Le Maréchal Jourdan
visiblement la plus réaliste, surtout
si l’on tenait compte de la chaleur écrasante qui régnait. Ce fut alors
qu’titervtit le maréchal Victor qui ne brillait pas par l’titelligence.
Il s’emporta, déclara qu’il était honteux de demeurer dans
l’inaction et pressa vivement Joseph de donner l’ordre de se porter sur
l’armée ennemie dont il assurait ne faire qu’une bouchée. On était en fin
d’après-midi ; il restait peu d’heures de jour. Joseph
hésitait. Il craignait, s’il contrariait Victor, que celui-ci ne se plaignît à
Napoléon, clamant qu’on l’avait empêché par excès de prudence de
remporter une victoire facile et décisive. Il finit donc par donner, quoique à
contrecoeur, l’autorisation. La bataille de Talavera, qui allait se
dérouler sur trois jours, s’engagea.
Ce qu’il y a de remarquable dans cette rencontre, c’est
qu’une partie seulement des forces en présence, de part et d’autre, y
participa. Du côté français, seul Victor mena les attaques, lançant à plusieurs reprises son
infanterie à l’assaut des collines tenues par les Anglais. Sebastiani, qui estimait
que Jourdan avait raison en voulant temporiser, se contenta de quelques démonstrations
soutenues par des tirs d’artillerie. Quant à Jourdan, furieux de constater
qu’on ne tenait aucun compte de ses recommandations, il demeura spectateur muet et
se garda bien de donner un nouvel avis. Pour un peu, il aurait quitté le champ de bataille et
serait retourné à Madrid. Du reste, tout le déconcertait dans cet affrontement,
jusqu’au fait qu’entre les assauts les soldats des deux camps
descendaient boire dans le ruisseau Albareche et se regardaient tranquillement, sans le moindre
signe d’hostilité, comme s’ils n’avaient pas été des
adversaires. Et leurs officiers ne faisaient rien pour empêcher cette espèce de
fraternisation.
Chez les alliés, il y eut un phénomène identique. Seules les divisions anglaises, retranchées
dans les collines, supportèrent le poids des assauts français, et les Espagnols, déployés entre
Talavera et l’armée anglaise, assistèrent, eux, en spectateurs à toute la
bataille.
Leurs pertes, plutôt légères, dépassèrent à peine mille deux cents
hommes. Le deuxième jour vit se répéter les mêmes assauts que le premier. Les soldats de
Victor, engoncés dans leurs lourds habits de drap, peinaient à avancer et leur dynamique
manquait d’autant de mordant.
Le troisième jour, se croyant menacé sur sa droite, Victor esquissa un mouvement de recul
sans en prévenir personne, ce qui allait lui valoir un peu plus tard une explication orageuse
avec Sebastiani qui, n’ayant pas été informé de ce mouvement en arrière, en exécuta
sans motifs un identique. Mais voyant peu après que les alliés, loin de les poursuivre,
semblaient ne pas bouger, tousdeux arrêtèrent leur retraite et vinrent réoccuper leurs positions primitives.
Ce fut pour constater à leur grande stupeur que l’ennemi avait déguerpi pendant leur
recul. En définitive, les Français restaient maîtres du champ de bataille et Madrid se trouvait
hors de danger.
La veille au soir, Wellesley avait appris que Soult, déboulant du nord, marchait sur ses
arrières et que Moncey venait d’occuper El Ponte del Arzobispo, très en arrière de
ses lignes, sur le Tage, que Cuesta avait négligé de faire garder. Il avait aussitôt averti son
partenaire de sa décision de reculer sans tarder et, pendant qu’il en était encore
temps, jusqu’à Lisbonne. Entre les deux hommes, avait eu lieu une scène
d’une rare violence, Cuesta voulant convaincre l’Anglais de continuer à
marcher sur Madrid. À la fin, son indignation avait été telle que l’Espagnol était
tombé, frappé d’apoplexie. Sans s’en préoccuper davantage, le général
anglais, abandonnant les Espagnols à leur sort, avait immédiatement battu en retraite et, du
même coup, sauvé son armée. Mais le plan élaboré par Jourdan, même s’il
n’avait pas pu entièrement se réaliser, avait, jusqu’à un certain potit,
porté ses fruits et permis à Joseph de préserver sa capitale.
Talavera fut une bataille incertaine où les pertes s’équilibrèrent : un
peu plus de sept mille hommes de chaque côté. Sebastiani avait dû abandonner plusieurs canons
embourbés dans les vignes, mais dans leur retraite les
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