jugeant un peu trop jacobin à
son gré. Peut-être aussi l’estimait-il encore trop novice en politique. Il
l’avait montré dans la récente affaire Ramel. Ce général, qui commandait la garde du
Directoire et qui était également inquiet de l’agitation royaliste, avait écrit aux
présidents des deux conseils en les avertissant qu’il avait appris de source sûre
qu’un certain nombre de députés se préparaient à renverser la République et que lui
et ses troupes la défendraient « jusqu’à la
mort » (21 août 1797). On imagine l’effet qu’avaient
produit de tels documents, aussi bien sur les conjurés que sur les défenseurs du Directoire.
C’était une énorme gaffe et Jourdan, à qui on ne demandait rien, s’était
cru autorisé à prendre la parole le surlendemain pour rappeler simplement Ramel son devoir de
réserve comme s’il avait eu à coeur de défendre les députés royalistes.
D’ailleurs, Barras n’avait pas attendu aussi longtemps pour prendre
d’autres dispositions. Il s’était, dès la démission de Hoche, adressé à
Bonaparte qui était son obligé et dont il connaissait mieux que quiconque le manque de
scrupules. Celui-ci se dépêcha de lui envoyer Augereau et sa division. Il arriva le
7 août et, le jour même, pour couper court à toute contestation
il fut nommé à la tête de la 17 e division militaire,
celle de Paris. Le dispositif étant en place, le coup d’État du
18 Fructidor (4 septembre) se déroula sans accrocs. Ce ne fut que le
premier d’une série qui allait permettre au Directoire, frappant tantôt à droite,
tantôt à gauche, de se matitenir en place par une politique de bascule. Mais le système
présentait l’inconvénient de faire du coup d’État un moyen de
gouvernement et le Directoire lui-même finit par en être victime un peu plus de deux ans plus
tard.
Sur le moment, en 1797, l’action du Directoire fut brutale. Barthélemy et
Pichegru, considérés à tort ou à raison comme les têtes du complot, furent arrêtés. Carnot, qui
pourtant était loin de partager leurs idées, fut prévenu par son ami Lenoir Laroche, ministre
de la Police générale, et ne trouva son salut que dans la fuite. Réfugié en Suisse, il ne
devait en revenir qu’après le 18 Brumaire. Dans la foulée, Barras fit
incarcérer tous les députés présumés royalistes qui étaient au nombre de deux cents et près de
soixante-dix personnes, dont Pichegru et Barthélemy, furent déportées en Guyane. Devant ce
qu’il restait d’un Conseil des Cinq-Cents terrorisé, dès le lendemain du
coup d’État, Jourdan prononça un violent discours, félicitant les directeurs pour la
manière énergique dont ils avaient brisé le complot et stigmatisant ses anciens collègues
vaincus. Il termina en proposant que soit nommée une commission chargée de rédiger dans les
délais les plus brefs une adresse au peuple et à l’armée, ce que Barras
n’apprécia pas trop.
Ayant vu son président arrêté, le Conseil des Cinq-Cents ne pouvait faire
moins que porter à sa place
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